en conférence avec le Secrétaire Général de la SEC |
La première conférence de
mercredi de la SEC (Société d’Etudes du Comminges). La salle est pleine. Robert
Pujol le conférencier est connu de tous : docteur en pharmacie, ancien pharmacien
de Saint-Béat, herboriste, militant défenseur de la biodiversité (1), il
connait les plantes comme personne. Nous sommes convaincus dans la salle de l’exception
que constituent les Pyrénées Centrales : l’une des plus belles flores ... du
monde ! 400 plantes connues propres à soigner les maladies ! Non
seulement il connait les plantes médicinales, mais il, a pratiqué dans son
officine « des formules », comme il les appelle, données par des
bergers, obligés de trouver dans les estives de quoi se dépanner ; et des grand-mères dépositaires de remèdes traditionnels. Des plantes utilisées
depuis l’antiquité grecque, romaine, arabe, citées dans l’ancien Testament pour
soigner humains et animaux.
Il écrit des articles, enseigne, et transmet une
somme impressionnante de connaissances oubliées : on dit souvent qu’un
conférencier n’expose, même en deux heures de temps que le dixième de ses
connaissances : Robert Pujol debout devant l’assemblée attentive
improvise, balançant à l’improviste une note d’humour : La salle rit ! Heureusement je retrouve une feuille vierge dans mon sac, et puis prendre des
notes, attitude fortement conseillée par le professeur pour noter ses fameuses formules : exemple, l’Ecclesiaste
explique que Dieu en créant le monde a donné à certaines plantes la forme d’un
organe humain, pour nous inciter à l’utiliser afin de soigner l’organe en
question : tenez le haricot, qui ressemble à un rein ! Surtout le cerneau
de la noix ressemble à un cerveau : -« consommer de la ligueur de noix vous rendra intelligent » : Robert avoue qu’il
en a consommé toute son enfance, « mais
que le résultat n’est pas à la hauteur de l’espérance qu’y avaient mise ses
parents » !
Dès le début, je suis à mon aise
avec la fameuse coupe Nord-Sud, présentant les étages de végétation en
fonction de l’altitude, qui m’ont guidé dans le repérage de la « ruta de
las mariposas ». (2) Même si l’étage alpin disparait avec le réchauffement
climatique, les plantes s’étagent toujours précisément du bas vers le haut et
réciproquement, et le conférencier nous fait faire l’escalade assis dans nos
fauteuils sans effort physique, (même si la salle n’a pas été chauffée et qu’il
ne fait pas si chaud…mais la chaleur humaine comble cette économie après tout
justifiée puisque la SEC produit toujours des conférences gratuites) !
Nous sommes habitués à consommer
des médicaments en boite, des formules chimiques, ayant oublié que nombre de plantes contiennent les principes
actifs aussi précieux que ceux qui participent aux soins contre le cancer,
comme l’if : non seulement il servait à construire des arcs, mais il contient
des taxols anti-cancer du sein. N’oublions pas non plus le saule blanc, salix alba (je pense aux petits mars à
reflets changeants dont les chenilles adorent les feuilles argentées de salix viminalis) qui
contient de l’acide salicylique, autrement dit l’aspirine !
On a oublié que l’écorce de hêtre
distillée produit de la créosote, qui servait autrefois à alimenter les boules
de verre placées dans les boites à papillons pour éloigner les prédateurs, de
même que le charbon de hêtre est détoxifiant, ou que les faînes que je
récoltais en Normandie tout jeune grillées servent maintenant d’apéritif de luxe dans les
restaurants étoilés.
Le sapin, les résineux en
général, sont à l’origine d’huiles essentielles antiseptiques : les
bourgeons mélangés à des feuilles d’eucalyptus étaient disposés par les instituteurs dans les classes
primaires autrefois pour créer une atmosphère purifiée. Sans
oublier la térébentine de Strasbourg, à ne pas confondre avec celle de
Bordeaux fabriquée à partir de pin des Landes. Autrefois à Boutx les mamans
récoltaient les gouttes de résine (comparées à des vessies), qu’elles allaient « crever », pour en
faire des emplâtres.
On oublie trop l’Aspérule
odorante, la reine des bois. Et la
recette du 22 mai : 60g de fleurs dans un litre de vin sucré de 80g de
sucre ! Quant à la myrtille, elle contient des pigments antho carpiques
permettant de fabriquer les collyres destinés à activer les veinules des yeux
malades.
Tout le monde connait l’arnica !
