Nous sortons du Régent : quatre jours de festival de
cinéma d’art, et de belles surprises, comme le trésor d’Angoulême, au cœur de la capitale mondiale de la BD, dans
une des plus belles cathédrales du sud de la France !
Si déjà la cathédrale Saint-Pierre d’Angoulême interpelle le
visiteur du haut de son rocher et de ses huit cents ans avec sa façade sculptée, son
dôme et son haut clocher roman, son trésor va vous fasciner.
D’abord parce qu’on ne s’attend
pas à une création aussi contemporaine que spirituelle en ce lieu : Jean-Michel
Othoniel, artiste international a voulu qu’en ce début de XXIe siècle on
retrouve un sentiment d’émerveillement tel qu’on pouvait l’éprouver à l’époque
de la construction de l’église au Moyen-Age. Du rêve donc, où vous allez
contempler des objets dorés, des châsses (avec de véritables fémurs) et vous
retrouver vous-même dans une châsse, un reliquaire symbolique...tout cela pour
reconstituer le goût roman des pélerinages d'antan, à la recherche des reliques des martyrs.
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le fémur sur le coussin violet dans le reliquaire en anneaux du centre |
Ensuite parce que l’aménagement
des trois salles est conçu comme une immense et totale œuvre d’art. Unique en
France, il a nécessité huit années de travail, et employé de nombreux artisans.
Forcément des Maîtres verriers. Evidemment à Chartres...jusqu'à ce qu'on se retrouve à Murano où un
autre verrier, vénitien celui-là, confectionne les célèbres boules de verre enfilées en ligne sur leur support, constituant les pieds des châsses. Elles incluent chacune des
feuilles d’or : reflet doré garanti ! Ailleurs on se retrouve dans
une fonderie d’aluminium pour réaliser les grilles composées d’anneaux d’aluminium
fondu. Encore ailleurs un fabricant de papier peint crée avec son immense presse ces tourbillons de chapelets sur les murs, reproduits sur le sol en mosaïque. Des
sculptures au rez-de-chaussée vous accueillent. La seconde salle au premier
étage vous plonge dans le quotidien du prêtre.
Puis vient le temps de la surprise dans la troisième salle : des entrelacs
couvrent les murs et le sol, une douce lumière bleue descend des vitraux
décorés de ces mêmes entrelacs ou de cercles innombrables… assortis au bleu du
manteau de la Vierge Marie.
Ah ça, le film est super clivant :
la Sainte-Vierge ; Jeanne-d’Arc en armure ; Saint Antoine ; Bernadette,
cette apologie de la religion Chrétienne même au cœur d’une Cathédrale nous plonge dans cette question : est-ce bien convenable une telle ostentation en pleine laïcité...? ...et nos amis musulmans…et autres confessions...dans ce décor
assumé ? Rassurons-nous, nous sommes dans un lieu de culte, et personne n’est
obligé d’entrer !...sauf les voleurs, qui ont déjà exercé ici leur sinistre ministère...!
Nul doute que vous (qui assumez
vos racines chrétiennes) ressentirez un sentiment d’émerveillement, dans ce
tourbillon de formes et de couleurs qui mettent en valeur de beaux objets
liturgiques.
Les vitraux sont particulièrement
beaux. Un travail titanesque : ne trouvant pas le bleu précis recherché,
Othoniel a accepté la suggestion du verrier de juxtaposer des teintes
dégradées, de petits morceaux découpés en rond (bonjour la découpe !). La
réalisation a été confiée à l’atelier Loire, basé à Chartres, réputé en la
matière. « L’atelier a été fondé en 1946 par mon grand-père. Aujourd’hui, avec
mon frère, nous sommes la troisième génération », indique Hervé.
Le grand vitrail mesure 6,50 m
de haut et 4 mètres de large. Il est
composé de 30 panneaux indépendants. Certains d’entre eux sont composés de plus
de 500 pièces de verre. Au total, il s’agit d’un puzzle de 10.000 pièces de
verre », explique Hervé Loire. « Les
plombs ont des largeurs différentes pour accentuer l’expression graphique et
ont été étamés pour donner un côté plus brillant », précise-t-il. Au cœur de
certains panneaux, on trouve, également, des « cabochons », des ronds de verre,
et même des demi-sphères « réalisés par un verrier suisse et fournis par le
scénographe », le tout montés en "chef d’œuvre", en trouant le verre sans le
casser, une pratique courante au XVIe siècle ». Moi c’est la première fois que j’en vois. Encore
mieux que les cives de nos amis Catalans à Barcelone ! (tiens que devient
leur belge ex-Président ?)
Jean-Michel Othoniel est
un créateur de renommée internationale. Il façonne avec ses perles de verre un
monde enchanté où le merveilleux aide à s’abstraire des difficultés de la vie.
Il est connu du grand public pour avoir habillé de verre de Murano la bouche de
métro du Palais-Royal. Sa bibliographie sur wiki est impressionnante et je vous
laisse vous y rendre.
A un moment, Jean-Michel (nous
sommes à la fin du film) conclut : -"il y aura désormais deux sortes de gens
sur terre : ceux qui auront vu le trésor d’Angoulême (gagnés par la grâce
dégagée par l’Art sacré)…et les autres" !
grâce au Régent,
nous faisons partie des heureux élus :
un moment d’enchantement !
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le kiosque des noctambules au Palais Royal déjà les mêmes matériaux
la tentation de Venise ! |