mardi 26 juillet 2022

Celso Lagar, peintre espagnol de l'école de Paris

 

La classe : avoir son portrait, peint par son copain,... pas n'importe qui : Amedeo...Modigliani ! 

En 1917, Celso Lagar vit depuis un an à Paris. Il a 26 ans, il est Espagnol, né à Salamanque en 1891. Il a fréquenté l'atelier de Miquel Blay aux Beaux Arts de Madrid, avant que son maitre l'envoie à Paris. où il se lie d'amitié avec Max Jacob, Blaise Cendrars, André Derain, Fernand Léger, ou encore Amedeo Modigliani qui réalise plusieurs portrait de lui dont l'huile sur toile qui précède. Il fait également la connaissance du marchand Léopold Zborowski qui lui consacrera une exposition en 1928. C'est alors qu'il réalise le présent tableau, "Hommage à Guynemer" : il devient Français, on comprendra plus tard pourquoi mort à Séville en 1966, l'Espagne le réclame, comme peintre Espagnol ! 

En septembre de la même année, Georges Guynemer, capitaine de l'aviation française disparaît au cours d'une mission dans les Flandres. La mort du pilote de guerre, célèbre pour avoir remporté de nombreuses victoires et pour avoir été notamment le premier à abattre un bombardier lourd allemand, choque profondément la nation. L'aviateur, par son sang-froid, son habileté, sa loyauté et la précision de ses manoeuvres avait gagné l'admiration de ses pairs et même de l'ennemi. Ainsi, Ernst Udet, grand pilote allemand, racontera comment Guynemer, qui s'inspirait de l'ancienne chevalerie lors de ses combats aériens, l'avait épargné alors que sa mitrailleuse s'était enrayée. Lors de l'enterrement de Guynemer, plusieurs pilotes allemands, dont Udet, iront fleurir sa tombe.

Dans son Hommage à Guynemer, Lagar personnifie le pilote par l'attribut qui le caractérise le mieux, l'instrument de ses victoires, son avion. Le peintre est fidèle dans la retranscription du modèle, un SPAD, dont le gouvernail est paré du drapeau français tandis que la coque, les ailes et les roues sont ornées de cocardes tricolores. Ces dernières, ont été, à partir du XXème siècle, utilisées afin d'indiquer la nationalité des avions militaires. Mais elles sont aussi, un symbole fort de patriotisme. Celso Lagar, très attaché à la France où il s'est fait de nombreux amis et a rencontré sa femme, Hortense Bégué tient à apporter son soutien à ce pays qu'il chérit tant.

L'introduction rédigée par Gustave Kahn, pour le catalogue de l'exposition Celso Laga peintre, Max Jimenez, sculpteur tenue à la Galerie Percier à Paris en 1924, donne un éclairage pour la compréhension de l'Hommage à Guynemer: "L'art de Lagar est solide et franc, d'une couleur somptueuse et nourrie, d'un dessin ferme et elliptique. Ce castillan a gardé dans les yeux l'éblouissement du beau soleil fauve d'outre Pyrénées. Il a le goût des harmonies sobrement rutilantes, des ciels compacts et pourtant chaudement éclairés en plaques brillantes sur une nature ordonnée, précise, ardentes, à fermes contours".

Hommage à Guynemer, figure parmi les chefs-d'oeuvre de Lagar. Le tableau est défini par un mode de construction similaire à celui du Port de Bilbao, aujourd'hui conservé au musée des Beaux-Arts de Bilbao. Le peintre agence sa composition selon plusieurs angles de vues qu'il superpose les uns aux autres.

Ce traitement post-cubiste, témoigne de l'influence des artistes d'avant-garde qu'il a côtoyés à Montparnasse à partir de 1916. Sans doute faut-il y voir aussi l'héritage d'années d'observation du travail de son père, sculpteur sur bois et de sa propre formation, puisqu'il étudiera la sculpture quelques années avant se consacrer uniquement à la peinture. En effet, dans le présent tableau, Lagar semble vouloir retranscrire la tridimensionnalité de son sujet sur la surface plane. Les formes et leurs contours sont dessinés par des aplats de couleur vibrante intensifiés par les contrastes qu'ils produisent entre eux. L'apposition, côte à côte, de tons jaunes et bleus associés à des courbes roses et vertes décrivent des tourbillons où viennent filtrer les rayons du soleil. Le peintre a également recours à une vue en contreplongée, qui vient renforcer l'impression de suspension de l'avion dans les airs. Cet angle de vue place le spectateur dans le ciel, au-dessus de l'avion. Associé à un cadrage légèrement décalé vers la gauche, il suggère que l'avion va poursuivre sa course et finir par sortir hors du cadre. Les inscriptions 'ALSACE' et 'HAUTE SOMME' figurent le chemin parcouru et viennent amplifier l'effet de mouvement.