Le principe des crèmes contre les coups ! Figurez vous que la cosmétique s’y
intéresse tellement qu’elle en consomme 50.000 tonnes par an ! Or les
massifs des Alpes par exemple sont complètement dépouillés… jusqu’à ce que les
récolteurs mercenaires payés par les firmes débarquent dans les Pyrénées, et ... arrachent tout… contre quelques
billets remis aux Maires dont la seule réaction est : -« pas grave,
les animaux n’en consomment pas » ! Pourtant il existe des variétés
cultivées contenant les mêmes principes. Mais avec la disparition des espèces,
tout ce qui est sauvage est vendeur… sauf à faire disparaître les dernières plantes sauvages !
Nos plantes médicinales sont en danger !
La digitale ? Personne n’oserait
en faire un remède : trois feuilles ingérées suffisent à tuer un humain !
Pourtant, à la dose idoine (mieux vaut confier la préparation à un pharmacien
expérimenté), dans les plantes, c’est la dose qui compte, et la « marge
thérapeutique » à l’intérieur de laquelle il faut rester. Robert Pujol l’appelle
« l’herbe aux héritiers » : en en donnant à la personne dont on
souhaite hâter la fin de vie, (sans laisser la moindre trace), on obtient (sans
douleur) un ralentissement du rythme cardiaque, conduisant à l'arrêt final (du coeur) ...! Aucun rapport avec l’aconit,
beaucoup plus radical, et donc...déconseillé !
La gentiane est à la base du
principe amer bien connu dans la Suze, que commencent à découvrir nos amis
américains : parfait pour les convalescents, surtout en ajoutant un zeste d’absinthe :
on obtient le "quinquina du pauvre" ! le secret ? ajouter de l’écorce d’orange
pour enlever l’amertume : 4g de racine sèche + 4g d’orange ; de l’écorce
de citron, et voilà une infusion parfaite pour lutter contre la grippe car on a
alors un excellent fébrifuge : indispensable à consommer dès à présent, puisque l'épidémie s'affirme forte ici en Occitanie ! ! .
On a envie d’aller à
Saint-Béat se faire prescrire des tisanes, non ?
Surtout ne pas confondre avec la
Verâtre aux feuilles alternées au lieu d’être opposées ! Si on confond :
des étourdissements au bout d’une heure ! Comme la mort intervient trois heures après l'ingestion, on n’a plus que deux heures pour se
faire soigner dans un centre anti-poisons : prendre l’apéritif chez des
pseudo-montagnards mauvais herboristes est strictement déconseillé !
feuilles opposées de la gentiane : ne pas confondre avec la Vérâtre ! |
Sont passées en revue les plantes
des étages supérieurs, puisque la conférence continue de nous faire monter en altitude :
oseille, attention au poison rénal causé par les oxalates ! Sermontain,
contre les diarrhées des bergers. Sarriette…oui, une herbe méditerranéenne
célèbre pour remplacer la corne de rhinocéros ... introuvable dans les Pyrénées !
C’est l’herbe aux satyres ! Le bouleau, contre les calculs urinaires :
une branche permet de récolter deux litres de sève, vous ajoutez quelques
clous de girofle, excellent rhumatismal !
Robert termine (à regret) par l’edelweiss.
En danger ! Il serait considéré comme anti-vieillissement… vous pensez si
là encore les récolteurs arrachent les derniers pieds !
Nadau l’a chanté dans
une chanson célèbre : c'est en Occitan l’immortella :
Une bien belle
conférence
Robert Pujol évoque
Gaia la Terre
notre mère la Terre ...
... mieux que la terre
nourricière
Respectons la, comme
la respectaient nos anciens des Pyrénées qui ne cueillaient les plantes
qu’avec circonspection, en
respectant les rites anciens, le prélèvement en silence, les fêtes des Saints...
un super conférencier
PS (1) cela tombe bien : le Monde attire notre attention sur la baisse spectaculaire de la biodiversité en France, y compris dans les vastes étendues maritimes d'Outre-mer : c'est bien mal parti...: cela vaut pour les oiseaux ; les petits mammifères... mais aussi pour les papillons...les plantes médicinales...et les plantes sauvages elles-mêmes ! !
La " richesse" est certes dépendante du pouvoir d'achat. La richesse est aussi la diversité de la Nature. Cette richesse là est aussi compromise que la première. Je crains que le Grand débat ne fasse même pas allusion à cette question...?
PS (2) la ruta de las mariposas
Les conférences de la Société d'Etudes du Comminges ont lieu tous les premiers mercredi du mois, à 17H30. Elles sont gratuites, et participent activement à l'identité des habitants des Pyrénées centrales...surprenantes Pyrénées Centrales.... à suivre !
depuis 1884