mercredi 31 décembre 2014

Conte de Noël


c’est comme si c’était vrai !

… même si toute ressemblance avec un cas vécu serait bien entendu ...fortuite … !

C’était une petite fille. Une toute petite fille, mettons trois ans maxi. Toutes les semaines, le grand-père l’amenait à la piscine : c’était la mode des bébés nageurs : le bébé nage naturellement pour autant qu’on le mette (prudemment) dans l’eau, et le chic consiste à l’amener à la piscine, pour qu’il s’accoutume très tôt. On lui apprend que si  l’eau rentre dans la bouche, il faut la recracher et non pas l’avaler. Il a su faire ça ! (je vous ai déjà dit qu’il s’agissait d’une fiction).  

Il faut que le grand-père soit jeune lui aussi puisqu’il doit se mettre à l’eau je veux dire en maillot. Les parents travaillent, il faut bien un tiers de confiance pour s’occuper du bébé.  Indispensable de surveiller attentivement le-dit bébé. Agréable, ça oblige à se mettre à l’eau, il y a de pires boulots. Agréable, des mamans (qui ne travaillent pas ce jour-là) s’occupent elles-même de leur propre bébé. Une meuf qui s’occupe d’un bébé dans une piscine, quand on est tiers de confiance, on surveille du coin de l’œil quelquefois que la maman pensant à autre chose (c’est une femme après tout), oublie son bébé et qu’il boive la tasse ? Il faudrait alors un grand-père-ressource tout proche pour sauver le bébé ? (le second) et lui apprendre à recracher ? De surcroit, le spectacle (de la maman) peut être fort agréable et constituer s’il en était besoin (il n’en a pas besoin) une compensation (esthétique) motivante pour le (jeune) grand-père-ressource.

C’était il y a longtemps, dans une vie d’avant

Après le bain, quoi de plus normal que de boire un café dans la rue passante du coin (la « rue de la soif »). C’est jour de marché, pas difficile d’acheter une barquette de framboises. Le bébé-petite-fille va l'avaler entièrement une par une en rigolant. On écoute la musique tzigane. Moment délicieux, souvenirs heureux.

Les parents sont jeunes, pas si longtemps qu’ils étaient étudiants à l’Université. Lui a choisi les langues étrangères appliquées ; un cursus inventé autrefois par l’Université pour développer ses dons en littérature et en langues (il est bilingue anglais, talent qu’il cultive depuis toujours en lisant dans le texte). Il a bourlingué dans toute la France, a passé le bac en Corse. Université de Nice, fac de droit (il s’y connait en droit). Habitude de prendre l’avion, l’autocar des Corses. Adolescent, il a suivi la famille dans de nombreuses pérégrinations à travers la France. C’est difficile pour les enfants les mobilités géographiques des parents : ils doivent suivre, et changer d’établissement scolaire au gré des mobilités quinquennales. Ils arrivent étrangers en Corse. Etrangers à Nice où on les prend pour des Corses. Etrangers à Montpellier où on refuse la validation des diplômes niçois. Puis étrangers en Occitanie. Enfin, va savoir pourquoi, ils se retrouvent dans l'Ouest loin de toutes racines, mais ont-ils des racines ? (oui, il retrouve ses ancêtres capitaines de clippers).

Bref cette étrangeté, à l’âge d’être étudiant, fait que l’on tombe forcément sur … une étudiante. Un étudiant trouve l’amour en rencontrant une étudiante. Vous voyez ce que je veux dire. L’étudiante trouve son premier amour en rencontrant son premier étudiant. C’est basique. Comme les femmes sont plus intelligentes que les mecs, elle se dit (l’étudiante) que le mec en question pourra (qui sait ?) devenir le père de son enfant. Elle n’y pense pas de suite mais ça vient un jour. Et même que si, plus tard (bientôt en réalité) il réussissait dans la vie, il pourrait faire bouillir la marmite. Elle est comme ça. Aujourd’hui encore et toujours. Le jugement mentionne : « il (l’actuel conjoint) bénéficie de revenus plus que confortables » (sic).

L’étudiante en question a une enfance étrange, négligée par ses propres parents, elle a vécu les premières années de sa vie chez ses grand-parents. Le rôle des grand-parents dans ce conte (de Noël) est décidément actif. Intelligente, elle a poursuivi ses études dans la capitale, et se retrouve en fac. Vous savez, ces cours plus ou moins fumeux, on fait du Tourisme. De la littérature. Des machins assez généraux, dont on imagine difficilement qu’ils débouchent sur une situation professionnelle réelle.