Voilà, merci Christie's de son commentaire et de la photo d'un tableau vendu dans une vente aux enchères il n'y a pas si longtemps. Je devrai consulter les catalogues des ventes pour dénicher d'autres oeuvres de France, son pays d'adoption, en commençant par Paris bien entendu :




et puis Rouen, la Seine, et même Honfleur





la mer normande


et la Rochelle



forcément, on trouve ses peintures de femmes, inspirées de Modigliani





 





mais l'Espagne reste prégnante








Girone



le port de Barcelone


les musées de Catalunya présentent sa "Pastorale"

avec les sculptures de son épouse Hortense



Sont présentés les petits catalogues des expositions que Lagar a montées en 1916 et 1918 aux Galeries Laietanes, avec sa compagne Hortense, qui sont essentiels pour savoir ce qu'il a exposé et, par conséquent, ce qu'il peignait pendant cette période en Catalogne. Il y a aussi une carte postale que Lagar a envoyée à son galeriste et marchand Santiago Segura, le promoteur des Laietanes, pour lui souhaiter une bonne année 1918, et qu'il a illustrée à l'aquarelle d'une nature morte très proche de ce que il travaillait à l'époque. Et enfin, on trouve également la peinture à l'huile "Pastorale", l'une des plus remarquables de toutes les pièces qu'il a peintes lors de son séjour en Catalogne.


De ce tableau, cependant, nous savons très peu de choses, car ce titre ne nous permet pas de l'identifier définitivement avec aucune des œuvres figurant dans les catalogues que nous connaissons des expositions de Lagar entre 1915 et 1918. L'œuvre est entrée dans la collection du musée en 1960 en tant que don de Sr. JS Dellal avec la Crane Kalman Gallery à Londres comme intermédiaire. Cela signifie que Lagar a presque certainement emporté le tableau avec lui à Paris lorsqu'il y est retourné en 1919; c'est là que le galeriste anglais Crane Kalman le contactera à la fin des années 1950, et fera un grand effort pour faire connaître son travail, alors presque oublié. 

Du point de vue thématique et formel, la peinture est très proche des œuvres considérées comme les plus « noucentistes » de toutes celles peintes par Lagar, tant que nous considérons le primitivisme comme une caractéristique étroitement liée au mouvement , et nous pouvons donc dater entre 1915 et 1916. On peut le comparer, par exemple, à l'estampe qui figure sur la couverture du catalogue de l'exposition aux Galeries Dalmauen 1915, où une figure évoquant Eve offre un fruit à Adam sous le regard attentif d'un chien. Sur l'estampe, les traits prononcés des personnages sont ouvertement primitivistes, et en particulier le masque de la femme, avec ses yeux en amande, renvoie à un élément très caractéristique de l'œuvre de Lagar ; dans le tableau, les traits sont légèrement atténués.

 je termine par quelques "natures mortes" bien vivantes :



Comme l'écrivit Max Jacob: "Voici un peintre dans l'âme et dans l'esprit; voici un producteur généreux que ne gênent ni les barrières des différentes écoles modernes ou autres. Il peint ce qu'il aime, il aime ce qu'il peint et il y met l'ardeur d'une compréhension nourrie et sagace. Que de vrais sentiments ! Et qu'on a de plaisir à les reconnaître ! Tout ce qui en Lagar sort comme les fleurs d'un vase: fleurs épineuses, fleurs tristes, fleurs de lumière ! Ah oui! Lagar est un espagnol ! Le folklore de ses ancêtres a la grosse et spleenétique gaîté de Plaute, l'amertume psychologique du cordoban Sénèque, le sens artiste inné des japonais, et le profit multiple des héros russes"

(Max Jacob, catalogue d'exposition Lagar, Galerie Zborowski, Paris, 1928).



PS : Robert Delaunay (1885-1941) rend hommage à Blériot

amusant de voir comment il a fait ! (ne pas confondre avec Sonia, sa femme ! )


En 1914, Robert Delaunay présente la toile « Hommage à Blériot », véritable manifeste de sa méthode simultaniste. (aujourd'hui on parle de "en même temps"). Les mouvements de la toile sont impulsés par des formes empruntés à l'aéronautique : biplan, hélice. L'avion, symbole de l'émancipation de l'homme par rapport à la Terre, offre à Robert Delaunay un prétexte pour s'émanciper des codes de la peinture traditionnelle, et s'avancer vers l'« inobjectif » et la « peinture pure ». Il choisit l'avion car il abolit les notions de distance, et permet au peintre d'aller vers une ubiquité panoramique. Il oppose une plénitude harmonique aux tentatives descriptives du passé. De même, ce motif, comme celui de la tour Eiffel, lui permet de se revendiquer peintre de la modernité. La préférence du peintre pour la courbe est perceptible (contrairement aux peintres abstraits Kasimir Malevitch et Piet Mondrian), déjà affirmée dans la série des Fleurs (1909), et qui se poursuivra dans les Formes circulaires ...

aujourd'hui 26 juillet 2022

la Nature est clémente : it rains ! 

ainsi les incendies de forêt s'éloignent de nous, et la pelouse grillée va reverdir

la France manque cruellement d'eau

de pétrole, et d'électricité

mais le prix de l'essence baisse :

tout va bien !