lundi 18 janvier 2021

Coronavirus et mégapoles par Michel Lussault


Faut-il vivre en ville comme nous le conseillait il y a peu le Président ? Mieux encore, dans une mégapole ? Toulouse par exemple : une ville qui fabrique des avions ? La ville connectée aux villes du Monde est-elle bien le lieu de la vie en société, de l'emploi, du confort, de la synergie avec son environnement ? 

Jusqu'à maintenant, la réponse était OUI ! Mais le virus a fichu tout cela en l'air, pire, avec l'augmentation de la population mondiale concentrée dans des mégapoles, avec le risque de zoonoses dues à notre proximité avec les animaux autrefois sauvages mais qui eux aussi co-habitent dans nos mégapoles, il risque d'être difficile de vivre dans les villes traditionnelles ?

réponse de Michel Lussault, géographe à Lyon

spécialiste de la spatialité


 Je l'entends ce jeudi 14 janvier sur Europe 1, et retrouve cet interview d'Olivier Thibault Agence France Presse, le voici intégral : Coronavirus, un agent de la mondialisation surpuissant

PARIS — Comment un organisme aussi minuscule qu’un virus a pu mettre à plat l’économie mondiale, figer des mégalopoles entières, s’immiscer dans l’existence de milliards d’humains? Pour le géographe Michel Lussault, la surpuissance de SARS-CoV-2 est le fait de la mondialisation.

Michel Lussault est professeur à l’ENS-Lyon, directeur de l’École urbaine de Lyon et auteur de L’Homme spatial. 

Q Pourquoi des pandémies modernes plus mortelles comme les grippes de 1957 et 1968 (plus d’un million de morts chacune) n’ont pas provoqué la même paralysie du monde ? 

R «Tout simplement parce que ce qui a changé depuis 60 ans c’est le monde lui-même. Nous sommes en train de nous rendre compte que ce que nous appelons le monde est un même espace relié et traversé par des communications et des connexions intenses. 

Une petite chose minuscule en contaminant le premier patient en Chine fin 2019 a provoqué la plus grande paralysie mondiale jamais constatée dans l’histoire de l’humanité. Il y a disproportion entre la taille et la sphère d’action du virus, qui travaille à des échelles infinitésimales, et la panique et paralysie globales qui se sont emparées du monde.» 

Q Pourquoi une telle disproportion ? 

R «La principale explication est liée au fait que depuis 60 ans la mondialisation a bouleversé la planète Terre. La raison de l’évolution de cette petite contagion locale en une crise globale, c’est ce que j’appelle dans mon jargon l’hyper-spatialité, c’est-à-dire la mise en lien de toutes choses et toutes personnes. 

Avec mon téléphone portable, je suis capable d’être en lien avec toute personne ayant un téléphone portable, c’est-à-dire cinq à six milliards d’individus. Une marchandise est en lien avec toutes les autres à travers les systèmes de communication. 

Ce qui est frappant, c’est la rapidité de la pandémie. Il a fallu moins d’un trimestre pour que le monde s’arrête. C’est lié à l’hyper-spatialité, c’est-à-dire la généralisation des liens et connexions entre toutes les parties qui composent le monde: la mobilité des Chinois, des Européens et des Américains pour des raisons économiques et touristiques. Ce que le virus montre c’est la carte des mobilités et la carte des connexions économiques et touristiques. Aujourd’hui, un porteur du virus peut parcourir des milliers de kilomètres et diffuser la maladie à des dizaines de personnes. 

Avec les systèmes d’information en continu et les réseaux sociaux, la moindre nouvelle est désormais une nouvelle planétaire. Incontestablement, la mise en scène et le suivi en temps réel dans le monde entier de la pandémie amplifient considérablement son impact. 

Les gens qui deviennent très malades du coronavirus font une surréaction immunitaire avec l’orage de cytokine. Si on était adepte des métaphores, on pourrait dire que via l’information en continu et les réseaux sociaux, le monde connaît une surréaction immunitaire. Notre orage de cytokine à l’échelle mondiale c’est la prolifération de l’information. On est bombardés d’informations et le système monde est en train de surréagir par rapport au trouble qui le saisit.» 