Un moment, l’étudiant se trouve en stage Erasmus à Dublin : il y développe ses dons pour l’anglais. Et se retrouve professeur de Français à Dublin : le rêve européen quoi ! Sur place, il y a des irlandaises. Il  y en a des rousses couleur du feu.  Redhead ils appellent. Il y en a qui vous descendent leur pinte de Guiness comme ça, d’un trait ! Vous devinez qu’un étudiant français faisant irruption dans ce milieu glacé (les chambres d’étudiants ne sont pas chauffées) suscite instantanément de la part d’étudiantes soucieuses de leur avenir des passions immédiates. J’entends amoureuses, vous aviez bien compris. Pour être plus précis, la chambre (d’étudiant) n’a qu’un lit (étroit). Le chauffage est censé se faire au feu de tourbe, et il n’y a plus de tourbe. Quoi de plus légitime que de réchauffer une irlandaise rousse quand elle débarque glacée en vous disant (en anglais) :  « help, I’m frozed » ?

L’étudiante (française) est comme toutes les femmes dotée d’un flair supérieur : elle débarque à Dublin, et re-fait le coup du poêle sans tourbe. L’étudiant doit choisir (il eût préféré devenir polygame). Bref, les deux Français de retour au pays décident de parcourir un bout de chemin ensemble. Libres penseurs, nous sommes des années avant le mariage pour tous, ils refusent toute union officielle, notamment le mariage fût-il civil. Sauf que d’une part, ils achètent un appartement, et que la banque les lie pour la durée d’emprunt c'est-à-dire 15 ans pour le meilleur et pour le pire, à savoir rembourser 180 mensualités. Et que (le père restera toujours subordonné à la mère dans ce cas plusieurs fois millénaire) ils « font un bébé », et voilà mon bébé nageur, qui est une bébé, une petite fille qui adore les framboises crues, et sait désormais cracher dans l’eau au lieu de l’avaler.

Le temps passe. Le papa travaille. La maman reprend des études, mais, difficile de s’investir totalement dans la vie étudiante quand on a une famille. Elle est loin de ses racines. Son caractère exigeant s’affirme. (Pour tout dire, elle est bi-polaire, avec un pôle hystérique). Elle est in-vi-va-ble, il la quitte. Elle ne s’en remettra jamais. Vengeance.


Dans ces cas-là se reproduit indéfiniment le phénomène classique des jeunes couples qui se séparent : on vend l’appartement, et on rembourse l’emprunt. Le mec class’ laisse tous les meubles, les cadeaux des grand-parents et le solde du compte commun. La meuf récupère tout ce qu’elle peut,  et file illico presto à huit-cents kilomètres rejoindre ses grand-parents, la petite fille sous le bras. Tant pis si elle abandonne le grand-père nageur. Le père doit être puni pour le reste de sa vie : il ne doit plus revoir sa gosse.

J’entends Valérie (dans un autre genre) affirmer au bord de l’hystérie :

« Je ne fais pas ça pour le détruire…

…mais, pour me re-construire » !


La situation devient banale. Les tribunaux jugent plusieurs fois par jour ce genre de situation. Des pères escaladent des grues et déploient des banderoles pour tenter d’être traités avec parité dans ce cas où la garde est confiée ... à la maman. Le père est taxé d’une pension mensuelle pendant 14 ans (ça remplace l’emprunt initial). Le papa voyagera tous les dimanches en parcourant 800 Km pour voir sa fille. Huit-cents Kilomètres aller, même distance au retour ! Comme il ne le fera pas, il sera accusé de désinvolture naturellement. Toujours pendant 14 ans, il commandera les billets d’avion pour permettre à sa fille de passer les vacances chez lui. La petite fille prendra l’avion comme son père l’avait fait auparavant. Que dis-je les vacances : les demi-vacances, ou les vacances par alternance car la propriété de la mère sur l’enfant est bien établie : elle a l’autorité parentale :

Comment par exemple punir une (petite fille) quand elle le mérite ? (elle a oublié son téléphone ; ses devoirs…) : en la privant de ce qui lui est le plus précieux. Exemple, son ordi. On ne voit plus aujourd’hui un(e) ado sans tablette ni ordi, a fortiori quand l’ordinateur a été financé par le Conseil Général et remis à l’enfant ! L’ordi permet de communiquer avec ses amis. Il permet de suivre les cours à distance au cas (fort improbable) d’absence de la prof d’espagnol (tombée dans une dépression chronique). Les cours de maths en anglais sur internet qui pallient l’absence de prof de maths (dépressif). La punition ? Confisquer l’ordinateur, la fille sera bien empêchée de lire et d’entretenir son anglais, si elle avait une moins bonne note, cela lui apprendrait ainsi à mieux se tenir !

