Il n’y a pas que la Bible, l’Art,
la mythologie… il y a l’aventure moderne, à la portée de tout un chacun,
quand l’adversité pousse des individus, a priori isolés, à bousculer les
montagnes : nous venons de voir le film « tu vivras ma fille », et j’ai récolté pour vous
quelques liens permettant d’apprécier ce qu’est devenu Lysogène, créée il y a 9
ans par une maman… qui voulait sauver sa fille !
Voilà l’Histoire, (je mets un H majuscule) que raconte la
revue Handicap, dont je vous communique l’interview ci-dessous : Ornella, 12 ans,
est atteinte du syndrome de Sanfilippo. Une maladie orpheline pour laquelle sa
mère, Karen Aiach, a engagé des recherches en fondant Lysogène, une société de
biotechnologie spécialisée dans la thérapie génique. Le film « tu vivras
ma fille » montre la réaction de la maman, Karen Aiach : elle crée la
startup Lysogène, à la barbe des laboratoires pharmaceutiques frileux !
Karen
Aiach, directrice et fondatrice de la société Lysogène, le 27-09-2017
Femme d'affaires émérite, ex diplômée ESSEC, ex-consultante chez Arthur Andersen, ex fondatrice d'un cabinet de conseil auprès d'organismes bancaires, habitante de Rueil-Malmaison, Karen
Aiach est la mère d'Ornella, 12 ans, atteinte du syndrome de Sanfilippo. Pour
cette maladie génétique rare, il n'existe aujourd'hui aucun traitement. En
2009, Karen fonde, avec son mari, la société de biotechnologie Lysogène à Neuilly afin
d'engager la recherche et de mettre au point un dispositif de thérapie génique
(qui fait appel à l'ADN comme produit pharmaceutique) capable d'agir sur cette
pathologie. En 2014, elle réussit une première levée de 16,5 millions d'Euros. Début 2017, Lysogène réussit son introduction en bourse (Euronext) avec une levée de fonds de 22,6 ME. Grâce à la mobilisation d'une équipe de chercheurs issus de
différents pays, Ornella a bénéficié de ce premier traitement en 2011. Une
opération bénéfique, principalement sur le plan comportemental. Karen Aiach,
toujours à la tête de Lysogène, revient sur ce parcours.
Handicap.fr : Qu'est-ce que le syndrome de Sanfilippo ?
Combien de personnes en sont atteintes ?
Karen Aiach : Environ 4 000
enfants dans le monde sont diagnostiqués avec cette maladie. Ils sont peut-être
plus nombreux en réalité. Comme l'espérance de vie est d'à peu près 15 ans,
elle ne touche que les enfants. Cette maladie d'origine génétique ne peut pas
être anticipée dans une famille s'il n'y a pas déjà eu un cas. Elle se
caractérise surtout par une atteinte sévère du cerveau de l'enfant. En
apparence, le développement semble normal durant un ou deux ans. Il y a,
ensuite, régression, notamment sur le plan de l'acquisition des connaissances,
de la marche et de la propreté. La maladie s'accompagne également de troubles respiratoires,
digestifs et cognitifs dès l'âge de trois ans. À partir de cinq ou six ans, les
enfants touchés perdent le langage, présentent des symptômes d'hyperactivité et
de gros troubles du sommeil. Du fait de cette hyper sollicitation de
l'organisme, les neurones fatiguent ; ce phénomène de dégénération s'amplifie
avec le temps. Le décès survient généralement des suites d'une infection
respiratoire.
H.fr : Quand Ornella a-t-elle été diagnostiquée ?
K.A : Ma fille avait à peine six
mois lorsque nous avons été alertés. Elle a été diagnostiquée sur la base d'un
morphotype, c'est-à-dire avec des traits particuliers ; les enfants touchés par
cette maladie ont généralement les sourcils épais, le nez un peu rond et les
lèvres plus épaisses que la normale. Des signes cliniques annexes ont alerté le
pédiatre, qui a envoyé Ornella dans un service spécialisé. Le diagnostic a donc
été rapide.
H.fr : Le personnel médical s'est tout de suite montré
pessimiste.
K.A : Il n'y avait aucun espoir.
En tant que parents, nous avons évidemment vécu une première période
traumatique. Nous apprenions que notre enfant allait souffrir, mourir
prématurément… Mon mari et moi ne voulions pas nous déclarer battus avant
d'avoir essayé de comprendre mieux les caractéristiques de la maladie et de
voir si l'on pouvait aider la recherche. Il n'était pas question d'accepter la
fatalité. C'est ce qui nous a permis d'avoir la foi suffisante. Nous avons
essayé de comprendre le protocole, avant de mettre sur pied Lysogène début
2009.
H.fr : Comment avez-vous vécu ces premières années à la
suite du diagnostic ?
K.A : De la naissance d'Ornella,
en 2005, jusqu'au moment où elle a reçu le produit de thérapie génique, nous
avons vécu les pires années de notre vie. Ornella ne dormait pas, elle était hyperactive,
agressive parfois. Nous avions heureusement l'aide de nos parents et
d'associations de patients. Ornella a aussi passé 4 ans à l'école maternelle
avec une AVS (auxiliaire de vie scolaire), indispensable ; l'Éducation
nationale avait choisi d'en faire un « cas ». Je travaillais beaucoup avec la
directrice et les enseignants pour montrer à tous l'exemple de ce que peut être
la différence. Ornella a ensuite été prise en charge au CESAP (Comité d'études,
d'éducation et de soins auprès des personnes polyhandicapées) Les Cerisiers de
Rueil-Malmaison (92). Elle est aujourd'hui au centre médico-social de la
Fondation Saint-Jean-de-Dieu à Paris (15e), entourée de spécialistes du
polyhandicap. Dans cet IME (Institut médico-éducatif), tout est fait pour que
les enfants gardent du lien avec les autres mais aussi avec eux-mêmes.
