Vincent Van Gogh bien sûr !
bouleversant :
allez voir le film !
Dans une longue lettre Vincent
dit : "Je n’ai pas d’enfants, et je
ne pense pas que j’aie la moindre chance de me marier et d’en avoir un jour,
mais d’une certaine manière, mes peintures sont ma progéniture."
la bande annonce :
allez voir le film !
La période arlésienne est
terminée, et n’est évoquée que par quelques flash-back. Nous sommes à Paris, été
1891, Armand Roulin, veste jaune, est le personnage central. Il est chargé par
son père, le facteur Joseph Roulin, barbe brune fournie, entrecoupée de traits
de peinture bleue, de remettre en mains propres une lettre à Théo, le frère de
Vincent. En effet, la nouvelle du suicide du peintre vient de tomber.
Armand, peu enchanté par l’amitié entre son père et l’artiste, n’est pas
franchement ravi par sa mission.
À Paris, le frère de Van Gogh est introuvable.
Le jeune homme apprend alors par Père Tanguy, le marchand de couleurs du
peintre, que Théo, visiblement anéanti par la disparition de son frère aîné, ne
lui a survécu que quelques mois. Double drame ! Comprenant qu’il a sans
doute mal jugé Vincent, Armand, peu sympathique au début du film, s’intéresse
pour une fois à la vie d’un autre et devient le personnage principal : il
se rend à Auvers-sur-Oise, où le peintre a passé ses derniers mois, pour
essayer de comprendre son geste désespéré. Et se livre à une véritable enquête
policière : il interroge ceux qui ont connu l’artiste, en vivant dans les
lieux fréquentés par Vincent, l’auberge Ravoux, sa chambre, les champs de blé
voisins….et les fameux corbeaux qui s’envolent comme en vrai en coassant, son dernier tableau !
il a du en vendre, des couleurs ! |
Adeline Ravoux |
Un vrai thriller : Van-Gogh
allait mieux après la déprime qui l’avait mené deux ans auparavant à se couper l’oreille. Il
peignait à un rythme toujours aussi forcené. Beaucoup le connaissaient bien et
savent en parler à Armand avec sensibilité, comme le batelier qui a été témoin
d’une ballade sur l’eau avec Marie. On découvre des femmes, la serveuse Adeline….et Marie, la
fille du docteur Gachet.
Après son roman-monde sur le Che
(« La Vie rêvée d'Ernesto G. "), Jean-Michel Guenassia avec son livre « la valse des arbres et du ciel »
nous ramène lui aussi à Auvers-sur-Oise, dans la maison du docteur Gachet, pour
réécrire l'histoire de la fin tragique
de Van Gogh.
Le titre : « la valse des arbres et du ciel»
est bien vu : quand on contemple un tableau de Vincent, on est saisi les
premières fois par les tourbillons de couleurs qui marquent le ciel, la nuit
étoilée, les champs : nous sommes devant un instantané, mais la peinture
bouge déjà, alors qu’elle est immobile.
Mais quand le film fait vraiment rouler le train au fond du paysage. Ou fait se mouvoir les personnages, briller les
étoiles, étinceler les lampes à pétrole sur les tables de la guinguette dont les
personnages parlent vraiment…la valse
est complète, et le choc énorme : la peinture bouge comme en réalité, et
nous rentrons dans une histoire vraie, une histoire peinte. Il faut dire que premier
long métrage d'animation entièrement peint à la main, encensé au dernier
festival d'Annecy, « Loving Vincent »
autrement dit "La Passion Van
Gogh" en Français tient du miracle visuel. Chapeau à Dorota Kobiela,
de Hugh Welchman et de leur équipe, pour leur film réalisé en Pologne.
époustouflant !
« La Valse des arbres et du ciel
" n'est pas une simple uchronie. (Je trouve ce mot peu usité dans un commentaire savant, voilà ce qu’il signifie :
selon l'inventeur du terme, Charles Renouvier, l'auteur d'une uchronie écrit l'histoire, non telle
qu'elle fut, mais telle qu'elle aurait pu être, à ce qu'il croit). Dans une
brève postface, Guénassia précise qu'il s'est inspiré des découvertes plus ou
moins récentes sur la vie du peintre pour bâtir son intrigue : les doutes
sérieux sur son suicide (évoqués dès le début du XXe siècle par un autre
docteur), sa possible love story avec Marie Gachet, la fille du médecin, et le
don fait par cette dernière et son frère Paul de faux Cézanne et de faux Van
Gogh peints par son père (conservés au musée d'Orsay). Une belle matière pour une oeuvre romantique
ou un polar historique !
Impossible qu'un droitier se tire une balle de bas en haut côté gauche du ventre ? |
Jean-Michel Guenassia conjugue un
peu les deux dans son roman documenté qui se lit comme un thriller. L'héroïne
et narratrice est Marie Gachet, jeune fille en mal de liberté, qui veut devenir
peintre et rêve de partir en Amérique pour quitter son père qui la méprise et
l'étouffe. L'écrivain fait un sort au fameux docteur qui, sous sa plume, n'est
plus le sympathique mentor des impressionnistes, mais un homme intéressé et
brutal. Marie tombe vite amoureuse de Van Gogh, mais son coup de foudre est
d'abord pour la toile que l'artiste peint dans un champ de blé. La tendresse
pour l'homme vient après. Van Gogh est le symbole du génie sans entrave, la
promesse d'une vie d'artiste libre. La fusion intellectuelle avec cet homme deux
fois plus âgé qu'elle est totale. Mais lui, l'aime-t-il ? Sa vraie maîtresse
reste la peinture.
le champ de blé aux corbeaux, le dernier tableau |
Quand il découvre leur liaison, le
docteur Gachet entre dans une rage folle - le compte à rebours tragique est
commencé. A travers son roman noir, Guenassia met en relief le rude combat des
femmes pour exister dans une France de la fin du XIXe, paternaliste et
petit-bourgeoise. En entrecoupant le récit de Marie de coupures de presse, il
nous montre l'état d'esprit étriqué de la Troisième République triomphante.
Ecrit dans un style classique, « La
Valse des arbres et du ciel » s'anime quand l'écrivain évoque la palette de Van
Gogh. L'histoire d'amour de Marie et Vincent est d'abord une histoire d'amour
de l'art.
Marie ne se mariera jamais après
la mort de Vincent, et conservera accroché dans sa chambre durant le reste de sa
vie le tableau la représentant dans le jardin familial.
J’ai autrement mieux vu la peinture de Van Gogh,
j’ai vu sa vie
un éblouissement !
PS : quelques billets précédents :