mardi 1 septembre 2020

Klimt : die Midizin retrouvée !


Comme cette rentrée du 1er septembre est marquée du signe du covid, c'est l'occasion de mettre en avant la médecine, die Medizin en Allemand. Une oeuvre de Klimt disparue, et reconstituée !

C'est donc une copie de Klimt qui faisait il y a quelques jours la une de la presse, car le tableau d'origine a brûlé, mais grâce aux photos, il a pu être reconstitué. C'est une contribution aux soignants, les héros de l'instant, dont le rôle primordial se prolonge avec la présence sournoise de ce covid, rentré, lui aussi, de vacances : on nous presse de nous tester, de nous dépister, de nous isoler, soigner, et réanimer, et à titre de précaution bien que seul dans mon bureau, j'en rajoute dans le principe de précaution en ayant le masque sur le nez !

Nous sommes en 1894. La ville de Vienne décide de décorer le plafond de la Grande salle de bal de l'Université, sur la Ringstrasse. Plus précisément les voûtes de l'Aula magna, le hall d'accueil. D'une manière allégorique, il convient d'illustrer "le triomphe de la lumière sur les ténèbres". C'est tout à fait le programme de Jean le Baptiste à saint-Bertrand de Comminges ! Un peu comme à la Sorbonne, quatre tableaux sont prévus. Ils doivent représenter les allégories classiques d' une université européenne : la philosophie ; la médecine ; la justice ; et la théologie ... voyez que les priorités n'ont pas tellement changé !

Les artistes Gustav Klimt et Franz Matsch sont mandatés pour les réaliser :  

Klimt peindra : philosophie, médecine et justice ; 

et Matsch, la théologie.


à gauche Midizin ; à droite : la philosophie
Les oeuvres de Klimt ne plaisent pas !

La première présentation de la peinture «Philosophie» à la septième exposition d'art de la Sécession de Vienne en 1900 provoque des critiques massives du public, en particulier de la part des professeurs d'université. 

La proposition de Klimt ne répond pas aux spécifications de la Ville ni aux croquis précédemment soumis, mais "montre plutôt une perspective profondément pessimiste et critique de la science" ! 

et puis... toutes ces femmes nues ?


L'exposition du tableau "Médecine" provoque un scandale similaire. 


Je vais tenter de vous commenter : sur le côté droit se trouve un groupe de personnes indépendant, à partir duquel un squelette fait saillie dans la partie supérieure de l'image. Les personnages de ce groupe ont les yeux fermés ou sont représentés accroupis, le dos au spectateur. Un homme tend le bras à une femme nue qui semble endormie sur le côté gauche de l'image, avec un nouveau-né à ses pieds. Elle montre un torse tordu, étend son bras gauche dans le groupe et touche le bras étendu d'une autre silhouette. Les bras tendus créent une connexion - une sorte de cycle - entre la femme de gauche et le groupe de personnages de droite. Au milieu ci-dessous se trouve Hygieia avec un serpent et un bol d' eau de la rivière Lethe dans laquelle boit le serpent.




Dans la préface du catalogue de la dixième exposition de la Sécession, cette image est expliquée : la vie se passe comme un long chemin, de la naissance à la mort, dans une profonde souffrance. Seule Hygeia, l'hygiène va nous donner la guérison : selon Klimt le cycle de la vie ne peut se dérouler sans l'appui constant de la médecine .

En raison des yeux fermés et des postures accroupies des personnages, on peut également supposer que Klimt représente le sommeil comme un agent de guérison, peut-être même de prévention de la maladie. L'artiste peut également faire référence à des rituels anciens tels que le sommeil au temple et la sorcellerie des rêves, dans lesquels on espérait une guérison ou un avis médical.

j'ai oublié mon Allemand en langue principale, et je reconnais l'approximation de ma traduction, j'espère que vous devinerez l'essentiel !

Les opposants à Klimt se plaignent d'une part de la représentation naturaliste de corps nus qui, à leur avis, auraient plutôt leur place dans un musée d'anatomie. D'un autre côté, ils critiquent l'absence des deux fonctions les plus importantes de la médecine : la guérison et la prévention. Comme d'habitude, les médias critiquent aussi l'usage des fonds publics en faveur de l'art, et la liberté artistique, quand il s'agirait en priorité de financer la science universitaire : à quoi sert l'art, quand il est financé par la Collectivité publique, qui devrait axer ses priorités sur l'action davantage que la décoration, je connais ce débat dans la vie publique, il est souvent tranché par la décision : l'art passera après !

Afin d'éviter la polémique, Klimt décide en 1905 de racheter ses tableaux, pour lesquels il avait déjà reçu des avances de l'Etat, avec l'aide de mécènes privés (notamment August Lederer ). 

Par contre, le «symbole de la théologie» de Franz Matsch est toujours la propriété de l'Université de Vienne et se trouve dans la salle de conférence de la faculté de théologie catholique. 

Après toutes ces péripéties, le tableau se retrouve à Immendorf. La guerre survient, Immendorf brûle, avec tout ce qu'il y a dedans, détruisant la Médecine.



et c'est la re-création, the rebirth ! 




on peut même exposer Hygie chez soi :

nous sommes en pleine actualité !




PS : 
https://babone5go2.blogspot.com/2020/01/klimt-le-tableau-retrouve.html

Emilile Floge, la muse, 1910
hic nuda veritas : si la vérité est nue, la vérité est feu...

j'ai bien peur qu'il devienne ringard de parler Français :



The illustration features a quote by German poet, novelist, and composer Leopold Schefer.

"Wahrheit ist Feuer und Wahrheit reden heißt leuchten und brennen"

English translation : "Truth is fire, and to speak the truth means to shine and to burn"

PS : dans quelques jours, je vous montrerai la vérité détruite de Fantin Latour