La villa romana…les pieds dans l’eau…
Je l’ai trouvée, il suffisait de réfléchir : nous sommes de retour à Altafulla, il faut sortir du village, et comme la voie ferrée forme une barrière devant la mer, il suffit de la traverser. Ensuite, il faut chercher el Munts, une colline de rochers qui va former une crique au bord de la mer. Et comme d’habitude, une fois sur place on tombe pile sur le panneau de l’entrée. Il n’y a personne, miracle c’est ouvert. Second miracle, à Tarragone dont nous dépendons, les majors bénéficient de l’entrée gratuite !
Nous sommes au deuxième siècle, sous le commandement suprême de l’empereur Antonin le Pieux. Un de ses fidèles est Caius Valerius Avitus, qui est marié à Faustina. Ils exercent leurs fonctions à Augustobriga (Muro de Agreda, Soria), et Antonin recherche un second des duumviri de Tarraco, la charge la plus élevée de l’administration locale qui est exercée en binôme. Il nomme Caius co-régent. Au cas où, il a ainsi deux collaborateurs sous la main on ne sait jamais.
Caius préfère habiter la campagne, tant que faire en bord de mer. Il a lu Caton, qui dans le livre I chapitre 1 paragraphe 3 affirme : « Lorsque tu iras acheter une propriété, visite plusieurs fois l’endroit, et regarde bien les alentours. Assure-toi que le climat est bon, que les orages ne sont pas trop fréquents ; le terrain doit être bon et ferme naturellement, au pied d’une colline et orienté au midi, dans un lieu salutaire où il est facile de trouver des ouvriers. Il doit y avoir de l’eau en abondance, et il doit se trouver proche d’une ville prospère, ou bien près de la mer ou d’une rivière navigable ou d’une bonne route passante ».
Cicéron ajoute dans A Quinto, 3, 1-3 que « tu posséderas une villa attrayante si tu y ajoutes une piscine, quelques jets d’eau et une haie bien verte tout autour de la palestre ». Nous nous sommes empressés de suivre ce conseil, et Caius en a fait de même vous pensez bien.
Caius consulte la carte, et trouve à El Munts les conditions réunies. Le climat est mieux que bon il est chaud. Le terrain est propice à la culture des légumes et des arbres fruitiers dont l’olivier courant en Italie. Nous sommes au pied d’une colline orientée au midi. Les ouvriers abondent, ce sont des espagnols avec un taux de chômage record, ils accepteront de travailler en échange de croutons de pain et d’oignons. La ville n’est qu’à douze kilomètres, une demi-heure de char, c’est Terraco. La route c’est la via Augusta, et la mer est à deux pas, facile d’accès puisque les bateaux peuvent échouer sur le sable. La seule condition que je ne comprends pas, c’est l’eau abondante. Il y a bien sur place des thermes. Des latrines. Mais je ne trouve pas trace de source, sauf de réservoirs et citernes, notamment celle qui est couverte d’une ogive, nommée ici « la tartana » car elle ressemble à une charrette paysanne. Le chic pourtant va être de faire chauffer au bois l’eau des thermes. Avant d’aller soit dans le frigidarium sur place constitué d’une piscine semi-circulaire d’eau douce. L’autre chic plus populaire aujourd'hui étant de se rendre à la mer toute proche, pour se plonger dedans comme un frigidarium naturel.
Beaucoup ici ont d’ailleurs adopté ce qui était déjà une habitude romaine, et passent l’été dans la mer sans se rendre compte qu’ils sont dans un frigidarium. La différence étant qu’ils ne sont pas passés auparavant dans le sauna (laconicum-sudatorium qui suit le caldarium) ce que n’auraient jamais fait de vrais romains.
Comme d’habitude, les peintures car il y en avait beaucoup, et les mosaïques ont été déposées pour être exposées au musée de Tarragone. Sur place, on ne voit donc que des fondations, des restes nombreux de canalisations, et les quelques mosaïques toutes simples décorant le cryptoportique, corridor semi-souterrain communiquant avec les salles nobles : salle à manger et salles de réception, et conduisant à l’étage d’où on contemplait la mer.
Pendant une bonne heure, seul, je me serai pris pour Caius. Il y avait du vent et Faustina est restée bouquiner dans la voiture. Je lui montrerai les photos sur mon blog.
De retour, je jure de passer par le sauna de la Villa romana.
Le temps est couvert, pas besoin de frigidarium !
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Caius et Faustina au frigidarium, muséu arquéologic de Tarragona |