mercredi 14 août 2013

Fête des brocs à Port de Lanne



C’est devenu une tradition : veille du 15 août (le jour du 15 août nous ne sortons pas pour éviter la foule sur les routes), nous partons pour Port de Lanne : lever 6 heures, départ à 7 heures, car il faut deux heures pile de trajet. Arrivée sur place à 9 heures pile, les voitures sont partout : certains champs portent encore leurs légumes d’été à grosses fleurs jaunes de citrouilles. Dans les autres on a moissonné pour y entasser les voitures. Deux raretés ici : les places pour garer le véhicule, nous sommes en pleine campagne, mais tout est clôturé, les routes bordées de fossés. Et les places de WC, car le village heureusement a ouvert la salle de sport qui abrite 3 cabines, mais vous n’imaginez pas les queues vu la foule (la moitié sont des dames !). Or après deux heures de route, vous comprenez que l’intendance doit inclure un arrêt idoine. Je passe car nous avons une fois de plus magnifiquement opéré, malgré la cohue, et malgré la séparation inique qui marque encore dans notre société pourtant égalitaire les WC hommes (rapides) ; femmes (lentes) ; et handicapés (vides).
 














le fronton de 1932











Ce qui est épatant, c’est que les brocs réservent pour cette occasion leurs plus amusantes trouvailles, et on trouve des tas de choses inattendues : cette madone aragonaise qu’on imagine revêtue de sa robe et de sa couronne, mais qui déshabillée paraît étonnamment moderne. (dans quelle église a-t-elle été encore « prélevée » ?). Ce buste de Flore en terre cuite. Huit cents Euros quand-même ! Deux des quatre saisons : mille cinq cent Euros quand-même ! Des maquettes de bateaux. Un Dewoitine (c’est une marque d’avions). Surprenant : un dôme de lampe Schneider décor aux cardamines. Mille deux cents Euros (quand-même, le deal consiste à trouver le pied assorti ; à reconstituer la lampe entière, le tout vaudra douze mille Euros (ça vaut le coup, on multiplie par dix). [1]On trouve des massacres de taureaux, nous sommes dans le coin où l’on pratique encore la corrida) ; des brochets empaillés encore plus gros que ceux pêchés par Poutine (lire Paris-Match). Des services de faïence (de Sarreguemines) basques évidemment, et même des assiettes Ramuntcho (165 Euros l’assiette quand-même).



















De tout je vous dis : des livres ; des mobiliers de jardin ; des peintures ; du linge de maison. Le nombre des vendeurs est immense, et en deux heures, j’imagine que nous n’avons parcouru que la moitié des stands.
  














Mais au bout de deux heures, nous sommes à genoux, il fait déjà chaud, et sortir de cette mêlée est indispensable si l’on veut respirer un peu. Nous avons comme toujours trouvé ce que nous ne cherchions pas, l’avons ramené à la voiture avec le diable (c’est le cas de le dire) prêté par le vendeur, et avons donc fait deux fois l’aller-retour. Je transpire à grosses gouttes.





Nous nous dirigeons vers Dax. Arrivés, les rues encombrées par la foule, tout le monde est en blanc, avec un foulard (ou une ceinture) rouge : c’est la fête ! Plutôt « les fêtes » car on dit : « les fêtes de Dax » ! A côté de Port de Lanne, les encombrements sont encore plus énormes, la circulation quasi bloquée, il est près de midi et nous arrivons quand-même à l’heure.

Je vous ai incrusté de-ci-delà quelques quand-même, une expression que j’adore : la scène se passe à Toulouse, à l’époque où Lacroix avait une boutique célèbre, rue Boulbonne. Entre une Toulousaine, habillée comme un arbre de Noël : en Lacroix bling-bling, des bijoux Lacroix Dieu sait si à l’époque ils pouvaient être totalement immodestes. Foulard assorti. Sur la dame, une petite fortune. On imagine la dame elle-même commerçante, coiffeuse, bouchère ou antiquaire, et ne plaignant le prix de ses prestations. Ou encore portait-elle des cadeaux qu’elle n’avait pas payés ? Possible. Toujours est-il que la dame demande à la vendeuse le prix d’une ceinture. –« Trois cents Euros Madame » s’entend-elle répondre. –« Ah quand-même ? » rétorque la cliente, désappointée par le coût ! C’est devenu un rite : je demande le prix. Le vendeur me répond. Et quel que soit le montant, le jeu consiste en se rappelant la Dame de rétorquer : -« Ah quand-même ! » Il faut préciser que si la scène se passe à Toulouse, la réponse complète est : -« Ah quand-même-con », avec l’accent naturellement. A Port de Lanne au bord de l’Adour, on peut ôter le con, la formule se suffit à elle-même.

Quelques heures plus tard, nous rentrons au bercail, la moisson débarquée de la voiture. C’est bien, on a ramené des trucs marrants, qu’il va falloir nettoyer ; poncer ; peindre et in fine dorer. Des cadres impeccables, déjà apprêtés, parfaits pour encadrer (of course) les prochaines huiles de ma peintre préférée.


L’hiver finira bien par arriver :

J’aurai à Noël (j’espère) quelques nouvelles peintures

dans leur cadre de Port de Lanne

de quoi rêver !