vendredi 6 septembre 2019

Je trouve la source de Bonnefont(aine)

La meilleure manière de m'enlever de la tête le bouquin d'Andreoli consiste à retrouver ses sources guérisseuses du Comminges. Je vous en ai montré deux, voici la troisième, et sans doute la principale, puisque Bonnefont n'aurait jamais vu le jour sans la fontaine découverte par les Cisterciens, qui coule toujours, pour alimenter le lavabo, source de pureté des mains, des pieds, et de l'âme des moines... peut-être aussi des visiteurs ?



Songez-y : nous sommes en 1136 dans le même paysage qu'aujourd'hui. Des collines boisées de chênes, des chênes déjà célèbres. Des prés en pente. Des champs plats propices aux céréales. Dans les prés, les mêmes vaches qui étaient menées mille ans auparavant au macellum de Saint-Bertrand de Comminges, et qui paissent mille ans plus tard toujours sur place. Des hauteurs, on a vue sur les Pyrénées. pas loin, la pierre jaune et tendre de Nankin, à un demi-tour du globe en Chine, est parfaite pour appareiller des pierres taillées.



départ (à pied) du chemin de Nankin

Les terres nous ont été offertes par Flandrine de Montpezat et ses fils, car admettons l'hypothèse suivante : je nais donc dans les années 1100, j'ai trente ans en 1135, quelques diplômes d'hydraulique et de génie rural bien utiles à l'époque (acquis lors de pérégrinations sur lesquelles je passe, dont Paris et Salamanque...), il me faut gagner ma croûte et trouver une situation sociale. J'ai quelques dons pour trouver de l'eau, source de vie, indispensable à l'alimentation du lavabo cistercien, base de la construction de tout bâtiment, a fortiori une abbaye. Je m'enrôle comme convers frater aquarius. Vous comprendrez demain. Le prieur m'envoie en reconnaissance avec deux ânes, une mule, et un apprenti pour chercher une source pérenne, proche d'une zone plate, vue sur le Sud et les montagnes, située entre Toulouse et Saint-Bertrand, (éloigné à l'époque de cinquante kilomètres), pour créer un réseau d'abbayes. Je visite toutes les rivières, et remonte chaque fois leur cours pour trouver leurs sources....(1)

un mur percé d'une niche en arcade, domine la source (photo d'écran prise en 2010)
dix ans plus tard, aujourd'hui, la source est enfouie sous cet amas de ronces et de lierre
ce mur est donc caché, la partie inférieure aussi
P.Andreoli a bien trouvé, je me rends sur place, sollicite Bruno et Aurélie, qui gèrent les lieux de nos jours, et me trouve devant la situation habituelle : la source n'est pas dans la propriété du Syndicat de communes de St Martory, mais chez l'agriculteur-éleveur voisin. Nous sépare une clôture électrique rouillée, (on ignore toujours si les clôtures électriques sont branchées), et le pré héberge des vaches, qui pour s'abreuver boivent justement dans la fontaine (guérisseuse-ce-serait-les-yeux). M'y rendre est donc à mes risques et périls, tant pis si les vaches me coursent, ce sera une corrida à l'envers, mourir pour une fontaine millénaire, belle mort pour un convers !

heureusement j'ai pris de vieilles chaussures que j'enfonce dans la boue
il faudra chausser des bottes la prochaine fois



eau+bouse de vaches = abreuvoir à papillons = argus bleus et pieris napi

grâce au flash, je réussis cette photo pas mieux


la source alimente le Rieulet, (Rivulus), toujours là

Quand on pense que les terres de l'abbaye réunissaient 10.000 ha, c'était 1000 ans plus tard une vraie villa romaine ! On comprend que les moines, (dont je fais maintenant virtuellement partie), étaient nombreux, on parle de deux cents, et qu'il fallait, après les avoir désaltérés, tous les loger. Vous comprendrez la prochaine fois quand j'évoquerai "les granges".

Vous pensez si l'abbaye cistercienne de Bonnefont a joué un rôle dans le Comminges tant du point de vue religieux qu’artistique, agricole, économique et même politique. Ainsi, elle a prospéré en essaimant d’une part, c’est-à-dire en créant de nouvelles abbayes : Abbaye de Villelongue, de Boulbonne, de Pérignac, de Nizors et deux abbayes en Espagne Fontclar et Labaix. Et d’autre part en construisant des bastides : Boussens, Carbonne, Plaisance du Touch, Lestelle de Saint-Martory... 

...et aussi des granges.

drôles de granges ?

la prochaine fois !


subsiste toujours à l'entrée un lavabo cassé : je le récupère ?
le jardin cistercien est toujours aussi fleuri de fenouil (pour le pastis des moines)

EdF exhibe avec fierté son transfo, dommage que l'on n'ait pas poussé le principe écolo jusqu'à équiper le site de panneaux photovoltaïques cachés 
je dis ça, je dis rien évidemment !

PS (1) : certes, je raconte des histoires, comme je l'ai appris en Provence autrefois. Mais mes histoires sont véridiques : compulsant les Annales de l'Abbaye consultables sur Gallica, gratuitement et depuis chez soi, voici une partie de l'Histoire, la vraie, justement :





demain, la suite !