J'avoue avoir du mal à localiser l'endroit : nous sommes en Israël, et pour une fois googlemap me fait faux bond : d'après les photos, nous sommes sur un site en pleine montagne sèche, le parc national de Sussita :
... et que font les archéologues ... des deux sexes naturellement : ils commencent à jouer avec leur drone DJI (comme je les comprends !). Puis ils fouillent, déblaient les déblais, comme s'il s'agissait de Notre Dame, et re-photographient .... Et quand ils trouvent, dans une église brûlée, dont les cendres ont préservé, les mosaïques du sol, ils font une réunion, et un plan opérationnel. Les mecs décident, et les dames font le ménage, en lavant les mosaïques. Les mecs re-prennent des photos, et crânent : ils ont trouvé l'illustration du miracle de la multiplication des pains !
Tout ce que j'invente (en souriant de contentement) se révèle vrai :
de loin les inscriptions en mauvais Grec |
Jessica Rentz en plein nettoyage |
Yana Vitkalov |
Je redeviens sérieux : je cite l'article qui a attiré mon attention, sur les journaux israéliens : "Un sol de mosaïques d’environ 1.500 ans retrouvé dans une église à Hippos (nord d'Israël) représente
apparemment le miracle de la multiplication par Jésus des cinq pains et des
deux poissons décrit dans l'Evangile".
A Antiocha-Hippos (Sussita),
ancienne ville de la Décapole sur la rive orientale du lac de Tibériade en
Galilée, un tapis – très dense – de mosaïques colorées, a été mis au jour. La
découverte a eu lieu cet été 2019, fait savoir ce 4 septembre 2019 un communiqué de
l’Université de Haïfa (Israël) dont les chercheurs ont réalisé des fouilles
dans l’une des sept églises connues sur le site.
L’église en question, dite «
brûlée », a été construite entre la seconde moitié du Ve siècle et le début du
VIe siècle. L’édifice aurait été détruit lors d’un incendie probablement durant
l’invasion par les Sassanides (dynastie perse) au début du VIIe siècle, selon
les chercheurs, et la toiture se serait alors effondrée. D’après le communiqué,
le sol de mosaïques figuratives doit son salut à une couche de cendre qui l’a protégée
des siècles durant (des effets du temps, de la pluie et du soleil ou
d’éventuels pillages comme on peut le supposer), jusqu’à ce qu’une équipe
d’archéologues du projet de fouilles Hippos-Sussita effectuées dans le parc
national Sussita géré par l’Autorité de la Nature et des Parcs d’Israël, la
révèle au grand jour. Et ce, sous la houlette de l’américaine Jessica Rentz,
responsable de la gestion d’une zone de fouilles pour sa toute première saison.... jusqu'à ce qu'elle voie la boucle du lion dans les cendres ...
Jessica Rentz a trouvé le lion ouvrant la porte d'entrée |
Dans les semaines qui ont suivi
sa découverte, la plus grande partie du tapis de mosaïque (10×15 mètres) de «
l’église brûlée » a été nettoyée et conservée par Yana Vitkalov de l’Autorité
des antiquités israéliennes. Composent ce tapis de tesselles aux motifs
géométriques, oiseaux, paon, poissons dodus, citrons, grenades (symbole chez
les chrétiens de la résurrection et de la vie éternelle), corbeilles de pains
dont « les couleurs peuvent refléter différents types de farine, de blé et
d’orge », a expliqué dans les colonnes du journal Haaretz, Michael Eisenberg, chef
de l’équipe de fouilles à Hippos pour le compte de l’Institut d’archéologie de
l’Université de Haïfa.
Michael Eisenberg en pleine conférence |
Dans l’église, les mosaïques ont
la particularité de représenter dans l’abside deux poissons, et dans la nef
deux séries de trois poissons ainsi que douze corbeilles à cinq pains rappelant
les douze paniers avec lesquels sont restés les douze apôtres à l’issue du
repas d’une foule d’environ 5 000 personnes (sans compter femmes et enfants)
que Jésus avait nourrie en multipliant miraculeusement cinq pains et deux
poissons, selon l’Evangile de saint Matthieu (14, 21). Une telle iconographie
et l’emplacement de l’église surplombant le lac de Tibériade « établissent
immédiatement le lien » avec le miracle de Jésus, indique le communiqué de
l’Université de Haïfa. « Il peut certes y avoir différentes explications aux
descriptions des pains et des poissons dans la mosaïque, mais vous ne pouvez
pas ignorer la similitude avec la description du Nouveau Testament », confie
l’archéologue Michael Eisenberg.
des poissons
et cinq pains dans leur corbeille :
Hippos ou Tabgha ?
