...Sauveterre en
Comminges...
...un (minuscule) paradis préservé
Nos amis catalans cohabitent avec
des papillons remarquables : je vous ai expliqué leur secret, il est
géographique : ils sont situés au Sud, leur climat est méditerranéen : on dit "soulane", ou adret. Nous
sommes au Nord, climat océanique : on dit "ombrée" ou ubac. Dans chaque cas, la végétation est adaptée,
et une faune spécifique l’a colonisée depuis des temps immémoriaux. Quand les
pratiques agricoles n’ont pas nui aux biotopes, des colonies parfois minuscules
de survivants subsistent. La limite de leur persistance dans le temps tient
uniquement à la quantité minimale de mâles susceptibles de féconder les
femelles, qui juste ensuite pondront en quantité suffisante sur la plante
nourricière des chenilles. Ceci uniquement dans la mesure où la plante en
question existe ; et poursuit son cycle naturel pendant la durée de vie
des chenilles. Le moins, s’il s’agit d’une prairie humide, est qu’elle ne soit
pas asséchée, ni fauchée mal à propos.
Le petit miracle des mesures prises dans le cadre de Natura 2000 est d’avoir identifié les biotopes en question. Ils concernent des oiseaux ; de petits mammifères rigolos comme le Desman ; des chauve-souris ; et divers insectes comme des araignées, libellules, coléoptères : le lucane cerf-volant qui vole dans le film « les saisons » de Jacques Perrin, le grand capricorne, et naturellement chez nous Rosalia alpina qui vit aussi dans nos Pyrénées. Ces biotopes sont recensés dans des publications, faciles à repérer sur internet, dans la mesure où l’on se donne le mal de chercher bien entendu. L’Université est en pointe dans ce domaine, et on trouvera la tête des réseaux à Toulouse la plupart du temps. L’Administration pilote est la DIREN, et un gros travail d’inventaire mérite d’être salué : te salutant, Caesar !
voici la trilogie : cuivré ; damier et écaille chinée, dans les marais |
Mieux, quand la fragilité du
biotope posait problème pour la survie de l’espèce, le propriétaire a été
contacté, et un contrat a été signé avec lui.
J’aimerais bien identifier le
propriétaire en question, et savoir quelle contrepartie lui a été fournie,
toujours est-il que ses parcelles n’étaient toujours pas fauchées quand nous sommes allés sur place ce vendredi 1er
juillet, alors que les prairies voisines étaient tondues à blanc par les bovins entassés
entre les clôtures électriques.
Vous me connaissez un sixième
sens dans ce domaine. Nous décidons d’explorer le coin à trois, nez au vent, bottes
dans la malle de la voiture, petits coussins en main pour reposer nos genoux
fatigués quand nous recenserons les pieds d’oseille, la plante nourricière.
Nous nous garons pile sur le
site, du moins quand nous trouvons les ruisseaux envahis par la végétation,
base de la zone humide. L’iris est bien là, même s’il n’est plus en fleurs. Des
prêles partout, ainsi que la reine des prés. Les herbes sont hautes, difficile
d’avancer, et même de voir le copain. Les eupatoires sont en bouton, elles
seront fleuries dans un mois, sans doute pleines d’écailles chinées. Volent des
demi-deuils tout frais éclos. Des melitaea dont je me garderais bien de
préciser l’espèce, tant ils se ressemblent. Et des Erebia, eux également
impossibles à identifier plus précisément. Comme le temps est couvert, ils se
lèvent quand on les dérange de leur perchoir herbu, puis se reposent quelques
mètres après, impossible de les photographier !
c'est autre chose que Renoir avec ses hautes herbes : on n'y voit rien ! |
Vous devinez qu’avec un tel
couvert les oseilles sont uniquement celles que l’on voit dépasser de la
savane, en fait on ne voit que les graines du haut. Au sol, les feuilles sont
pourries. On ne trouve de belles feuilles bonnes à manger que dans le pré
délaissé par les vaches et autres bovins, d’abord parce qu’on les voit, qu’on
peut observer les découpes classiques laissées par les chenilles du printemps,
découpes entourées de rouille qui prouve qu’elles sont anciennes. Le dernier
vol aurait du être le 25 mai (mais avec le temps frais il a sans doute été
décalé début juin), et tout début juillet, on ne voit ni œufs, a fortiori ni
jeunes chenilles.
Voici la pièce à
conviction : une belle attaque de feuille d’oseille !
On va revenir tous
ces prochains jours :
Dispar est là, nous
allons poursuivre le travail de gardiennage bien engagé
Nous aussi protégeons
cette merveille !
PS : mes élevages des années 70 en
Tarn et Garonne :
à suivre...demain !