dimanche 28 janvier 2018

Le trésor d'Angoulême au Régent

Nous sortons du  Régent : quatre jours de festival de cinéma d’art, et de belles surprises, comme le trésor d’Angoulême,  au cœur de la capitale mondiale de la BD, dans une des plus belles cathédrales du sud de la France !



Si déjà la cathédrale Saint-Pierre d’Angoulême interpelle le visiteur du haut de son rocher et de ses huit cents ans avec sa façade sculptée, son dôme et son haut clocher roman, son trésor va vous fasciner.



D’abord parce qu’on ne s’attend pas à une création aussi contemporaine que spirituelle en ce lieu : Jean-Michel Othoniel, artiste international a voulu qu’en ce début de XXIe siècle on retrouve un sentiment d’émerveillement tel qu’on pouvait l’éprouver à l’époque de la construction de l’église au Moyen-Age. Du rêve donc, où vous allez contempler des objets dorés, des châsses (avec de véritables fémurs) et vous retrouver vous-même dans une châsse, un reliquaire symbolique...tout cela pour reconstituer le goût roman des pélerinages d'antan, à la recherche des reliques des martyrs.

le fémur sur le coussin violet dans le reliquaire en anneaux du centre

Ensuite parce que l’aménagement des trois salles est conçu comme une immense et totale œuvre d’art. Unique en France, il a nécessité huit années de travail, et employé de nombreux artisans. Forcément des Maîtres verriers. Evidemment à Chartres...jusqu'à ce qu'on se retrouve à Murano où un autre verrier, vénitien celui-là, confectionne les célèbres boules de verre enfilées en ligne sur leur support, constituant les pieds des châsses. Elles incluent chacune des feuilles d’or : reflet doré garanti ! Ailleurs on se retrouve dans une fonderie d’aluminium pour réaliser les grilles composées d’anneaux d’aluminium fondu. Encore ailleurs un fabricant de papier peint crée avec son immense presse ces tourbillons de chapelets sur les murs, reproduits sur le sol en mosaïque. Des sculptures au rez-de-chaussée vous accueillent. La seconde salle au premier étage vous plonge dans le quotidien du prêtre. Puis vient le temps de la surprise dans la troisième salle : des entrelacs couvrent les murs et le sol, une douce lumière bleue descend des vitraux décorés de ces mêmes entrelacs ou de cercles innombrables… assortis au bleu du manteau de la Vierge Marie.





Ah ça, le film est super clivant : la Sainte-Vierge ; Jeanne-d’Arc en armure ; Saint Antoine ; Bernadette, cette apologie de la religion Chrétienne même au cœur d’une Cathédrale nous plonge dans cette question : est-ce bien convenable une telle ostentation en pleine laïcité...? ...et nos amis musulmans…et autres confessions...dans ce décor assumé ? Rassurons-nous, nous sommes dans un lieu de culte, et personne n’est obligé d’entrer !...sauf les voleurs, qui ont déjà exercé ici leur sinistre ministère...!

Nul doute que vous (qui assumez vos racines chrétiennes) ressentirez un sentiment d’émerveillement, dans ce tourbillon de formes et de couleurs qui mettent en valeur de beaux objets liturgiques.





Les vitraux sont particulièrement beaux. Un travail titanesque : ne trouvant pas le bleu précis recherché, Othoniel a accepté la suggestion du verrier de juxtaposer des teintes dégradées, de petits morceaux découpés en rond (bonjour la découpe !). La réalisation a été confiée à l’atelier Loire, basé à Chartres, réputé en la matière. « L’atelier a été fondé en 1946 par mon grand-père. Aujourd’hui, avec mon frère, nous sommes la troisième génération », indique Hervé.


Le grand vitrail mesure 6,50 m de haut et 4 mètres de large. Il  est composé de 30 panneaux indépendants. Certains d’entre eux sont composés de plus de 500 pièces de verre. Au total, il s’agit d’un puzzle de 10.000 pièces de verre  », explique Hervé Loire. « Les plombs ont des largeurs différentes pour accentuer l’expression graphique et ont été étamés pour donner un côté plus brillant », précise-t-il. Au cœur de certains panneaux, on trouve, également, des « cabochons », des ronds de verre, et même des demi-sphères « réalisés par un verrier suisse et fournis par le scénographe », le tout montés en "chef d’œuvre", en trouant le verre sans le casser, une pratique courante au XVIe siècle ».  Moi c’est la première fois que j’en vois. Encore mieux que les cives de nos amis Catalans à Barcelone ! (tiens que devient leur belge ex-Président ?)



















Jean-Michel Othoniel est un créateur de renommée internationale. Il façonne avec ses perles de verre un monde enchanté où le merveilleux aide à s’abstraire des difficultés de la vie. Il est connu du grand public pour avoir habillé de verre de Murano la bouche de métro du Palais-Royal. Sa bibliographie sur wiki est impressionnante et je vous laisse vous y rendre.

A un moment, Jean-Michel (nous sommes à la fin du film) conclut : -"il y aura désormais deux sortes de gens sur terre : ceux qui auront vu le trésor d’Angoulême (gagnés par la grâce dégagée par l’Art sacré)…et les autres" !

grâce au Régent,

nous faisons partie des heureux élus :


un moment d’enchantement !




le kiosque des noctambules au Palais Royal
déjà les mêmes matériaux

la tentation de Venise !