on dit en réalité : Eric et Marjorie
Ce sont nos deux gloires locales.
Ils cachent bien leurs passions : la
manifeste (je reprends le vocabulaire de la psy des comportements qui m’est
cher) c’est la médecine : lui est dermato. Elle infirmière. Activités
passionnelles s’il en est. Ils ont compris depuis des années que vivre ici,
peut devenir un art de vivre. Si l’on restaure la maison de famille par
exemple. Elle se situe en montagne, dans
un espace d’altitude, entouré de prés verdoyants. Les prés sont dominés par la
montagne. Pour que ce soit un peu plus exotique encore, nous sommes dans les
Hautes-Pyrénées.
Le pré n’est pas qu’un pré :
bien qu’assez exigu, il est plat. Figurez-vous qu’il sert non pas à faire
paître des moutons, mais de piste d’atterrissage. C’est là que je poursuis ma
psy : chacun de nous à des titres divers présente au moins deux
personnalités, comme Janus aux deux
visages, la manifeste, ce qui se voit
à l’extérieur. Et la latente :
la passion cachée, celle pourquoi on vit passionnément parfois.
La latente, c’est l’aviation. A un degré tel que cela commence par
la construction de l’avion de ses rêves. On en réalise un, on en fait un
deuxième, profitant des erreurs du premier. L’avion en question est conçu pour
atterrir court, à cause du fameux pré. Comme s'il s'agissait du pont d'un porte-avions. D'où la décoration "Navy" sur le fuselage ! Il faut qu’il braque fort, pour prendre
des virages sur l’aile, au cas où le panorama nécessiterait des manœuvres (quasi) acrobatiques. Vous imaginez le topo : le pilote coince le manche entre les
genoux, ça sert à incliner l’avion à droite ou à gauche. Et braque avec les pieds
si je puis dire. Vous savez que dans un avion on actionne le gouvernail avec
les pieds, en appuyant sur les pédales gauche et droite, tout en inclinant
simultanément l’avion avec le manche. Vous avez compris que les mains sont
libres, si l’accélérateur manuel est mis à fond, et si le manche est coincé entre les genoux.
Donc on peut prendre entre les
mains un Nikon assez gros, (enfin, vraiment gros), avec un gros téléobjectif, avec un max de pixels, et prendre des photos. Des photos aériennes forcément.
cette superbe photo est signée : la Dépêche : on voit bien le fameux Nikon |
Revenu au sol, le carburant réapprovisionné pour la prochaine sortie. La maison de campagne remise en
ordre, on soigne les patients. Puis, dare-dare, on peut rejoindre le bureau, et
traiter les photos. Avec un (gros) ordinateur et quelques logiciels professionnels,
chaque photo est tirée. Recadrée. Traitée. Photoshop permettant de corriger
toute anomalie. Je fais cela quand je dois camoufler un truc moche sur une
jolie photo, c’est comme ça que les mannequins sont toujours parfaits (et
parfaites) dans les magazines.
L’idée, vous commencez à suivre,
est de passer le plus de temps en l’air possible. Et de se faire plaisir (en vol), au-delà des
contingences normales des gens normaux : monter très haut en altitude dans
le brouillard. S’enivrer de la pureté de l’air, du calme, et de la beauté du
paysage. Atterrir sur la neige. Dans la neige. Virer avec les genoux. Le
passager doit avoir le cœur bien accroché puisque Eric photographie tout ce qui
passe à portée, et ne cherche pas le confort d’un pilote de ligne pour ses
passagers. Le mieux pour le passager (dont les genoux et les pieds sont libres)
est de photographier lui aussi, pour oublier le mal de l’air. Le plus souvent,
la passagère est Marjorie, à moins que ce soit l’inverse puisqu’elle pilote
elle aussi, (pour sauvegarder sa parité féminine).
Les photos prises, dommage de ne
pas les publier. Comme les éditeurs sont toujours compliqués, le mieux est d’être
son propre éditeur, comme on était son propre photographe. Le mieux est aussi d’écrire
les textes que l’on veut, le mieux c’est de tout faire soi-même, de manière à
rester totalement libre en ne dépendant de personne.
Liberté !
Depuis quelques années, les
ouvrages sur les paysages aériens locaux s’additionnent, touchant la montagne ;
la Ville c'est-à-dire Toulouse ; le Béarn ; la montagne encore, ici
et ailleurs, c'est-à-dire en Espagne : l’avion permet l’accès aux endroits
les plus difficiles (d’accès pour nous qui roulons en voiture ou marchons à
pied) en survolant les obstacles, c’est
le cas de le dire !
