samedi 7 septembre 2019

Drôle de grange cistercienne

Quand on parcourt la revue spéciale du Comminges consacrée à Bonnefont, on apprend bien sûr que l'abbaye a été démantelée par l'acquéreur (les acquéreurs) des biens vendus à l'encan après la Révolution (je vous ai raconté tout cela autrefois PJ), et que l'exploitation agricole (l'immense exploitation) comprenait des "granges". Quand on vous parle de cela, vous comprenez "hangars"Etables pour les vaches et leur lait. Granges à céréales et à foin. Vous vous faites tout un cinéma. Et vous devinez, à voir le cellier sur place qui a été restauré, avec des vitraux cisterciens c'est à dire sobres, aux fénestrons, que ces granges ne doivent pas ...être si consacrées que cela aux simples activités agricoles ?

le cellier de l'abbaye devenu salle d'exposition, et son portail sobre, mais voyez la taille soignée des pierres des fenêtres


Je prépare souvent mes visites par la recherche des photographies que les visiteurs précédents ont pu prendre, comme celles que l'on trouve en fouillis sur google-map, Rarement verticales, rarement bien prises, mais toujours intéressantes puisque évitant toute dépense de carburant-fossile-taxé. Je trouve la photo qui précède, prise par des habitués du chemin de Nankin, où l'on voit une façade qui s'avère être celle au Sud. On devine le côté Ouest, et on ignore à quoi ressemblent les deux côtés cachés. Comme grange, les fenêtres de l'étage pointées sur les Pyrénées ont fière allure, de croisées médiévales, et ressemblent à un logement, je vous ai fait observer qu'après avoir bu (de l'eau), les moines devaient bien se loger. On estimait qu'ils étaient 200 à Bonnefont. Sans doute une partie logeait-elle ici ? Tiens cela me fait penser qu'il doit y avoir une source pas loin ? 

Il y a bien une source, toujours sous les ronces c'est une habitude, je la repère grâce à la présence d'un sylvain posé sur un saule, arbre des zones humides. Et le coin est envahi de prêles, signe d'humidité.



Il y a aussi plein de chemins creux, cisterciens eux aussi, bordés de murets et protégés de la canicule par des ombelles d'arbrisseaux.


Je demande l'autorisation de faire le tour, qui m'est accordée, la "grange" est habitée, depuis peu, et a déjà commencé d'être réhabilitée.


Mon Dieu (je suis devenu moine ne l'oubliez pas !) 
que la façade Est est belle...
 et ce grand porche roman ?


"roses et denticules, caractéristiques de l'art cistercien méridional" (sic)

drôle d'entrée pour une grange ?

merci aux propriétaires d'avoir autorisé ces photos

appréciez le fénestron reconstitué à l'étage Ouest, symétrique de l'ancien à l'Est, les anciennes photos aident à montrer l'amélioration de l'architecture grâce aux travaux réalisés

vue sur les Pyrénées

cela doit être beau de résider dans une vieille (elle aurait 773 ans)...

..."grange" cistercienne !

bravo à ceux qui réhabilitent le Patrimoine !


PS (1) : j'en ai rédigé des billets sur Bonnefont :


je suis allé visiter les lavabos des abbayes catalanes


mais je n'avais pas repéré la fontaine de bonus font !
encore moins celle de la "grange"
ni même "la grange" !


PS (2) complément sur "Les granges cisterciennes" (ex wiki : Abbaye de Morimond)

"Sur les terres éloignées les moines édifient des granges monastiques dirigées par des frères convers (membres des ordres religieux catholiques chargés principalement des travaux manuels et des affaires séculières d'un monastère), nommé « bartlingo » à cause de leur longue barbe. Ils se divisent en plusieurs fratries, les meuniers (« frates molendinarii »), les boulangers (« frates pistores »), les brasseurs (« frates brasciarii »), les huiliers (« frates olearii »), les corroyeurs (« frates coriarii »), les foulons, etc".. J'observe qu'il manque à cette énumération un "frater aquarius", chargé de la gestion des eaux, eau potable destinée à la boisson, et eau-énergie s'agissant des moulins. ndla) 

"Chaque fratrie est encadrée un frère inspecteur ; un moine directeur coordonne l'ensemble. À leurs côtés se joignent des serviteurs et des étrangers. Au sein d'une grange les frères convers, jamais plus de huit ou dix, avaient un chef nommé Maître (« magister conversorum ») chargé d'accueillir les étrangers et les pauvres. En seconde place vient le « frater stivarius » chargé de la charrue, associé au frère bouvier ou pique-bœuf (« frater bubulcus »). Les frères vachers, bergers et porchers étaient accompagnés d'un plus jeune (« junior suus »), à eux s'ajoutent le laitier, le charretier et le palefrenier.

Lorsqu'une grange peut suffire à l'entretien de treize frères convers avec les domestiques, elle devient abbaye. À la fin du XIIIè siècle l'abbaye de Morimond compte quinze granges toutes sous la direction du cellerier, rassemblant plus de deux cents chevaux, autant de bœufs, des vaches et des veaux en grand nombre ainsi qu'une vingtaine de porcheries, chacune comptant deux à trois cents porcs. Les troupeaux sont rentrés tous les soirs. Les granges sont construites sur un même modèle, à savoir une cour fermée par deux grandes portes, les écuries et les logements des domestiques d'un côté et de l'autre le bâtiment des frères ; l'ensemble est fermé par un mur d'enceinte délimitant la « curtis grangiœ » qui est terre sacrée et inviolable.


Les travaux des champs n'étaient pas les seules occupations des moines, le pape Benoît XII, formé dans ses jeunes années au monastère cistercien de Fontfroide, entreprend, entre autres choses, d'organiser l'enseignement dispensé dans les monastères. Il décide que chaque abbaye doit avoir une école et chaque province un lycée. Il en reconnait six : Oxford, Toulouse, Montpellier, Salamanque, Bologne et Metz ; au-dessus d'eux se situe le collège de Paris et, comme toutes les abbayes de l'ordre comptant plus de quarante religieux, Morimond était tenue d'envoyer à Paris deux moines profès. Morimond verra dans ses murs s'épanouir des moines érudits, tel Otton de Freising auteur du « Traité des trois degrés, ou moyen d'obtenir l'héritage céleste », Himbert de Losne, Odon, Renaud Ier qui a composé la vie de sainte Glossinde. À son apogée la bibliothèque de l'abbaye de Morimond comptera six mille volumes dont les deux tiers, après la Révolution, formèrent le fonds de la bibliothèque de Chaumont.

voici les ruines de Morimond, avec des arcades qui en rappellent d'autres ??

et voici un auvent, transposable en balcon, qui serait parfait pour faire sécher des épis de maïs
je dis cela, je ne dis rien, bien entendu !
il y a une suite...