H.fr : Quel parcours avez-vous suivi avant de fonder
Lysogène ?
K.A : Mon mari et moi ne
connaissions rien à la biologie ou à la neurochirurgie. Nous avons donc entamé
des recherches pour poser les bases. Cela nous a pris environ trois ans. Il a
également fallu solliciter des investisseurs, mobiliser des équipes de
chercheurs… Certains ont été géniaux, d'autres beaucoup moins… Chose
intrigante, depuis que nous avons fondé Lysogène, plusieurs groupes
pharmaceutiques ont manifesté leur intérêt, notamment en Angleterre et aux
États-Unis.
H.fr : En quoi consiste ce dispositif de thérapie génique
mis au point par votre société ?
K.A : L'opération a eu lieu en
une fois. Trois autres patients en ont bénéficié en 2011 et en 2012, à titre
expérimental. Concrètement, elle consiste à déposer dans le cerveau du patient
des copies fonctionnelles d'ADN, par milliard, pour coder et exprimer l'enzyme
manquante. C'est une méthode très élégante sur le plan biologique car elle
implique d'imiter la nature sans modifier l'ADN du patient. En clair, on dépose
des gènes, des usines à protéine, et il n'y a pas besoin de revenir dessus car
les enzymes en produisent elles-mêmes par la suite.
H.fr : Quels bénéfices cette opération a-t-elle apporté à
Ornella ? Comment vit-elle aujourd'hui ?
K.A : Elle est beaucoup plus
calme qu'avant. Pour nous, il y a réellement eu un avant et un après.
Après l'opération, Ornella a retrouvé le sommeil et, par conséquent, nous
aussi. Dans l'ensemble, son attitude s'est stabilisée. C'est une petite fille
souriante, qui a très bon appétit même si elle ne peut pas se nourrir seule
(elle n'a jamais été autonome). Elle aime beaucoup sortir et être entourée au
sein de son IME.
H.fr : Vous êtes toujours à la tête de Lysogène. D'autres
patients s'apprêtent-ils à bénéficier de cette nouvelle thérapie ?
K.A : Depuis ces premières
expériences, nous avons tenté d'améliorer le produit pour avoir des vecteurs
capables d'exprimer la protéine nécessaire. Nous avons travaillé pour aboutir à
ce nouveau produit, une version améliorée du premier. Courant 2018, nous
comptons l'administrer à une vingtaine de patients en Europe et aux États-Unis.
Nous développons par ailleurs des études précliniques en vue d'un autre produit
qui vise cette fois-ci la gangliosidose à GM1, une maladie orpheline rare
affectant le cerveau et la moelle épinière. Tout dépendra de nos financements
mais nous souhaitons, à terme, étendre notre portefeuille pour élargir la recherche
à différentes maladies neurodégénératives.
H.fr : La maladie de Sanfilippo a
été découverte en 1963. Comment explique-t-on qu'aucune recherche n'ait été
entamée avant la naissance de Lysogène ?
K.A : La rareté de la maladie, sa
complexité et le fait qu'elle touche uniquement des enfants constituent trois
raisons. Il faut parfois l'intervention de quelqu'un qui a une raison
particulière de s'impliquer pour que les lignes bougent… La grande industrie
pharmaceutique commence à avoir des problèmes de brevet et s'intéresse de plus
en plus aux maladies rares. Disons qu'elle les ignore un peu moins qu'avant.
Les plus intelligents comprennent qu'en investissant dans les maladies rares on
peut créer de la valeur en générant de l'innovation car nous sommes obligés
d'innover lorsqu'aucun traitement ne fonctionne. Nous regrettons seulement de
ne pas être plus soutenus, malgré des investisseurs sérieux. Il existe encore
un gouffre entre les petites entreprises et la grosse industrie pharmaceutique
"Aujourd'hui, Lysogène est
la seule société au monde dans le domaine de la thérapie génique à entrer en
phase 3 dans une maladie dégénérative"
Lysogène est une société de
biotechnologie qui cible les maladies rares, notamment le syndrome de Sanfilippo.
C'est actuellement la première société dans le domaine de la thérapie génique à
passer en phase 3 dans une maladie génique touchant l'enfant et l'adulte. Elle
pourra alors préparer la commercialisation de ses produits. Cotée en Bourse
depuis février 2017, Lysogène arrive actuellement au bout de sa trésorerie
disponible et prévoit de lever des fonds pour financer ses activités. Comment
compte-t-elle procéder ? - Avec: Karen Aiach, fondatrice de Lysogène. - Good
Morning Business, du jeudi 26 juillet 2018, présenté par Stéphane Soumier, sur
BFM Business.
l'interview de Michel Zerah
Handicap :
https://www.handicap.fr/
"du consulting à la thérapie génique"
ex spécialiste en management, Karen a choisi 5 femmes
sur les 7 responsables de Lysogène
http://www.lefigaro.fr/entrepreneur/2017/02/15/09007-20170215ARTFIG00084-karen-aiach-du-consulting-a-la-therapie-genique.php |
ex spécialiste en management, Karen a choisi 5 femmes
sur les 7 responsables de Lysogène