mardi 1 octobre 2019

Adieu Jacques Chirac


Il existe un héritage culturel partagé par les Européens, fruit d’une histoire commune. En effet, la majorité des pays d’Europe ont partagé plusieurs expériences, celles que nous vivons toujours lors de nos voyages : la civilisation grecque ; l’Empire romain et la mise en place d’un droit écrit ; le christianisme comme facteur structurant de l’Europe du Moyen Âge ; la naissance des universités à partir du XIIe siècle, avec une forte mobilité dans toute l’Europe des enseignants et des étudiants, poursuivie par Erasmus ; l’humanisme et le mouvement de la Renaissance ; la philosophie des Lumières, porteuse de progrès démocratiques et d’un idéal de liberté individuelle ; la révolution industrielle avec le développement du capitalisme et de la protection sociale ; les deux conflits mondiaux du XXe siècle qui ont accru l’exigence d’une paix durable, tandis que des siècles de guerres avaient déjà fait naître l’idée d’une unification européenne ; au-delà des guerres, l’expérience de la violence contre les populations civiles, avec  l’Inquisition, les pogroms, les guerres de religion, le tout culminant avec l’Holocauste, ce qui a fait dire à Stéphane Hessel, ancien résistant déporté : “L’Europe est née à Buchenwald”.

Le livre de Jean-Marie Vernier « l’Héritage européen » synthétise la culture européenne et ses trois sources : Athènes, Rome, et Jérusalem avec le Judaïsme antique, puis la chrétienté. Si la population a manifesté son amour pour l'ancien Président, c'est qu'il représentait tout cela, et bien plus encore grâce à "l'héritage des autres cultures du monde".

Je viens de suivre à la télévision la cérémonie religieuse à Saint-Sulpice, remplaçant Notre Dame : étonnante cérémonie catholique, consacrée à celui qui -pour des raisons d’universalité des religions- n’avait pas jugé opportun en 2004 de mentionner les racines chrétiennes de l'Europe dans le préambule de la constitution européenne- ; messe avec communion, sous la conduite de l’Archevêque de Paris Michel Aupetit, ancien médecin, ouvrant la messe en célébrant le rite de la lumière :



Le cierge pascal est allumé au pied du cercueil. Il symbolise la présence du Christ mort et ressuscité, « le Christ, hier et aujourd’hui, commencement et fin de toutes choses, Alpha et Omega » que je vous montre dans les Chrismes sur le fronton des églises romanes.

Revient doucement en mémoire, comme un murmure, cette promesse faite le jour du baptême :

« Vous êtes devenu lumière dans le Christ, marchez toujours comme un enfant de lumière ; demeurez fidèle à la foi de votre baptême. Alors quand le Seigneur viendra, vous pourrez aller à sa rencontre dans son Royaume, avec tous les saints ».

Nos racines sont bien chrétiennes pourtant, et la République -en toute laïcité- a bien rendu hommage à Saint-Sulpice à l'ancien Président de la République, dans la communion de nombre de dirigeants du monde, dont le Président Poutine, qui est Orthodoxe, et se fait expliquer par sa collaboratrice ce qui se passe. Monseigneur Aupetit conclut son homélie par ces paroles : -"Adieu Jacques Chirac" !




J'ai une anecdote : je me trouve responsable de l’antenne d’Arles du département des Bouches du Rhône en mars 1976. La circonscription d’Arles englobe la commune des Baux de Provence, lieu célèbre, dont le Maire est le célèbre créateur de l’Oustau  de Baumanière, Raymond Thuilier, assureur devenu à 51 ans Chef étoilé réputé. Début 1976, nous sommes cinq ans avant les lois de décentralisation de 1981, et le financement des Collectivités locales dépend encore de l’Etat, et ceux dépendant du Département se font encore sur propositions du Directeur départemental de l’Agriculture de Marseille, Antoine Blanc qui a fortement appuyé ma candidature à Arles, petite Rome des Gaules. Le Premier Ministre Jacques Chirac est un ami personnel de Raymond Thuilier, et atterrit périodiquement en hélicoptère, pour venir dîner d’un loup farci en croûte, magnifique spécialité du Patron. Naturellement lors d’une de ces rencontres, le Maire demande à son ami comment il pourrait bénéficier du maximum de subventions possibles, pour faire refaire l'électricité de son village. Mais il ignore le détail des opérations. C’est comme cela que le Génie Rural de l’époque reçoit un jour l’appel téléphonique du Premier Ministre, en personne : -« le Maire des Baux de Provence me dit souhaiter l’aide maximum de l’Etat pour l’enterrement des lignes électriques des Baux, combien lui faut-il » ? L’opération était compliquée car en refaisant l’électricité, il fallait refaire la voirie, le montant était élevé. J’ai donc rappelé Matignon, on m’a passé le Premier Ministre, et j’ai pu lui donner le chiffre sollicité avec les commentaires nécessaires pour justifier un taux maximum.







j'ai retrouvé 37 ans après mon exemplaire dédicacé des recettes  !

Une enveloppe spéciale a été attribuée très rapidement à la commune. Le Génie Rural était chargé de conduire le projet. Qui dit réunions de chantier (hebdomadaires) dit compte-rendu des opérations au Maire… compte-rendus suivis à midi par un repas à la cantine ...quelle cantine... l’Oustau de Baumanière…. !

J’ai pu ainsi dans les années 1976-1977 déjeuner souvent de loup farci en croûte, et y convier -à mes frais- des très proches pour des repas exceptionnels ! J'y ai connu celui qui était le petit-fils de Raymond : Jean-André Charial, qui a trois ans de moins que moi.

L’ombre du Premier Ministre planait toujours autour de nous !

il n’aimait pas que la tête de veau et la bonne bière ...

... il aimait aussi le fameux loup farci en croûte...

... et les vins de la vallée des Baux


un miracle : cette facture a 40 ans ! on mangeait à quatre pour 1096 Francs...156 Euros d'aujourd'hui, un repas gastronomique ! ! 

Schubert nous emmène au-delà des contingences de ce monde terrestre



la musique met de l'ordre dans nos peines