dimanche 3 juillet 2016

Natura 2000 à Sauveterre (1)

...Sauveterre en Comminges...

...un (minuscule) paradis préservé

Nos amis catalans cohabitent avec des papillons remarquables : je vous ai expliqué leur secret, il est géographique : ils sont situés au Sud, leur climat est méditerranéen : on dit "soulane", ou adret. Nous sommes au Nord, climat océanique : on dit "ombrée" ou ubac. Dans chaque cas, la végétation est adaptée, et une faune spécifique l’a colonisée depuis des temps immémoriaux. Quand les pratiques agricoles n’ont pas nui aux biotopes, des colonies parfois minuscules de survivants subsistent. La limite de leur persistance dans le temps tient uniquement à la quantité minimale de mâles susceptibles de féconder les femelles, qui juste ensuite pondront en quantité suffisante sur la plante nourricière des chenilles. Ceci uniquement dans la mesure où la plante en question existe ; et poursuit son cycle naturel pendant la durée de vie des chenilles. Le moins, s’il s’agit d’une prairie humide, est qu’elle ne soit pas asséchée, ni fauchée mal à propos.













Le petit miracle des mesures prises dans le cadre de Natura 2000 est d’avoir identifié les biotopes en question. Ils concernent des oiseaux ; de petits mammifères rigolos comme le Desman ; des chauve-souris ; et divers insectes comme des araignées, libellules, coléoptères : le lucane cerf-volant qui vole dans le film « les saisons » de Jacques Perrin, le grand capricorne, et naturellement chez nous Rosalia alpina qui vit aussi dans nos Pyrénées. Ces biotopes sont recensés dans des publications, faciles à repérer sur internet, dans la mesure où l’on se donne le mal de chercher bien entendu. L’Université est en pointe dans ce domaine, et on trouvera la tête des réseaux à Toulouse la plupart du temps. L’Administration pilote est la DIREN, et un gros travail d’inventaire mérite d’être salué : te salutant, Caesar !
voici la trilogie : cuivré ; damier et écaille chinée, dans les marais



Mieux, quand la fragilité du biotope posait problème pour la survie de l’espèce, le propriétaire a été contacté, et un contrat a été signé avec lui. 

J’aimerais bien identifier le propriétaire en question, et savoir quelle contrepartie lui a été fournie, toujours est-il que ses parcelles n’étaient toujours pas fauchées quand nous sommes allés sur place ce vendredi 1er juillet, alors que les prairies voisines étaient tondues à blanc par les bovins entassés entre les clôtures électriques.

Vous me connaissez un sixième sens dans ce domaine. Nous décidons d’explorer le coin à trois, nez au vent, bottes dans la malle de la voiture, petits coussins en main pour reposer nos genoux fatigués quand nous recenserons les pieds d’oseille, la plante nourricière.

Nous nous garons pile sur le site, du moins quand nous trouvons les ruisseaux envahis par la végétation, base de la zone humide. L’iris est bien là, même s’il n’est plus en fleurs. Des prêles partout, ainsi que la reine des prés. Les herbes sont hautes, difficile d’avancer, et même de voir le copain. Les eupatoires sont en bouton, elles seront fleuries dans un mois, sans doute pleines d’écailles chinées. Volent des demi-deuils tout frais éclos. Des melitaea dont je me garderais bien de préciser l’espèce, tant ils se ressemblent. Et des Erebia, eux également impossibles à identifier plus précisément. Comme le temps est couvert, ils se lèvent quand on les dérange de leur perchoir herbu, puis se reposent quelques mètres après, impossible de les photographier !

c'est autre chose que Renoir avec ses hautes herbes : on n'y voit rien !

Vous devinez qu’avec un tel couvert les oseilles sont uniquement celles que l’on voit dépasser de la savane, en fait on ne voit que les graines du haut. Au sol, les feuilles sont pourries. On ne trouve de belles feuilles bonnes à manger que dans le pré délaissé par les vaches et autres bovins, d’abord parce qu’on les voit, qu’on peut observer les découpes classiques laissées par les chenilles du printemps, découpes entourées de rouille qui prouve qu’elles sont anciennes. Le dernier vol aurait du être le 25 mai (mais avec le temps frais il a sans doute été décalé début juin), et tout début juillet, on ne voit ni œufs, a fortiori ni jeunes chenilles.


Voici la pièce à conviction : une belle attaque de feuille d’oseille !

On va revenir tous ces prochains jours :

Dispar est là, nous allons poursuivre le travail de gardiennage bien engagé

Nous aussi protégeons cette merveille !


PS : mes élevages des années 70 en Tarn et Garonne :




à suivre...demain !