samedi 23 juillet 2022

Giorgio de Chirico, pittore metafisico

 

je vous ai montré jusque là des peintures réalistes

elles représentaient des sujets réels, plus ou moins précis, avec des impressions, des transpositions fauves, parfois rarement cubistes, encore moins futuristes...

... mais jamais (encore) surréalistes ...

... encore moins métaphysiques !

(à part mon copain Salvador Dali)


Voilà Giorgio De Chirico, né le 10 juillet 1888 à Vólos en Thessalie (Grèce), et mort le 20 novembre 1978 à Rome : c'est un peintre, sculpteur et écrivain italien dont les œuvres, unanimement admirées des surréalistes jusqu'en 1925, ont ensuite été rejetées tout aussi unanimement.... mais elles sont réhabilitées, et Sotheby's les vend... très cher ! 

Il est l'un des fondateurs du mouvement de la peinture métaphysique.

Y-en a-t-il eu d'autres ? oui, de grands noms, souvent incompris ! 


ils m'aident à voir autrement :

exemple bien banal, qui va vous faire sourire (j'espère ?)


Cette scène des recherches archéologiques dans la nécropole de Valcabrère se passe sous nos yeux, (les miens sont déconcertés par l'interdiction faite au public d'exhumer les corps des cimetières), mais ici il s'agit de former des Master-archéologues à pratiquer l'archéologie en décrivant le passé en déterrant les squelettes. (1) Je prétends que l'on pourrait s'intéresser au mode de vie des disparus, à leurs technologies ressemblant aux nôtres notamment l'usage de l'eau...Bon ! Voilà que grâce aux peintres métaphysiques, je découvre ce tableau :


il s'agit de "la conversation" de Paul Delvaux (1897-1994)

on peut en effet communiquer avec les morts comme me le confirme cet envoi récent d'un chercheur de Valcabrère qui, au cours d'un moment de fouille, a trouvé (sans en rater un) ces cinq métacarpiens, et "engage la conversation" sous forme de "tweet" par ces trois mot proprement "surréalistes" :

"plaisir de partager"

Pour reprendre le titre précédent, "mes yeux voient la pensée" de Paul Delvaux, à savoir la conversation que nous avons tous entre notre nous-profond-vivant, (une jeune femme qui a enlevé son soutif pour mieux penser), et la mort, représentée par le squelette déterré à Valcabrère, squelette que nous allons devenir tous ... sans savoir si la vie qui suivra est ... éternelle ou pas !

du coup, la peinture n'est plus là pour montrer la réalité (embellie de Beauté pour nous enchanter), 

mais pour nous faire réfléchir à des concepts complexes ! 

c'est le génie de notre Giorgio, pittore metafisico

J'ai perso sous-titré mon bouquin "histoires mythiques d'un écologue", ému par Carl von Linné qui avait donné aux papillons des noms issus de la mythologie grecque. J'étais bien loin du fonds de la mythologie ! 

il était temps que j'aborde la métaphysique !



la figure métaphysique

intérieur métaphysique

mélancolie hermétique

vous voyez ? vous voyez ... autrement ?

ce cheval n'est pas un cheval ordinaire, mais dans "Métamorphoses de l'âme et ses symboles", Carl Gustav Jung parle du cheval comme « d'un des archétypes les plus fondamentaux des mythologies, proche du symbolisme de l'arbre de vie ». Comme ce dernier, le cheval relie tous les niveaux du cosmos : le plan terrestre où il court, le plan souterrain dont il est familier, et le plan céleste. Il est « dynamisme et véhicule ; il porte vers un but comme un instinct, mais comme les instincts il est sujet à la panique ». En ce sens, le motif du cheval est un symbole adapté pour le Soi car il représente une réunion de forces antithétiques et contradictoires, conscientes et inconscientes, ainsi que la relation les reliant (de même qu'une relation indéfinissable unit le cavalier à sa monture).

je ne puis m'en empêcher, voici une 2CV (au sens métaphysique)


Jupiter est certes Jupiter, et il terrasse (avec Brigitte le soutenant derrière) l'opposition déconfite ?

