dimanche 4 décembre 2022

Le "suicide de Sapho" (par A.Gros) expliqué par un psy


je savais bien que je devrai un jour me faire psychanalyser

ce jour est arrivé ! 

je m'efforce en amateur de comprendre une oeuvre d'Art, mais si je suis bon observateur

je suis mauvais interprète des situations

alors que des Psy décryptent les oeuvres d'art !

enfin !


je tombe sur ces lignes : enfin !

je tombe sur me mythe de Psyché : 

enfin !


Aphrodite et Psyché représentent deux types de femmes : je l'avais deviné !

comme "l'art est indispensable à l'homme" : je l'avais deviné aussi !

mieux encore : "l'homme ne peut être homme sans art"


et "pour faire sens", voilà que je tombe sur des peintures de Gros

vous avez oublié Antoine-Jean Gros (1771-1835)  ?

le peintre de Napoléon !

la bataille des Pyramides, 21 juillet 1798 !

les pyramides sont derrière !

on le dit néo-classique et pré-romantique, on ne le dirait pas !

je vous montre une autre oeuvre, mythologique celle-là

évidemment je l'ai encore une fois trouvée sur un site anglo-saxon


on se souvient vaguement de Galatée, elle est poursuivie par le géant-cyclope-Polyphème que l'on distingue derrière, soufflant dans sa corne

il habitait une grotte, d'où il gardait ses moutons

il n'apprécie pas, mais pas du tout, que Galatée se réfugie dans sa grotte

encore moins que le berger Aci, amoureux de la belle,  se réfugie chez lui

Galatée effrayée n'y prend pas garde, mais Aci protège son sein (gauche) de sa main gauche (à lui)

(heureusement, Aci s'est enrubané d'une cape rouge pliée qui cache son ... émotion)

une émotion assez compréhensible bien que la scène montre le danger

j'aimerais savoir ce qu'en pense mon psy ?

"Les deux figures ont été modelées sur d'anciens prototypes sculpturaux : la pose de Galatée ressemble à celle "d'Aphrodite accroupie", tandis que celle d'Aci suggère l'attitude d'un "Hercule combatif". La nudité idéalisée des figures et les robes flottantes sont typiques du style néo-classique du peintre".

Mon psy s'est penché sur Sapho :

Prince des digressions, je dois d'abord vous parler de l'ile de Leucade en Grèce


c'est là que selon la légende, Sapho s'est précipitée dans la mer, mettant fin à ses jours

"Au midi de l’île de Leucade, dans la mer Ionienne, était un cap dont le pied se hérissait de brisans. Une tradition conseillait aux amans malheureux de se précipiter de ce cap dans la mer ; ceux qui ne périssaient pas étaient guéris de leur amour. — (Émile Deschanel, Études sur l’antiquité) ...

... Trois jours plus tard, j’étais sur le balcon de ma chambre dans un autre immeuble résidentiel, un bâtiment sur le front de mer d’un village baptisé Nydri, sur l’île de Leucade. — (Jonathan Coe, Billy Wilder et moi, traduction Marguerite Capelle, Gallimard, 2020, page 99) ...

...Désespérant d’être désormais heureuse avec lui et sans lui [Phaon], elle [Sapho] tenta le saut de Leucade et périt dans les flots. — (Barthélemy, Voyage du jeune Anarchasis en Grèce, chapitre III)

c'est le mythe de Sapho, et "Le saut dans le temps", car en 1801, Antoine-Jean Gros présente Sapho se précipitant du rocher de Leucade, une commande du général Dessolles. Il a trente ans et sa toile est une prémonition.... car lui aussi, alors qu'il a connu la gloire, se suicidera abrégeant une vie qui était pleine de gloire : le 25 juin 1835, il se jette dans la Seine aux environs de Meudon. On retrouvera dans son chapeau les lignes suivantes : « las de la vie, et trahi par les dernières facultés qui me la rendaient supportable, j’ai résolu de m’en défaire ».

 son dernier tableau est à Toulouse aux Augustins ! (1)

Le promontoire de Leucate, prémonitoire de Meudon ?



voici l'interprétation de Serge-Henri Saint Michel :

le psy

"Sapho s’élance, s’appuie sur sa jambe gauche, le pied assuré et nu ; elle semble s’être hâtée, son étole caressant le rocher sous l’effet du vent, celui qui fait vaciller la flamme du phare, qui crée le clapotis au pied de la falaise et brosse les nuages, qui anime la scène, lui apporte un souffle de gauche à droite (qui vient étonnamment du sud), avant que le vent de l’inspiration de Sapho ne soit emporté dans un mouvement inverse. 

