vendredi 14 septembre 2012

Leihorra



Nous sommes la veille des journées du patrimoine, vendredi 14 septembre : il y avait tellement de candidats à la visite de la villa Leihorra que Valérie Lannes-Nouel a accepté d’ajouter l’après-midi de vendredi aux deux jours prévus, à raison d’une heure par visite, quel travail elle va avoir ! Nous étions sur liste d’attente et nous serons passés avant tout le monde ! Valérie Lannes n’est pas n’importe qui : descendante du Général Lannes, lui-même membre d’une famille habitant Ciboure depuis le XVIIèS, elle a acquis la villa en 2009, et sort de trois ans de lourds travaux de réhabilitation. Nous avions déjà visité du temps de Maité Béranger Hiriart,  fille de l’architecte Joseph Hiriart, ce qui était déjà « la plus belle villa de la côte basque ». Aujourd’hui, tout resplendit à nouveau. Un endroit extraordinaire. La terre promise, si l’on traduit le nom emprunté à la langue basque « terre ferme ; terre promise », pour les israélites « israeldarei agindu leihora ».

Nous sommes en 1926. La première propriétaire est Caroline Signoret. Son époux fait partie des basques expatriés au Mexique,  qui enrichis, reviennent au pays et souhaitent y faire construire des demeures de rêve. Certains reviennent sur la côte basque. D’autres à Barcelonnette. La fille de Caroline, Joséphine, épouse Hiriart, architecte local. Le projet d’implantation sur la colline Bordagain de Ciboure est d’une efficacité redoutable : le gendre construit une première villa sur la route de corniche, Itzala, qui signifie « ombre », (nous sommes au pied de la falaise), et loge sur place.


Un grand terrain en pente a été acheté à côté. Les travaux sur la maison principale Leihorra peuvent commencer : l’idée est de construire une grande villa autour d’un patio, comme les villas mexicaines. D’utiliser les nouvelles techniques du béton armé en adoptant les lignes droites cubiques de l’Art Déco. De réaliser un plan majestueux, entrée Sud par un vitrail monumental.













 Patio avec un couloir périphérique entouré de colonnes cannelées, comme dans un atrium romain. Rotonde palladienne toujours romaine servant de cadre à la vue sur mer côté Nord. Et pièces de réception distribuées tout autour ; les chambres au premier étage, couvert par une terrasse. Toutes ces constructions Art Déco font appel aux meilleurs artisans de l’époque, Jean Schwartz pour les ferronneries, Jacques Grüber, de Nancy, pour le vitrail. Gerlart pour les verres gravés de roses. Daum pour les pavés des salles de bain.

Le sol du patio est couvert de mosaïques en queues de paon. Les vasques ruissellent de jets d’eau. On cause dans le patio sur des fauteuils en rotin du Bon Marché conçus par René Prou. C’est la propriétaire qui les a repeints un à un aux couleurs blanc-bleu comme à l’origine. Je me souviens des pavés de verre manquants dans la salle de bain, et des soucis de Maité, se demandant comment les faire refondre par Daum : miracle, une caisse pleine « au cas où » a été retrouvée dans la cave, et a permis de tout remettre à neuf !










Une belle villa n’a de sens que si elle est entourée d’un parc, et si elle dispose d’une vue. Le jardin qui descend vers la corniche est constitué de terrasses, sur lesquelles sont implantées un  belvédère ; des bassins, et un fronton pour s’exercer à la pelote basque. La vue vers le Nord est fabuleuse, en direct sur le fort de Vauban à Socoa. Pas facile par contre d’accéder à la plage quasi privée, faite du flisch de Guétary, et qui nécessite de traverser la route, infernal avec le trafic de voitures incessant. Mieux vaut se tremper dans le bassin, en attendant la prochaine piscine, on y est bien plus tranquille.


On ne peut pas photographier, dans l’attente d’une nouvelle publication qui suivra la présentation déjà faite dans « des Racines et des Ailes », et dans divers journaux d’architecture. Il faut bien se soumettre ! Je me débrouille avec les photos d’extérieur, et d’autres trouvées sur internet. Il existe une carte postale du vitrail, dont la représentation est infernale, tellement son format longiligne empêche tout agrandissement. J’ai bien essayé avec la photocopieuse, mais le résultat est mauvais. Je sollicite une autorisation exceptionnelle. J’obtiens une grâce de une-minute-chrono-en-chaussettes-pour-ne-pas-abîmer-le-tapis-de cuir.




















Je vous montrerai plus tard le résultat, loin de la qualité d’un photographe professionnel, mais honorable pour un amateur : je m’intéresse au motif, puisqu’il représente les montagnes voisines, avec un vol d’oiseaux. C’est le même motif que la villa voisine Lehen Tokia, « premier lieu » en basque….Nous avons eu la chance d’y loger, quand c’était un Hôtel, mais c’est aujourd’hui une villa privée…


…à tout à l’heure !