Nous sommes en 1130 à Amiens :
déjà un incendie détruit une grande partie de la ville : même décision qu’à
Paris, une nouvelle église de style roman est édifiée entre 1137 et 1152, année
où elle est consacrée. L'église, qui conservait déjà les ossements des
principaux saints locaux (Gentien, Fuscien, Victoric), voit son prestige
s'accroître de façon spectaculaire avec l'arrivée, en 1206, du chef de saint
Jean Baptiste.
Oui, la tête décapitée
du baptiste, avait été mise de côté,
enterrée par Hérodiade dans l'ancien verger d'Hérode !
enterrée par Hérodiade dans l'ancien verger d'Hérode !
L'invention de reliques
intervenait, au Moyen Âge, à des moments cruciaux pour les cathédrales, leur
permettant de sortir de difficultés financières, et de réaffirmer le pouvoir
de l'évêque. Comme je vous l’ai montré pour Marie-Madeleine il y a pile un an (2), retrouver les
reliques de Jean Baptiste était un moyen particulier pour assurer la promotion
d’une église, comme celle d'Amiens.
En 1204, lors du sac de
Constantinople par les croisés, au cours de la quatrième croisade, le chanoine
picard Wallon de Sarton, chanoine de la collégiale Saint-Martin de Picquigny, déterra le chef de saint Jean-Baptiste (auquel manquait la machoire inférieure) et ramena cette relique insigne en Picardie. Comment s'y prit-il ? Procédant à des fouilles à l'endroit du meurtre, il retrouva le grand plat d’argent marqué d'une inscription en grec, dans laquelle la relique reposait !
Jan van Steffeswert 1508, Liège musée Grand Curtius sculpture bois |
Plat que Walon se dépêche de vendre pour payer son billet
retour en France... Et voilà la relique à Amiens. Un super pèlerinage se
met en place. Il servira de prétexte à Charles VI pour faire venir
Isabeau de Bavière, qu’il épousera dans la cathédrale picarde le 17 juillet 1385. Près de deux cents ans avant, la relique était solennellement reçue, à Amiens, par l'évêque Richard de
Gerberoy, le 17 décembre 1206, lors de la cérémonie de la receptio. Vous remarquez ? toujours le mois de décembre ! Très rapidement, elle devient l'objet d'un
pèlerinage, un des plus importants du Nord de la France durant tout le Moyen
Âge, et l'une des principales sources de revenus
de la cathédrale. De nombreux princes français et étrangers viennent l'honorer.
Mais la tête du saint attirait surtout les personnes atteintes de surdité, de mutisme,
de cécité et avant tout les gens atteints du «mal saint-Jean », c'est-à-dire d'épilepsie. Rapidement, cet afflux
rendit la cathédrale romane trop petite…
… elle fut alors agrandie, jusqu’à
devenir la plus grande cathédrale de France, bien plus grande que Notre Dame !
église orthodoxe |
Nos amis Parisiens feraient bien
d'en prendre conscience, et de permettre à notre Général commingeois d’imposer
une ouverture d’esprit architecturale telle, qu’elle permettre la rapide
reconstruction de la cathédrale de Paris : peu importe la nature
de la flèche si elle continue d’être belle : et si l’on veut voir de l’authenticité,
il suffit de se rendre à Amiens, pour y voir « la lumière dans les
ténèbres » annoncée par Jean Baptiste !
demain, c'est la fête de Saint Jean... l'évangéliste
nous serons à + 5 jours du solstice d'hiver ...
... à Saint-Bertrand en Comminges !
ce reliquaire d'argent se trouve à la cathédrale de St Bavon, Gand |
tout n'est pas beau qu'à Paris ! |
PS (1) : la suite d'hier : Saint Jean Baptiste mène une vie
d'ascèse « caché dans le désert », se nourrissant de « sauterelles et de miel
sauvage » (Matthieu III:4), et pratiquant le jeûne.
Si on suit l'Évangile selon Luc
pour dater vers l'an 29 le moment où Jean Baptiste commence à prophétiser, il
est à cette époque installé sur les bords du Jourdain, où il pratique le « baptême de repentance » par
immersion dans l'eau, ce qui est légèrement différent de la description de son
baptême par Flavius Josèphe.
Jean réunit autour de lui de
nombreux disciples, leur annonçant la venue d'un personnage plus important que
lui, que la tradition chrétienne interprète comme le Messie : « Moi, je vous baptise avec de l'eau, pour
vous amener à la repentance, mais vient celui plus fort que moi, et je ne suis
pas digne de porter ses sandales. Lui vous baptisera dans l'Esprit saint et le
feu » (Matthieu III:11).
un éclat d'os du crâne fait aussi l'objet d'une autre relique |