Le pied dans l’œuvre

"Paradoxalement, un seul élément est peint figé, dans un entre-deux temporel : Sapho, figurée à l’instant où tout devient irréversible, sans que rien ne soit encore accompli ; Sapho dans son Kaïros, similaire à celui de Bonaparte au pont d’Arcole. Et le temps s’arrête, mêlant équilibre et déséquilibre, posant la question de l’après, bien que nous en connaissions déjà l’issue. 

"Dans ces mouvements et cet arrêt, Sapho est le point d’équilibre, de concentration du regard, mais aussi de tensions et de paradoxes…. 

"Tension entre le soleil de la vie qui se couche et le phare, feu de la vie que l’on entretient, accrue par le sens de lecture inversé dans lequel le passé est à droite. Antoine-Jean Gros nous inviterait-il à réfléchir au sens de la vie ? Ou au personnage a-normal qu’est Sapho ? 

"Tension entre les deux feux, à équidistance de son sexe, mais qui la placent sur une pente qui bascule. 

"Tension encore entre la beauté de la servante de l’amour idéal, qui tient une lyre en hommage à Apollon, révélée par une robe diaphane, et la mort. Et si cette robe était déjà un linceul ? 

"Tension enfin entre Eros et Thanatos… rappelée par une atmosphère sombre, des teintes funèbres, une palette réduite, dans laquelle le blanc, le Leukos, domine finalement. Comme la falaise vertigineuse de Leukade d’où Sapho, musicienne aux mœurs qualifiées de dissolues et en même temps vestale accomplie des lettres, se précipite. 

"Ses yeux sont déjà fermés pour l’éternité ; sa résolution a été prise en femme libre, autonome, en droite ligne de la vie qu’elle a menée, au gré de ses envies, de ses désirs. Sapho, en se suicidant, reste libre. Libre de choisir de mourir et de choisir le lieu et le moment, hic et nunc, en toute cohérence".

que voudriez vous que j'ajoute ? 

rien du tout, je deviens analysant, et j'entame une cure !

et mon nouveau Psy me fait réfléchir bien entendu

car il ajoute avec simplicité, en s'appuyant sur Guernica

il faut lire le texte entier, en voici la fin :

car des oeuvres choquantes a priori ont justement l'intérêt de susciter la réflexion :


promis, je ne publie plus rien

sans mon psy

https://institutfrancaisdepsychanalyse.com/lart-comme-necessite-approche-psychanalytique/


et je retrouve mon psy sur facebook






PS (1) : allez aux Augustins, voir "Hercule écrasant Diomède"


L'article continue : "Cette œuvre (le suicide de Sapho) a 20 ans d’avance sur les romantiques, classant Antoine-Jean Gros dans les pré-romantiques, comme Chateaubriand, car elle propose une originalité de style et de personnalité, s’appuie sur la poésie qui détient une place-clé dans la philosophie romantique, parce qu’elle affiche une réelle sensibilité, et réhabilite les passions et le Moi. 

"Sapho se précipitant du rocher de Leucade a aussi un siècle d’avance sur Freud. Le suicide de Sapho s’explique-t-il par sa sexualité ? Par un amour déçu ? Par un amour contraire aux relations qu’on lui prêtait alors ? Par des injonctions sociales ? Comme si Sapho, ne pouvant vivre avec sa double facette, était « victime » de son destin, si cher aux Grecs depuis Jason et Œdipe, permettant ainsi à la morale d’être sauve : l’homosexualité est mortifère et les dieux sont là pour rappeler la nécessaire vertu, par la mobilisation de symboles. 

"Vertu… Diomède de Thrace, connu pour nourrir ses chevaux avec la chair de ses hôtes, sert d’illustration à ces interdits mythologiques. Il sera demandé à Hercule de dérober ses chevaux pour son huitième travail et de les ramener à Argos.

 Antoine-Jean Gros envoie en 1835 au Salon "Hercule écrasant Diomède". 

ce sera sa dernière contribution.


Renée Vivrien poursuit avec des polèmes :



John Reinhard Weguelin (1849-1927) Lesbia