La classe : avoir son portrait, peint par son copain,... pas n'importe qui : Amedeo...Modigliani !
En 1917, Celso Lagar vit depuis
un an à Paris. Il a 26 ans, il est Espagnol, né à Salamanque en 1891. Il a fréquenté l'atelier de Miquel Blay aux Beaux Arts de Madrid, avant que son maitre l'envoie à Paris. où il se lie d'amitié avec Max Jacob, Blaise Cendrars, André
Derain, Fernand Léger, ou encore Amedeo Modigliani qui réalise plusieurs
portrait de lui dont l'huile sur toile qui précède. Il fait également la
connaissance du marchand Léopold Zborowski qui lui consacrera une exposition en
1928. C'est alors qu'il réalise le présent tableau, "Hommage à
Guynemer" : il devient Français, on comprendra plus tard pourquoi mort à Séville en 1966, l'Espagne le réclame, comme peintre Espagnol !
En septembre de la même année,
Georges Guynemer, capitaine de l'aviation française disparaît au cours d'une mission
dans les Flandres. La mort du pilote de guerre, célèbre pour avoir remporté de
nombreuses victoires et pour avoir été notamment le premier à abattre un
bombardier lourd allemand, choque profondément la nation. L'aviateur, par son
sang-froid, son habileté, sa loyauté et la précision de ses manoeuvres avait
gagné l'admiration de ses pairs et même de l'ennemi. Ainsi, Ernst Udet, grand
pilote allemand, racontera comment Guynemer, qui s'inspirait de l'ancienne
chevalerie lors de ses combats aériens, l'avait épargné alors que sa
mitrailleuse s'était enrayée. Lors de l'enterrement de Guynemer, plusieurs
pilotes allemands, dont Udet, iront fleurir sa tombe.
Dans son Hommage à Guynemer,
Lagar personnifie le pilote par l'attribut qui le caractérise le mieux, l'instrument
de ses victoires, son avion. Le peintre est fidèle dans la retranscription du
modèle, un SPAD, dont le gouvernail est paré du drapeau français tandis que la
coque, les ailes et les roues sont ornées de cocardes tricolores. Ces
dernières, ont été, à partir du XXème siècle, utilisées afin d'indiquer la
nationalité des avions militaires. Mais elles sont aussi, un symbole fort de
patriotisme. Celso Lagar, très attaché à la France où il s'est fait de nombreux
amis et a rencontré sa femme, Hortense Bégué tient à apporter son soutien à ce
pays qu'il chérit tant.
L'introduction rédigée par
Gustave Kahn, pour le catalogue de l'exposition Celso Laga peintre, Max
Jimenez, sculpteur tenue à la Galerie Percier à Paris en 1924, donne un
éclairage pour la compréhension de l'Hommage à Guynemer: "L'art de Lagar
est solide et franc, d'une couleur somptueuse et nourrie, d'un dessin ferme et
elliptique. Ce castillan a gardé dans les yeux l'éblouissement du beau soleil
fauve d'outre Pyrénées. Il a le goût des harmonies sobrement rutilantes, des
ciels compacts et pourtant chaudement éclairés en plaques brillantes sur une
nature ordonnée, précise, ardentes, à fermes contours".
Hommage à Guynemer, figure parmi
les chefs-d'oeuvre de Lagar. Le tableau est défini par un mode de construction
similaire à celui du Port de Bilbao, aujourd'hui conservé au musée des
Beaux-Arts de Bilbao. Le peintre agence sa composition selon plusieurs angles
de vues qu'il superpose les uns aux autres.
Ce traitement post-cubiste,
témoigne de l'influence des artistes d'avant-garde qu'il a côtoyés à
Montparnasse à partir de 1916. Sans doute faut-il y voir aussi l'héritage
d'années d'observation du travail de son père, sculpteur sur bois et de sa
propre formation, puisqu'il étudiera la sculpture quelques années avant se
consacrer uniquement à la peinture. En effet, dans le présent tableau, Lagar
semble vouloir retranscrire la tridimensionnalité de son sujet sur la surface
plane. Les formes et leurs contours sont dessinés par des aplats de couleur
vibrante intensifiés par les contrastes qu'ils produisent entre eux.
L'apposition, côte à côte, de tons jaunes et bleus associés à des courbes roses
et vertes décrivent des tourbillons où viennent filtrer les rayons du soleil.
Le peintre a également recours à une vue en contreplongée, qui vient renforcer
l'impression de suspension de l'avion dans les airs. Cet angle de vue place le
spectateur dans le ciel, au-dessus de l'avion. Associé à un cadrage légèrement
décalé vers la gauche, il suggère que l'avion va poursuivre sa course et finir
par sortir hors du cadre. Les inscriptions 'ALSACE' et 'HAUTE SOMME' figurent
le chemin parcouru et viennent amplifier l'effet de mouvement.