Bien que l’emplacement de la
multiplication des cinq pains et des deux poissons ne soit pas clairement
précisé dans les Evangiles, la tradition veut que ce soit le site de Tabgha,
sur la rive occidentale du lac de Tibériade, près de Capharnaüm, qui soit
reconnu comme le lieu du miracle. Le sanctuaire est élevé sur les vestiges
d’une église du IVe siècle et d’une basilique du Ve siècle et abrite une
célèbre mosaïque du Ve siècle retrouvée in situ qui représente deux poissons et
un panier rempli de quatre pains.
quatre pains il en manque un |
ça me fait toujours quelque chose d'entendre Jésus parler Anglais, un peu comme si c'était Macron à Davos, vous non ? |
Michael Eisenberg qui veut rester prudent quant à l’interprétation de la nouvelle mosaïque, précise bien le communiqué, fait toutefois remarquer que « si on lit attentivement le Nouveau Testament, il est évident que [le miracle] aurait pu se dérouler au nord d’Hippos, dans les environs de la ville ». Il est en effet écrit dans l’Evangile de saint Jean (6, 17) qu’après son miracle, Jésus est resté prier dans la montagne et les disciples, quant à eux, se sont rendus de l’autre côté de la mer de Galilée, en direction de Capharnaüm. Une version qui plaiderait donc plutôt en faveur d’une localisation du miracle à Hippos.
les colombes ne sont pas contre un verre de vin (in vino veritas) |
Un autre argument jouerait en
faveur d’Hippos, indique le communiqué. Car, à Tabgha, si la mosaïque
représente bien deux poissons, la corbeille ne contient que quatre pains alors
que les quatre Evangiles qui mentionnent tous le miracle, font précisément état
de cinq pains. Ce qui est le cas dans la mosaïque d’Hippos qui, en sus, fait
figurer les douze fameux paniers de la fin du repas. Et il y a bien dans la
mosaïque de l’abside de l’église brûlée deux poissons… mais géographiquement
décorrélés des paniers représentés sur la grande mosaïque de la nef.
A l’inverse, à Tabgha, la
corbeille de pains est clairement entourée de deux poissons, évoquant ainsi de
manière éloquente le miracle. De plus, Michael Eisenberg n’élude pas
l’existence de « différences entre la représentation de la mosaïque de l’église
brûlée et la description dans le Nouveau Testament ». Il note notamment que les
paniers ne sont pas tous remplis de pains. Certains portent des fruits. Le
chercheur fait aussi remarquer que lesdits paniers sont entourés de deux trios
de poissons au lieu de seulement deux poissons, mentionnés dans les Ecritures.
elles se tapent un gros lombric ? |
En définitive, il n’y a pour
l’heure aucun moyen, aucune inscription contextuelle qui permette de vérifier
si l’intention de la conception par les auteurs de la mosaïque, était de
revendiquer Hippos comme étant le lieu où le miracle s’est produit, ou tout
simplement d’en faire une simple évocation étant donné la proximité
géographique avec le lac de Tibériade. « Nous terminerons l’excavation et le
nettoyage des 20% restants de la mosaïque et examinerons cette [dernière]
hypothèse avec soin. Les poissons eux-mêmes ont un certain nombre de
significations symboliques supplémentaires dans le monde chrétien, et leur
interprétation requiert de la prudence », a résumé Michael Eisenberg.
Les fouilles de « l’église brûlée
» à Hippos-Sussita ont également révélé deux inscriptions en grec, assez mal
orthographiées et avec des fautes de grammaire, comme l’a rapporté Haaretz. Ce
qui laisse supposer que les habitants ne parlaient pas couramment le grec à
l’époque byzantine. La langue aurait été gardée seulement pour la liturgie. Le
premier texte évoque deux prêtres de l’église, Theodoros et Petros, qui firent
construire un martyrium, sanctuaire à la mémoire d’un martyr généralement bâti
autour d’une relique centrale. Le second texte, situé à l’intérieur d’un
médaillon de mosaïque à l’entrée de la nef, dévoile le nom du martyr, un
certain Theodoros.
certain(e)s passent des vacances archéologiques là-bas !
any plans for this summer ?