mercredi 25 septembre 2024

Qualité musée pour le Côte d'Emeraude

la coque est impeccable, patine parfaite, je ne touche à rien, sauf petits éclats

De temps à autre, on voit une maquette à vendre sur Interenchères : il s'agit souvent d'un objet bichonné par son constructeur. Il l'a laissé exposé, trop gros pour être protégé dans une vitrine qui serait comme un gros aquarium, difficile à créer, il faut savoir se procurer du verre, le couper, et l'enchâsser dans un profilé de laiton de moins en moins facile à trouver, difficile à braiser sans éclater le verre... Le pire survient : le créateur mort, la famille, les héritiers, ne savent rien de l'objet, son histoire, ses accessoires, le soin du défunt à créer les détails qui font vrai : l'objet est vendu à bas prix lors d'une enchère, c'est la patine qui fera l'intérêt d'un décorateur. J'ai dit "patine", ce qui ne veut pas dire "poussière". Mon Côte d'Emeraude a besoin d'un gros, très gros dépoussiérage ! Je n'hésite pas à mettre du produit pour l'extraire des coins. Je mettrai même le fameux W40 parfait pour les anfractuosités. Le laiton est tellement "patiné" qu'on ne le distingue plus, tellement il est noir !  Même l'hélice, qui doit glisser dans l'eau, a été peinte, encrassée de peinture !





Ouf ! L'essentiel des pièces d'accastillage est présente : le guindeau à l'avant, le crochet central pèse lourd, c'est du laiton brut. Le guindeau arrière. Le projecteur central est tombé tout seul, c'était une horrible pièce rapportée en plastique. Le plastique est banni d'une belle maquette d'avant, cela suffit pour des jouets de gosses, pas pour la maquette d'un remorqueur qui aurait du être classé Monument Historique, portant le nom de Saint-Malo et de la Côte d'Emeraude : le vrai ayant été démantelé, et les rares maquettes navigantes encore visibles, vu l'âge de leurs constructeurs, vont disparaitre comme les Anciens Combattants, il n'y a guère que le mien pour être susceptible d'entrer dans un musée, à Cancale par exemple ? Dans le bureau du Président de la Chambre de Commerce de Saint-Malo ?... du Maire ?

ça a déjà changé : le support de la cloche (qui va avoir sa corde) est devenu blanc
et la chaine entoure la bitte avant, les freins du guindeau ajoutés

Tout de suite me frappent quelques détails choquants. A l'avant en plein centre, existait en vrai une bitte d'amarrage logique et indispensable : il faut en fabriquer une, je m'y mets. En vingt ans, j'ai comme les vieux Gersois accumulé des tas de chutes, il ne faut jamais jeter les chutes surtout de laiton : je trouve des tubes, introuvables depuis que l'Octant a fermé en douce pendant l'été, et qu'il a été repris par Metivier modélisme. Plus rien ne subsiste du catalogue d'avant, où l'on trouvait presque tout ! Heureusement me reste du filetage de 2mm. Des embouts. Du tube ; du plat ; de différentes épaisseurs. Va pour la bitte d'amarrage, autour de laquelle je poserai une chaine d'ancre soigneusement vieillie mais pas trop pour que l'on devine le laiton. Et pattée, comment font-ils pour poser la patte au milieu du maillon ? 


le projecteur avant en pièces détachées, à monter, électrifier, puis patiner

j'ai changé l'ampoule ici inadaptée et du mauvais voltage, retrouvée cachée dans les réserves

ma table de montage noircie par les montages, ce n'est pas du bluff !

Pareil, le guindeau est brut de décoffrage. Un vrai guindeau est, comme une voiture, équipé de freins à bandes, que l'on serre avec un volant. Pas de freins, manque une partie constitutive de l'engin ! Figurez-vous que me restait en stock un adorable robinet de live-steam acheté autrefois en Angleterre, et toujours neuf après peut-être trente ans ? Je sors le volant, et le pose où il faut. Savez-vous qu'avant le téléphone portable, peu judicieux si l'on veut avoir l'usage de ses deux mains pour affaler une ancre de marine qui pèse son poids, on utilisait le son de la cloche pour donner les ordres ? C'est à cet endroit que doit figuer la cloche, qui sert souvent à identifier le navire quand on le découvre au fond, car elle porte normalement l'année de lancement, et le nom. Il lui faut au bout du ballant une corde tressée, que le sonneur agite pour faire sonner. Je fabrique le support, soude, peints et visse la cloche retaillée avec une vis et un écrou de 1 mm. Tout de suite l'avant change, devient vivant.

Un défi devient de plus en plus prégnant : peut-on faire naviguer ce bateau ? Quand les héritiers ont vendu la maquette, ou peut-être auparavant quand le constructeur a senti qu'il allait disparaitre, il a commis un crime de lèse-majesté ! Un crime explicable dans la nature humaine, qui amènerait le Jury à l'acquitter ! Il a refusé l'idée que quelqu'un (qui n'y connaissait rien) dispose de l'objet parfait et fonctionnant. Il a refusé l'idée que du matériel peut-être vendable ne lui rapporte pas quelque chose de plus. Il a refusé que son Jouet soit utilisé tel quel par un autre ! Donc il l'a cassé : il a dévissé le moteur, comment a-t-il fait car il est inaccessible ! Il a coupé les fils Dieu sait s'il y en avait, ras, pour qu'il soit impossible de les ressouder. Plus aucun des (j'ai compté : 15) points lumineux ne fonctionne plus. C'est un "engin de vitrine", ou on dit "d'exposition", certes il ne navigue plus, mais la nuit, pour le voir, il pourrait briller de tous ses feux ? Non ! Plus rien !

une "Nature morte" ! 

tout le monde peut se tromper : le constructeur avait inversé les feux rouge et vert, et cassé les ampoules !

Alors, est-il réparable ?

alors je tente !

comment par exemple accéder aux feux arrière du Château, qui collé ne s'enlève plus pour accéder aux entrailles ?

je perce un trou, que je reboucherai, puis cacherai avec le crochet démonté

l'énorme crochet pèse son poids ! Je l'ai passé au W40, et nettoyé le ressort qui fonctionne

c'est par ce trou que je dois faire passer aussi les fils des 2 projecteurs arrière,
puis tout cacher dans la coque
 

et avec le doigt je trouve ce qui reste du fil électrique caché

ma pile plate de 4,5v : le feu arrière tout petit, (on ne trouve plus d'ampoules 4,5v si petites), s'éclaire ! 

je vais tout rallumer !

comme le nouveau projecteur super-détaillé en vrai laiton moulé

je suis en plein bazar, tout démonté, rien de fini

il faut que je recâble tout

il me faut rendre des embarcations réalistes

le poste de pilotage est tout vide

il faut que je le meuble :

un vrai chantier Naval ! 

comme si la bitte avant avait toujours été là
la cloche aussi


de tous temps, il y a eu des ship-builders


je poursuis l'aventure ...

... et mon nouveau copain Manfred Ohnhold m'envoie l'accastillage numéro 2

il est comme moi, il travaille le dimanche



j'ai une troisième commande en préparation

je dois veiller à ne rien oublier :

je bosse pour les Monuments Historiques ! 


ça se fête à la trompette :