Sont présentés les petits catalogues des expositions que Lagar a montées en 1916 et 1918 aux Galeries Laietanes, avec sa compagne Hortense, qui sont essentiels pour savoir ce qu'il a exposé et, par conséquent, ce qu'il peignait pendant cette période en Catalogne. Il y a aussi une carte postale que Lagar a envoyée à son galeriste et marchand Santiago Segura, le promoteur des Laietanes, pour lui souhaiter une bonne année 1918, et qu'il a illustrée à l'aquarelle d'une nature morte très proche de ce que il travaillait à l'époque. Et enfin, on trouve également la peinture à l'huile "Pastorale", l'une des plus remarquables de toutes les pièces qu'il a peintes lors de son séjour en Catalogne.
De ce tableau, cependant, nous savons très peu de choses, car ce titre ne nous permet pas de l'identifier définitivement avec aucune des œuvres figurant dans les catalogues que nous connaissons des expositions de Lagar entre 1915 et 1918. L'œuvre est entrée dans la collection du musée en 1960 en tant que don de Sr. JS Dellal avec la Crane Kalman Gallery à Londres comme intermédiaire. Cela signifie que Lagar a presque certainement emporté le tableau avec lui à Paris lorsqu'il y est retourné en 1919; c'est là que le galeriste anglais Crane Kalman le contactera à la fin des années 1950, et fera un grand effort pour faire connaître son travail, alors presque oublié.
Du point de vue thématique et formel, la peinture est très
proche des œuvres considérées comme les plus « noucentistes » de toutes celles
peintes par Lagar, tant que nous considérons le primitivisme comme une
caractéristique étroitement liée au mouvement , et nous pouvons donc dater
entre 1915 et 1916. On peut le comparer, par exemple, à l'estampe qui figure sur
la couverture du catalogue de l'exposition aux Galeries Dalmauen 1915, où une
figure évoquant Eve offre un fruit à Adam sous le regard attentif d'un chien.
Sur l'estampe, les traits prononcés des personnages sont ouvertement
primitivistes, et en particulier le masque de la femme, avec ses yeux en
amande, renvoie à un élément très caractéristique de l'œuvre de Lagar ; dans le
tableau, les traits sont légèrement atténués.
Comme l'écrivit Max Jacob: "Voici un peintre dans l'âme et dans l'esprit; voici un producteur généreux que ne gênent ni les barrières des différentes écoles modernes ou autres. Il peint ce qu'il aime, il aime ce qu'il peint et il y met l'ardeur d'une compréhension nourrie et sagace. Que de vrais sentiments ! Et qu'on a de plaisir à les reconnaître ! Tout ce qui en Lagar sort comme les fleurs d'un vase: fleurs épineuses, fleurs tristes, fleurs de lumière ! Ah oui! Lagar est un espagnol ! Le folklore de ses ancêtres a la grosse et spleenétique gaîté de Plaute, l'amertume psychologique du cordoban Sénèque, le sens artiste inné des japonais, et le profit multiple des héros russes".
(Max Jacob, catalogue d'exposition Lagar, Galerie Zborowski, Paris, 1928).
PS : Robert Delaunay (1885-1941) rend hommage à Blériot
amusant de voir comment il a fait ! (ne pas confondre avec Sonia, sa femme ! )
En 1914, Robert Delaunay présente la toile « Hommage à Blériot », véritable manifeste de sa méthode simultaniste. (aujourd'hui on parle de "en même temps"). Les mouvements de la toile sont impulsés par des formes empruntés à l'aéronautique : biplan, hélice. L'avion, symbole de l'émancipation de l'homme par rapport à la Terre, offre à Robert Delaunay un prétexte pour s'émanciper des codes de la peinture traditionnelle, et s'avancer vers l'« inobjectif » et la « peinture pure ». Il choisit l'avion car il abolit les notions de distance, et permet au peintre d'aller vers une ubiquité panoramique. Il oppose une plénitude harmonique aux tentatives descriptives du passé. De même, ce motif, comme celui de la tour Eiffel, lui permet de se revendiquer peintre de la modernité. La préférence du peintre pour la courbe est perceptible (contrairement aux peintres abstraits Kasimir Malevitch et Piet Mondrian), déjà affirmée dans la série des Fleurs (1909), et qui se poursuivra dans les Formes circulaires ...
aujourd'hui 26 juillet 2022
la Nature est clémente : it rains !
ainsi les incendies de forêt s'éloignent de nous, et la pelouse grillée va reverdir
la France manque cruellement d'eau
de pétrole, et d'électricité
mais le prix de l'essence baisse :
tout va bien !