Q Comment expliquer que le virus soit capable d’avoir des effets à des échelles de grandeurs si différentes ? 

R «Au moment où vous êtes malade à l’échelle de votre corps, vous êtes confinés à l’échelle locale de votre domicile. Votre ville, elle-même, est confinée. Votre pays est confiné. L’Europe est concernée. Et on voit bien que les relations internationales sont bouleversées. Plus de 4 milliards de personnes sont confinées et la planète tout entière est concernée. 

Tout est intégré par cette épidémie, du plus grand espace qu’est la Terre jusqu’au plus petit espace qu’est celui de la confrontation de votre corps avec le virus. C’est très étonnant cette synchronicité. Là encore, les informations et réseaux sociaux y sont pour quelque chose. 

Pour ne pas comprendre ce qui se passe à toutes ces échelles en même temps, la seule solution c’est de décrocher des réseaux informationnels et se mettre dans un double confinement : je reste chez moi et je coupe toute relation avec l’extérieur.»


Je dois dire que pour moi il existait et il existe toujours une menace insidieuse aussi préoccupante que le virus, et ses cousins qui risquent à tout moment de s'imposer à notre Société : je vous ai à plusieurs fois parlé du manque d'eau potable menaçant la planète : il y a treize ans, méfiant de la situation de Toulouse traversée par une Garonne alimentée par les glaciers des Pyrénées en train de fondre, j'avais décidé de migrer plus au Sud, dans une ruralité préservée, en décidant de choisir une ville moyenne : les services que Michel Lussault désigne par "la ville du quart d'heure", où dans un périmètre à pied d'un quart d'heure on trouve les services indispensables (on dit désormais de première nécessité) : pharmacie ; médecin ; dentiste ; super-marché ; cinéma ; théâtre ; distributeur d'essence et d'argent...(je classe par priorité). J'ajoute marché de l'immobilier bas : grandes surfaces d'habitation pour rester confiné confortablement ; parcours de santé pour pratiquer l'activité physique sur le conseil des médecins. Proximité d'autoroute, d'aéroports, de frontière avec une nation voisine, plutôt méditerranéenne que nordique ! Proximité des lieux de production alimentaire végétaux et animaux, en vente directe.

Vous avez deviné que la capitale du Comminges offre de vraies raisons objectives de contourner les contraintes des mégapoles : à quoi sert d'habiter une mégapole, quand les services qui font son intérêt sont fermés par la veille sanitaire ?

on est plus adapté dans une petite-ville-de-piémont 

au coeur d'une région historique

conquise par les Romains !


on vit confortablement dans le Comminges : 

la faible démographie a du bon ! 

et, quand nous serons vaccinés,

 on accueille volontiers

les Toulousains vaccinés privés d'air !


PS : théoriquement, je suis le dernier vacciné en fin d'après-midi :

Va-t-il rester une dose ? Sera-t-elle restée au froid ? Sera-t-elle le reste d'une dose de 5 transformée en dose de 6 ? Pfizer... quand tu nous tiens !

la prévention par la vaccination est un parcours à suspense !


Je ne puis m'empêcher de penser à Uğur Şahin, Christoph Huber et Özlem Türeci. Cette dernière, comme son prénom ne le dit pas, est la femme. Je vous rappelle que Uğur Şahin et Özlem Türeci sont deux médecins et chercheurs d'origine turque qui avaient créé précédemment, en 2001, Ganymed Pharmaceuticals, une société développant des anticorps dans le cadre de la lutte contre le cancer, avec, déjà, le concours de Christoph Huber, oncologue, immunologue, chercheur et professeur à l'université Johannes-Gutenberg de Mayence.

Je suppose et j'espère qu'ils auront le Nobel de médecine : que ferait-on sans eux ?