Aux XVIIe et XVIIIe siècles, la
bourgeoisie urbaine acquiert des terres où elle installe des villégiatures
champêtres. Ces nouveaux domaines sont de véritables entreprises agricoles à
l'activité bien définie : élevage, vigne, cultures maraîchères, etc. Ils
comportent la maison du maître et la maison de l'intendant ou régisseur, ainsi
que des dépendances considérables et des logements en grand nombre pour les
ouvriers.
Lorsque la maison du maître est
non pas sous le même toit que la maison du fermier ou du métayer mais nettement
séparée de cette dernière, il s'agit d'une «
bastide ». Nous sommes en Provence, et Dieu sait si Pagnol nous en parle,
de ces bastides ! Ce type, répandu dans le pays d'Aix et la région de
Rognes, se rencontre également à l'extérieur de cette zone, jusqu'à Pertuis,
Jouques et le haut Var.
La bastide, où seul réside le
maître, se présente comme un bâtiment isolé, généralement imposant sous une
couverture à quatre eaux. Sa façade, à l'ordonnance symétrique, est traitée
dans le goût noble de son époque.
Nous ne sommes plus en Provence,
mais dans le Gers. Vous me direz : le Gers, c’est la Provence avant le
tourisme, et l’envahissement d’aujourd’hui par les people. Nous sommes passés
par là, avons goûté aux joies du « bonheur
est dans le pré », et d’ailleurs, il nous suffit d’une heure de
voiture pour nous y rendre, et admirer notre ancienne résidence, « la
maison aux volets bleus », rachetée par un riche anglais qui voulait y
prendre sa retraite. Il n’a rien changé tellement c’était bien fait !
C’est le cas hier soir. Nous avions
rendez-vous dans une ferme fortifiée, à moins que ce soit un ancien couvent, ou même un monastère ? Remis à neuf il y a quinze ans. La nuit, l’ambiance est plus impressionnante encore.
Quand l’autre jour j’entendais Bertrand
Piccard évoquer le ciel dont il est un habitué, il racontait que la religion
avait le tort de rabaisser Dieu au niveau de l’homme. Alors qu’il faudrait
faire le contraire : hisser l’homme au niveau supérieur. La seule
contrainte étant que l’on n’a aucune idée du niveau supérieur ! Il pense
comme moi qu’il existe des forces inconnues. Des mondes parallèles. D’autres
dimensions. Que tout n’est pas perceptible par nos simples sens humains.
Pour moi, il existe des
contemporains qui ne vivent pas dans la même dimension que la nôtre : vu
des Etats-Unis par exemple, la France, le Gers, paraissent comme des mondes
merveilleux. Des élites américaines en perçoivent les richesses étonnantes :
climat ; art de vivre ; art de manger. Art d’élever l’esprit en
cultivant les arts ; la littérature ; et même les jardins. Il suffit
de sauter dans un avion, d’atterrir à Blagnac, un taxi vous mène dans votre
bastide. Vous êtes ailleurs … !
… dans votre bastide du XVIIIè
siècle de forme carrée. La surface bâtie est géante : trente mètres sur
trente, neuf cents mètres carrés de demeure quasi fortifiée. Il faut préciser
qu’à l’intérieur, comme la cour d’une villa romaine, le jardin mesure 225
mètres carrés. Par soustraction, la surface habitable occupe 675 mètres carrés.
Au centre, un jardin marqué par quatre oliviers. Au milieu, il y a forcément une fontaine.
On a fait appel à un tailleur de pierres car on n’en trouvait pas ici, le
tailleur est venu des Baux de Provence, la boucle était bouclée.
On peut y loger à l’aise une cour
pour y passer l’été. C’est un peu plus difficile à chauffer l’hiver. Mais la
vie s’y fait en autarcie : une gigantesque cuisine abrite un vrai four à pain. On peut y cuisiner
des pizza, si l’un des invités est pizzaiolo .
Si un salon est plein on va dans le second. La salle à manger était celle que
pendant un moment les moines se réservaient. Quant aux chambres, il y en a des
tonnes. La décoration est telle que la rêvent les américains : meubles Renaissance. Lustres de fer forgé. Tableaux d'ancêtres aux murs...
Moment magique hier, nous étions
rassemblés car parfois, un même lieu peut réunir des citoyens du monde :
un Irlandais, habitant Londres, mais fréquentant le secteur à mi-temps. Avec easy-jet,
il n’a aucun problème pour voyager ! Des amis du Jura, profitant de l’été
indien, après tout, ils n’ont que huit cent Kilomètres à parcourir en voiture.
Nous étions les plus proches.
Il y a longtemps que le destin ne
nous avait pas réunis. Nous nous sommes retrouvés, en un lieu situé dans un
monde parallèle. A dix-neuf heures trente toutefois, le Maître de maison Edward se
lève : il est 14 heures dans son bureau (d’avocat américain). Il a des
ordres à donner. En plus, il travaille à distance. Je parierais qu’il gagne de
l’argent pendant le souper ! Quel que soit le décalage horaire. Nous sommes rentrés tard, de nuit, (en pensant à Saint-Exupéry) par les petites routes tortueuses, guidés par Paulette, la GPS, géolocalisés par quatre satellites.
Au matin, c'est comme si on avait rêvé !
Voici ce que l’on peut percevoir (des mondes parallèles)
en utilisant les données de l’Institut Géographique national.
C’est (un peu) magique !