et voici le retour (fantasmé) d'Ulysse



justement, voilà représentée ...  l'Archéologie ! ! 

et justement, voici les ... archéologues !
ils forment une corporation, ils détiennent les secrets du passé
et s'entendent pour expliquer d'où nous venons ... ignorant (comme nous) où nous allons ! 

le sujet l'a tellement concerné qu'il a peint cette autre version

Je vous ai souvent parlé d'Ariane



C'est au musée du Louvre que de Chirico découvre l'Ariane allongée, un moulage en bronze du marbre héllénistique du Vatican de le Primatice, ainsi qu'une copie en marbre réalisée par Cornelis van Cleve, et exposée dans les jardins de Versailles. Cette Ariane devient la figure mythique au coeur de la série Méditation, réalisée entre 1912 et 1913. Le peintre développe le mythe d’Ariane endormie, lequel prend sa source dans les écrits de Nietzsche :Ariane incarne le principe féminin de l’art, la connaissance intuitive. Son éveil mystique par Dionysos devient le symbole du retour au labyrinthe, dont le penseur hardi affronte sans crainte les énigmes – la métaphore d’un processus artistique qui dévoile la face inhabituelle, « métaphysique », du monde matériel. De Chirico représente toujours Ariane endormie abandonnée par son amant et attendant la venue du dieu, dont la puissance créatrice est représentée sur le plan pictural par une tour ou une cheminée d’usine.

que signifie AIDEL ?... idéal ?



Dans Il Sogno di Tobia (Le rêve de Tobias), De Chirico pousse l'iconographie de ses œuvres métaphysiques au-delà des peintures ferraraises précédentes, qui incorporaient des images telles que des cartes et des biscuits. Ici, dans un espace intérieur ambigu, nous trouvons une image dans une image dans le paysage métaphysique à droite et la salle intérieure, vide mais pour un grand leurre de pêche en métal, à gauche. Derrière cette œuvre, une boîte bleue et des armatures géométriques se projettent dans l'espace en retrait de l'arrière-plan. Le centre de la composition est dominé par une grande colonne centrale, s'effilant vers le haut, un thermomètre entre parenthèses en son centre et le mot Aidel écrit en texte vertical descendant.

Paolo Baldacci a analysé l'iconographie et la métaphore de l'imagerie présentée ici : « Le titre du tableau, Le rêve de Tobie , suggère que l'œuvre est une métaphore de la révélation, d'une vision de l'invisible, et en effet l'iconographie soutient une telle lecture. Dans le livre apocryphe de la Bible, Tobias est chargé par un ange d'attraper un poisson et, en enduisant le foie sur les yeux aveugles de son père, de restaurer sa vision. Le leurre en zinc… fait allusion aux poissons pêchés par Tobias…. Les lettres sur l'obélisque proviennent du mot grec « a(v)idelon », qui signifie invisible…. Le thermomètre fait allusion de manière assez ironique au dieu Mercure, ou Hermès… messager des dieux. La mythologie grecque et la mythologie biblique sont ainsi confondues » (P. Baldacci, ibid ., p. 362).

le mythe moderne


de Chirico a libéré les surréalistes

Paul Delvaux écrit à Giorgio le 4 juin 1975

Paul Delvaux l'escalier 1946

Jane Graverol : le cortège d'Orphée (1948) commence par une Licorne


L’énigme de la fatalité, 1914, Giorgio de Chirico (Kunstmuseum Basel). Le format inhabituel du tableau repose sur la signification du triangle en tant que symbole mystique et magique des figures géométriques, basé dans les textes philosophiques d’Otto Weininger qui évoquait l’effet inquiétant du triangle. On retrouve le chiffre trois. Le théorème de Pythagore...et la sainte Trinité...


les bananes ?


c'est "l'incertitude du poète"

Magritte : Georgette au bilboquet

et le discours de la méthode


alors : cette baigneuse au drap rouge

vos yeux ont-ils vu ... 

... ses pensées ?