Je cite la Dépêche : « dans son dernier ouvrage, Éric Soulé
de Lafont (ha oui, je n’avais pas orthographié son nom complet) montre le meilleur de son œuvre
photographique. Quinze ans de photos des Pyrénées, à toutes les saisons, à
toutes les heures. En profitant des progrès du numérique, Éric a su saisir la
beauté exceptionnelle et grandiose des paysages pyrénéens, présentés en double
page, associés à des légendes minimales pour célébrer toute la puissance
évocatrice des photos. Guidé par sa passion de la lumière et sa recherche du
sublime, il a traqué pendant dix ans ce maudit canyon d'Arazas s'embrasant au
soleil couchant. Une quête qui pouvait lui coûter très cher. Mais cette
fois-ci, elle n'a pas été vaine, grâce à cette lumière d'automne si pure et si
douce, teinte d'ocre et de rouge, ce somptueux morceau de Colorado pyrénéen
s'illumine. Et victoire, le flamboyant canyon est dans la boîte. Une photo
incroyable de beauté. Le pilote émérite, qui a dans les pattes deux mille
heures de vol, raconte, avec la pudeur qui le caractérise, toutes les fois où
il a risqué sa vie pour nous offrir ces images sublimes".
Vous avez compris ? un avion
n’est pas un hélico, et s’enfourner dans un canyon suppose ne pas percuter ni à
droite ni à gauche ; descendre pourrait être dangereux, et monter peut être
une parade utile, mais pas facile avec les genoux en tenant le Nikon entre les mains !
La dernière aventure d'Éric et Marjorie
est le tournage, dans les Pyrénées, d'un documentaire pour l'émission «Des racines et des ailes» qui sort sur
nos petits écrans mercredi 7 janvier 2015. C'est demain ! Son épopée de pilote, constructeur, photographe, éditeur intéresse les
responsables de la chaîne et de son côté, c'était l'occasion d'approcher de
grands professionnels de l'image et du son.
Tous à nos télés mercredi 7 janvier !
Je vous prépare le topo : la
vallée d'Ordesa, dite aussi canyon d'Ordesa, canyon d'Arazas, ou encore Valle
de Araza, est une vallée glaciaire des Pyrénées espagnoles dans la comarque de
Sobrarbe en la province de Huesca, communauté autonome d'Aragon.
Située au pied du mont Perdu,
elle est à l'origine de la création du parc national d'Ordesa le 16 août 1918. Dans
l'ensemble, la vallée d'Ordesa est une vaste zone comprenant de petites vallées
et des ravins, des précipices, des hauts-plateaux et des pics (plusieurs
d'entre eux ayant plus de 3 000 mètres d'altitude). Ses limites sont la crête
du Mont Perdu-Mondarruego au nord, qui sert de frontière avec la France pour sa
majeure partie, la crête Sierra Custodia-Acuta au sud, et la confluence avec la
vallée de l'Ara, ou vallée de Bujaruelo, qui donne la vallée de Broto. Tout cet
ensemble forme un bassin hydrographique qui au travers de vallées secondaires
et de cascades, débouche sur la vallée d'Ordesa proprement dite, au fond de laquelle
coule le rio Arazas.
à pied, l'accès n'est pas donné à tout le monde ! |
faja de los flores |
L'orientation de la vallée d'est
en ouest, rare dans les Pyrénées, l'expose au climat océanique venant de
l'Atlantique, ce qui confère un climat modéré comparé aux autres vallées des
Pyrénées espagnoles plus sèches. Elle possède en Europe la plus grande
population d'isards. Les hautes zones comprennent une partie de la crête nord
depuis le mont Perdu (3 355 mètres) jusqu'aux Gabiétous (3.034 mètres) et toute
une succession de pics de plus de 3 000 mètres entre lesquels s'ouvre une
impressionnante crevasse, la brèche de
Roland, passage naturel entre la France et l'Espagne et qui, selon la
légende, fut ouverte par un coup d'épée du paladin Roland. Un peu au sud de la
brèche se situe la grotte Casteret dont l'intérieur est en grande partie gelé
avec des colonnes et cascades de glace.
C’est là que je voulais en venir :
admirer d’avion la brèche de Roland n’est pas donné à tout le monde !
Mermoz revient !
je sais qu’il nous prépare d’autres surprises…
…mais je n’ai pas le droit de vous le dire… !