Empêcher son enfant de réussir mieux sa vie que sa maman,

quelle belle satisfaction  pour une mère ?

« ce n’est pas pour la détruire, mais pour me reconstruire » !

Les grand-parents jouent un rôle complexe mais récurent dans toute cette affaire : ils sont la cellule familiale, susceptible (au téléphone) de prendre la voiture pour aller chercher l’ado. Prévenus au dernier moment, convoqués n’importe où, même s’il s’agit du parking du Casino alors que la convocation prévoyait Super U, (à la minute près). Parce qu'on a rendez-vous dans les parkings de super-Marchés. Pas d’importance !  Souvenirs de Pologne : remise de l’otage dans la brume, de part et d’autre du pont de fer. Ultimes effusions. Regards mouillés.  Sacs à dos pesants. Emotion de la rupture sans date de prochaine fois. Chargeur oublié ! Poster le chargeur demain. Lui faire rencontrer (elle est enfant unique) ses cousins, et partager une vie de famille (côté paternel). Il arrive aux grand-parents de conduire l’enfant à l’aéroport pourtant tout proche de la résidence maternelle, considérant que la maman ne va quand même pas faire le déplacement pour permettre à sa fille de voir son père  !

Ah oui, j’ai oublié la punition numéro deux : privée de grand-parents ! Dans les cas graves, la maman cumule les punitions : privée d’ordi, et de grand-parents : de ce qui fait plaisir, agir où ça fait mal.


« ce n’est pas pour la détruire, mais pour me reconstruire » !

Bac en poche, la vie a  continué : la période approche où l’ado va devenir majeure. La période est arrivée de la décision post Bac : quelle prépa intégrer ? Vous savez ce que font les jeunes dans ce cas : postuler pour tous les établissements français possibles, on intégrera le meilleur.

Etonnant : nous sommes en septembre, à peine quatre mois ! La meilleure prépa se révèle être dans l'Ouest, dans un Lycée du nom de Rabelais ! Je parle d'Ouest pour rester vague, puisque ce conte aussi bien est un conte fictif ! A huit-cents Kilomètres ? Tiens ! Pas si loin que cela : tout proche de la résidence du père : le régime est l’internat, sauf que l’internat ne commence que le lundi matin, et s’achève chaque vendredi soir  : il faut bien une résidence fixe au moins pour les week-end. Et les vacances !

Le père aménage un studio-jardin, rez-de-chaussée, la mer à 100 mètres !

Que fait le père ? Il ne dispose pas de l’autorité parentale, et doit l’ancienne pension mensuelle qu'il paie rubis sur l'ongle depuis quatorze ans ! Il fait face aux nouvelles charges, mais … finance toujours la mère … qui n’a plus de charges.

Il déclenche un jugement, prenant en compte la nouvelle donne géographique, et la proximité de la majorité de l’étudiante. Son anniversaire tombe le 30 décembre. Cinq jours après Noël !

Miracle, l’instance se tient le 9 décembre. Transmission de la pièce écrite le 16, neuf jours avant Noël.


Miracle : le père obtient que la jeune fille loge chez lui. Il règle la pension du Lycée. Il subvient aux frais de l’étudiante. Ca va, on espère, durer longtemps. Jersey est à une heure de Condor (1). On y parle Anglais première langue ! L'aéroport est à une heure des grand-parents : ils vont récupérer l’étudiante quand elle viendra en vacances ! On y parle Occitan ; Espagnol ; Catalan (et moins bien Français). On n’a jamais privé quiconque d’ordi, il y en a partout…

 …quant aux amis anglais, y-en-a-plein-itou.

ça arrive aux Anglais aussi

Le papa a obtenu raison, confirmant la décision de l’étudiante de choisir son lieu d’études. Il n’a pas besoin d’escalader de grue. La Justice a tranché !

Merci papa Noël

Le papa à gagné !

sa fille est majeure dans quelques jours…

…elle aime toujours autant les framboises crues

elle sait nager depuis 15 ans… 

et parle anglais couramment !

la maman va devoir se reconstruire autrement !



(1)     Il s’agit du NVG (navire à grande vitesse) qui relie Saint-Malo à Jersey. Au demeurant, c’est dans ce paradis fiscal que nos grandes Entreprises ont des sièges sociaux. Je vous l’ai dit : le Paradis !

En une seconde, le temps a basculé, pour passer à l'année 2015. Il s'agit toujours d'un conte. Dans lequel la jeune-fille serait devenue, tout d'un coup, majeure. Elle va donc entamer son second trimestre. S'il s'agissait d'une histoire vraie, on lui souhaiterait une bonne année 2015 !