« Vivre dans le monde comme dans un immense musée d’étrangetés, plein de jouets curieux, bariolés, qui changent d’aspect, que quelquefois comme de petits enfants nous cassons, pour voir comment ils étaient faits dedans et, déçus, nous nous apercevons qu’ils étaient vides » : des jouets, des pièces d’échecs, des morceaux de boîtes de conserve, des clés pour mécanismes brisés, des châteaux en carton, des balles de chiffons aideront De Chirico dans son « triste atelier de la rue Campagne-Première », où il a l’intuition « qu’il faut découvrir l’œil en toutes choses ». 

En effet, dans la première moitié de l’année 1914, Apollinaire, Savinio et De Chirico élaborent en collaboration étroite le motif de la poupée articulée sans visage qui, aveugle et muette, va maintenant remplacer l’être humain et peupler les espaces picturaux de Giorgio de Chirico : La fenêtre ouverte qui apparaît dans Le voyage sans fin (1914), est une image-clé qui raconte de nouvelles spéculations sur l’astronomie mystérieuse, marquées mathématiquement sur le tableau noir, où De Chirico développe une ébauche du mannequin de La nostalgie du poète, ici transformé en un corps féminin sur lequel se dressent les robes de marbre de la Koré capitoline, avec l’œil – le troisième œil central – conçu comme un masque élégant.

Drouot 10 avril 2022, €380000



il n'y a pas que Rodin pour avoir créé "le Penseur" : c'est

il Pensatore 1973

le symbole de notre civilisation gréco-romano-chrétienne
assis sur le trône du Roi Salomon, il s'interroge...

... car il tient l'étiquette :

Sum sed quid sum ?

Je suis quelque chose, mais quoi ? Qui nous sommes? Qui choisissons-nous d'être ? Quel rôle voulons-nous jouer dans un monde qui n'est pas tel qu'il paraît ? Ce sont des questions qui redeviennent d'actualité à toutes les époques et qui brillent d'une lumière solennelle et opaque à travers les coups de pinceau du maître.

« Vivre dans le monde comme dans un immense musée d’étrangetés, plein de jouets curieux, bariolés, qui changent d’aspect, que quelquefois comme de petits enfants nous cassons, pour voir comment ils étaient faits dedans et, déçus, nous nous apercevons qu’ils étaient vides » : des jouets, des pièces d’échecs, des morceaux de boîtes de conserve, des clés pour mécanismes brisés, des châteaux en carton, des balles de chiffons aideront De Chirico dans son « triste atelier de la rue Campagne-Première », où il a l’intuition « qu’il faut découvrir l’œil en toutes choses ». 

Dans la première moitié de l’année 1914, Apollinaire, Savinio et De Chirico élaborent en collaboration étroite le motif de la poupée articulée sans visage qui, aveugle et muette, va maintenant remplacer l’être humain et peupler les espaces picturaux de Giorgio de Chirico : La fenêtre ouverte qui apparaît dans Le voyage sans fin (1914), est une image-clé qui raconte de nouvelles spéculations sur l’astronomie mystérieuse, marquées mathématiquement sur le tableau noir, où De Chirico développe une ébauche du mannequin de La nostalgie du poète, ici transformé en un corps féminin sur lequel se dressent les robes de marbre de la Koré capitoline, avec l’œil – le troisième œil central – conçu comme un masque élégant.





PS (1) : désolé de paraitre "rabat-joie", j'ai déjà  cité précédemment les textes de la loi du 19 décembre 2008 (article 225-17) une loi (dont on se demande bien qui l'applique désormais), ajoutant qu'à la "violation et profanation des sépultures", "l'atteinte à l'intégrité du cadavre" est sanctionnée. Je sais bien que l'on exhibe couramment les momies dans les Musées. Ouf, le musée de l'Homme évoque les questions "éthiques et mémorielles" que cela implique, notamment au sujet de la momie péruvienne, où il voit "l'âme qui pleure", qui aurait inspiré le cri de Munch

la momie Chachapoya exhumée en 1882




Munch a peint de superbes toiles


tout le monde ne connait que celle-là