Les papillons dans la
peinture (suite 2)
La Création
Jupiter, Mercure et la vertu, 1523
Dosso Dossi, de son vrai nom
Giovanni di Niccolò de Lutero ou Luteri (1489-1542) était un peintre italien de
l'école de Ferrare. Il tient son nom de la villa familiale près de Mantoue, la
Villa Dossi. Il choisit un sujet mythologique tiré d’une historiette à l’antique
relatée avec légèreté par Léon Battista Alberti (1404-1472) : Virtu, la
Vertu, prise à parti par la Fortune en plein Champs-Élysées est expulsée de
l’Olympe et contrainte d’attendre pendant un mois que Jupiter lui accorde une
audience, cependant que les Dieux se livrent à des activités passionnantes
telles que la surveillance de la floraison des citrouilles ou la peinture des
ailes des papillons. Mercure, le confident, le complice des entourloupes et le
compagnon de débauche de Jupiter, fait comprendre à Virtu que le roi des Dieux
n’entend pas se quereller avec Fortune, et l’éconduit.
elles se bagarrent en permanence |
la fortune récompense la vertu |
Fortune et Virtu au jardin des Hespérides |
Le traitement du sujet par Dosso
Dossi est surprenant : Jupiter défait de son carquois foudroyant posé à terre,
ayant perdu toute superbe, n’est plus qu’un peintre barbu tout à sa toile,
absorbé par le coloriage des papillons, la palette coincée dans le pouce. Il
faut dire que les papillons d’abord simplement peints à plat prennent soudain
vie, et s’envolent, libres. Mercure ailé, le caducée à la main, fait signe à
Virtu de se taire. Un très large arc-en-ciel, lumineux, bicolore, dans les tons
jaune éblouissant et orangé, surgit derrière le canevas. Le paysage en
arrière-plan est inondé de soleil, peuplé de quelques arbres aux feuilles
jaunes, (difficiles à confondre avec des cucurbitacées) !
La signification de l’histoire est
simple : on assiste à la Création, la création de la Nature et celle de l’Art.
Ne dérangez pas l’artiste qui travaille à son œuvre,
il trouvera vos arguments
subalternes.
Quelques années plus tôt, Dossi
avait fait une autre allusion aux travaux des Dieux, dans son «allégorie de la
musique ». A chaque fois le tableau montre trois personnages. Là, on découvre
les sons émis par le marteau de la forge. La partition est curieuse,
circulaire, en forme de triangle.
Je viens de trouver sur Amazon le
livre de Nicolas Witkovski. Symbole de beauté et de légèreté, mais aussi
emblème de l'âme et de la métamorphose, le papillon a toujours voleté de la
futilité à la gravité, de l'inconstance à la profondeur, et du libertinage à la
métaphysique. Chaque époque lui a donné un sens particulier en respectant
toujours cette ambivalence. La nôtre a choisi de papillonner entre la science
du hasard et le tatouage coquin.
Ce sont les voies multiples et inattendues
du papillon-symbole que retrace cet ouvrage. Des mystiques hollandais du XVIIe
siècle à Jules Michelet et Marcel Proust, de Jérôme Bosch à Salvador Dali et Jean Dubuffet, des folies romantiques du peintre Fuseli aux méditations
savantes du naturaliste Jean-Henri Fabre, de l'antique Psyché à la moderne
Lolita, le papillon a toujours su s'adapter à l'air du temps et offrir un
reflet fidèle de nos angoisses les plus secrètes.
le papillon ?
Un symbole décidément pas comme
les autres, dont l'éternel retour dans la mode, l'art, la science, la
littérature et tous les secteurs de la culture, souligne l'importance
immémoriale.
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