mardi 21 août 2012

Esparros


Un beau nom, qui sent ses Pyrénées ! Un gouffre, de l’ombre, une humidité de 92% (il ne faudrait pas grand chose pour qu’il pleuve dedans) et une température régulée à 12°7, c’est à dire moins 20° par rapport à l’extérieur. Des thermomètres et hygromètres surveillent ces paramètres, la chaleur et le gaz carbonique dégagés par des visiteurs comptabilisés, sans quoi plus d’aragonite ! Nous sommes venus ici à la recherche de la fraicheur, et des cristaux découverts à l’origine en Aragon, mais qui sont tout bonnement de la calcite. L’eau minéralisée traverse du manganèse : le dépôt devient noir. De l’oxyde de fer ? le dépôt est rouille.









C’est seulement en 1938, avec Élisabeth, et son ami Germain Gattet, (dont voici le casque de spéléologue) que Norbert Casteret découvre et explore le gouffre d'Esparros, dans les Baronies. Nous sommes dans les Hautes Pyrénées. Tous trois vont  parcourir la plus belle, la plus fabuleuse grotte à concrétions jamais vue jusqu'à ce jour. Cette exploration durera plusieurs mois, avec chaque fois de nouvelles trouvailles, déclenchant l'admiration et l'enthousiasme de nos héros : les salles excavées par la Neste de l’époque (des millions d’années) sont immenses.

Une secousse volcanique : le plancher d’argile s’effondre, et le passage grandit. La Neste grandit elle aussi, érode comme à la lime le marbre-bréché, et forme des conduits de plus en plus immenses dans lesquels nous circulons. Mais les traces d’érosion d’origine sont au plafond ! Habituels stalactites et stalagmites. Habituelles draperies de calcite. Gours bordés par des barrières de dentelles qu’on dirait de corail blanc. Gours vides au début, mais à la fin, les mares sont pleines d’une eau transparente, on devine que la grotte continue de déposer la calcite, et qu’elle travaille pour l’éternité.

Mais où cela devient extraordinaire, est quand (phénomène de rosée ?) les cristaux partent dans tous les sens, du bas vers le haut ; horizontalement, à droite, à gauche, et transforment les parois en vitrine de joaillerie.



















Depuis ces millions d’années, la Neste a changé de vallée et coule à l’air libre. Nous allons l’admirer à Arreau, où la Neste d’Aure rejoint celle du Louron, pour devenir la Neste-tout-cour, occasion de faire un tour en ville, et de déjeuner à l’hôtel de France.



































Nous y retrouvons les deux Nestes, débarrassées de leurs draperies de calcite, et carrément déshabillées (toujours la chaleur). Nous approchant pour voir ce qu’elles font dans la fontaine, l’une des deux vient d’attraper une truite, je crains qu’elle n’ait pas la dimension réglementaire, elle va devoir la rejeter à l’eau. Ici, on adore les fées qui fréquentent les sources, les truites qui fréquentent les gaves, ce qui n’empêche pas d’aimer le jambon, en voici des magnifiquement appareillés.

Promenade hors du temps, et réflexion sur l’immensité de l’histoire de la terre,

Qu’est-ce qu’une matinée de vie humaine

Comparée aux millions d’années pour que de simples gouttes d’eau

Créent de telles draperies !