alors on le démonte ?
C’est une histoire vieille comme
l’humanité : les peuples adorent s’approprier les objets. On peut même les
acheter, au marché, aux enchères, ou chez un antiquaire. La France achète la Vénus de Milo. En toute légalité. Je ne
dirais pas qu’elle abuse l’agriculteur qui découvre l’objet : elle l’indemnise
(en drachmes)(1). Plusieurs années après, la Grèce regrette cette perte (inestimable)
de son patrimoine. Mais vu l’argent qu’elle nous doit, on la conserve en
garantie, tout est bien qui finit bien. Pareil pour le buste de Néfertiti. Pareil pour les antiquités chinoises achetées
par Yves St Laurent et Pierre Bergé, qu’il rend (avec quelle classe) au peuple
chinois pour orner un beau musée. C’est pareil à tous les échelons de l’humanité,
quand la plaque funéraire originale de la Villa de Nymfus se retrouve à Toulouse (qui l’a dûment payée), alors qu’à
Valentine (le pays d’origine) on n’a qu’un moulage en plâtre à montrer (à
Toulouse la plaque est cachée dans le noir du sous-sol du musée st-Raymond les
toulousains se préoccupant peu de ce qui n’est pas à eux).
C’est comme ça, les antiquités se
baladent en toute légalité, la seule
façon de s’y opposer est de préempter, ce qui suppose une forte volonté (et l’argent pour payer, comme cela vient
d’arriver à notre chapiteau, voir plus haut).
C’est donc en toute légalité que
Saint-Gaudens, (la ville aux deux Leclerc, un en activité et l’autre
entièrement vidé mais quand-même payé), dispose de deux cloitres : celui
en propre de la Collégiale (dont quelques chapiteaux sont moulés). Et le
cloitre remonté, quand celui de Bonnefont était démonté. Ce cloitre orne depuis
quelques années le jardin d’hiver, et pour montrer qu’on était motivés, au lieu
du lavabo destiné aux moines (pour se laver les pieds), nous on a creusé un lac
pour que le cloitre puisse se mirer. C’est beau sur les photos.
je me suis arrangé pour tenter de cacher tous les accessoires colorés qui sont tout à côté |
Bien difficile de photographier,
car tout autour se sont accumulés poubelles ; jardins d’enfants aux
couleurs vives (car les enfants
pour repérer les couleurs doivent avoir en face de leurs jeunes yeux les couleurs de base quasi fluo sinon ils ne
verraient rien). Mâts bleus de l’éclairage public. Mâts en bois patiné
de l’électricité. Immeubles divers de toutes époques.
Au centre, pour ne pas se
tromper, les municipalités qui nous ont précédé ont un magnolia planté (je prose en rimes je ne puis m’en
empêcher). In fine, comme il
est « nature », il ne va pas si mal à ce qui devrait être l’emplacement
du lavabo, en eau (par la source de Bonnefont) alimenté.
Bref, le challenge comme disent nos amis anglais, va consister à trouver
un très-très-gros déménageur. Je sais déjà où scier les chapiteaux pour ne rien
abîmer. Il faut les pierres numéroter, démonter, transporter et remonter, j’ai
assez déménagé pour vous dire que ça n’est pas aussi difficile que ça.
Avec l’intercommunalité voisine
(et amie cela va mieux en le disant) il va falloir négocier, pour qu’ils nous
offrent un dédommagement honorable.
Dans cette affaire, garder l’honneur est essentiel !
Celui qui pourrait son chapeau
manger, mais il est décédé, c’est l’apôtre
du Comminges, épithète qui traduit bien un humour du troisième degré (au
moins), si l’on considère que son buste est face à l’Ecole Sainte-Thérèse (mais
à côté du buste de Marianne, j’y ai veillé), et que ce cloitre transplanté était une friandise
qu’il avait adorée, lui qui bouffait toute la journée du curé (enfin il parait !)
J’ai retrouvé la carte postale
qui montre le jardin avant la transplantation, au fond on n’a pas besoin d’un
cloitre entouré de tas de trucs qui le dénaturent :
qu’on valorise celui
qu’on a déjà !
qu’il revienne là ...
... où les moines de Citeaux l'avaient érigé !
(1)
Le
buste de la statue est mis au jour le 8 avril 1820 à Milos, une île de la mer
Égée, faisant alors partie de l'Empire ottoman, par un paysan nommé Yorgos
Kentrotas à la recherche de pierres pour bâtir un mur autour de son champ. Par
hasard, un élève officier de marine français, Olivier Voutier, assiste à la
découverte. Passionné par l'archéologie, alors une discipline récente, il
incite le paysan à continuer de creuser. Apparaissent alors la partie
inférieure de la statue et quelques fragments appartenant de toute évidence à
la statue, comme le nœud du chignon. En l'état, le buste n'a déjà plus ses
bras, comme en témoigne le dessin exécuté sur place par Voutier. Celui-ci
prévient Louis Brest, vice-consul de France à Milo, pendant que le paysan,
poursuivant sur sa lancée, met au jour d’autres fragments, dont deux piliers
hermaïques, deux blocs inscrits, qui seront ensuite rejoints par un troisième,
une main mutilée tenant un fruit (mais d’un travail trop rudimentaire pour
appartenir à la statue et des morceaux de bras.
Voutier fait alors pression sur le consul pour que l'État français
achète la statue. De son côté, Jules Dumont d'Urville, alors enseigne du
vaisseau La Chevrette, dirigé par le capitaine et hydrographe Pierre-Henry
Gauttier du Parc, a également vu la statue et alerte le marquis de Rivière,
ambassadeur de France auprès de la Sublime Porte. Celui-ci dépêche sur place un
secrétaire d'ambassade, le comte de Marcellus, qui arrive en rade de Milo au
moment où la statue est en train d'embarquer sur un navire à destination de
Constantinople pour le compte d'un haut dignitaire turc.
Au terme de tractations diverses, la statue est achetée en septembre
1820 pour le compte du marquis de Rivière, et ramenée en France en pleine
propriété. Durant son voyage, la statue fera escale au Château d'Audour, à
Dompierre-les-Ormes dans la propriété du comte de Marcellus.
Le marquis de Rivière la fera offrir au roi Louis XVIII le 1er mars 1821, qui en fait aussitôt don au musée du Louvre. Comme toute œuvre endommagée, la Vénus entre dans l'atelier de restauration du musée afin de subir l'examen minutieux de son restaurateur en chef Bernard Lange. La rigueur d’analyse de ce dernier le conduit à écarter de ses projets de restauration toute conception fantaisiste. Il pense ainsi retrouver le mouvement initial de bras de la Vénus et envisage de recréer les parties manquantes selon les préceptes de restauration en vigueur à cette époque. Contre toute attente, mais avec l’appui du roi, il est finalement décidé de la présenter dans l'état où elle a été trouvée, sans ajout ou complément. Les seules restaurations sont celles de l'extrémité du nez, de la lèvre inférieure, du gros orteil du pied droit et de quelques raccords dans l'épaisseur de la draperie.
il y a des détails très sympa, dont cette branche d'olivier indispensable pour garantir la paix ! |