de "Au-revoir là-haut" !
Février 1927. A quelques jours près, c'est la sortie de la B14 "tout-acier"...aucun rapport ! Le Tout-Paris
assiste aux obsèques de Marcel Péricourt. Sa fille, Madeleine, doit prendre la
tête de l'empire financier dont elle est l'héritière, mais le destin en décide
autrement. Son fils, Paul, d'un geste inattendu et tragique, va placer
Madeleine sur le chemin de la ruine et du déclassement.
Face à l'adversité des hommes, à
la cupidité de son époque, à la corruption de son milieu et à l'ambition de son
entourage, Madeleine devra déployer des trésors d'intelligence, d'énergie mais
aussi de machiavélisme pour survivre et reconstruire sa vie. Tâche d'autant
plus difficile dans une France qui observe, impuissante, les premières couleurs
de l'incendie qui va ravager l'Europe.
Couleurs de l'incendie est le
deuxième volet de la trilogie inaugurée avec Au revoir là-haut, prix Goncourt
2013, où l'on retrouve l'extraordinaire talent de Pierre Lemaitre.
Ouf ! je n'ai qu'à recopier culturebox dont vous trouverez le lien ci-dessous, qui donne les quatre bonnes raisons d'acheter, puis de lire le deuxième tome de la trilogie : je cite in extenso :
on devine la forte femme, propriétaire de cette B14 |
comme le film n'est pas encore sorti ni même écrit, je me suis débrouillé pour les illustrations |
"1 Parce
qu'on avait dévoré "Au revoir là-haut"
Dans le premier volet,
souvenez-vous, Albert, modeste comptable, et Edouard, fils d'un riche banquier,
avaient fait connaissance dans les tranchées. En novembre 1918, alors que de
chaque côté des lignes on attendait l'armistice, le lieutenant Pradelle, poussé
par l'ambition, avait lancé un dernier assaut insensé, au cours duquel Albert
avait échappé à la mort grâce à Edouard. Ce dernier, blessé dans l'explosion
d'un obus lors de ce sauvetage, était rentré de la guerre avec la "gueule
cassée". Les deux amis s'étaient lancés dans une vaste escroquerie aux
monuments aux morts. Le lieutenant Pradelle, lui, avait épousé Madeleine, la
sœur d'Edouard Péricourt et avait avec les appuis de son beau-père monté une
frauduleuse affaire de cimetières militaires.
Prix Goncourt 2013, le premier
opus de cette épopée du XXe siècle, "Au revoir là-haut" (Albin
Michel) a séduit 650 000 lecteurs. C'est du moins le nombre d'exemplaires
vendus en France depuis sa parution en 2013, et le roman a été traduit dans 33
pays. Tel un as de la série à succès -n'oublions pas qu'il est auteur de
polars- Pierre Lemaitre avait soigné la fin de ce premier volet de telle sorte
qu'on l'avait refermé avec regret et une furieuse de lire la suite. Il a fallu
attendre quatre ans. La sortie au cinéma l'été dernier, de l'adaptation
d'Albert Dupontel, n'a fait que raviver le désir de suite : http://babone5go2.blogspot.fr/2018/01/au-revoir-la-haut.html
2 Parce
qu'on attendait la suite depuis 4 ans
"Couleurs de
l'incendie", le 2e volet de cette trilogie, s'ouvre sur un enterrement,
celui du patriarche, Marcel Péricourt. Edouard est mort. Depuis qu'elle a
divorcé de Pradelle (condamné et mis en prison dans l'affaire des cimetières
militaires frauduleux), Madeleine élève dans l'hôtel particulier familial son
fils unique Paul, avec l'aide de Léonce, sa ravissante dame de compagnie, et
André, son précepteur, qui est aussi son amant.
Alors que le tout Paris assiste
aux funérailles du patriarche, de manière totalement incompréhensible, le petit
Paul se jette dans le vide. Avec la mort de Marcel Péricourt, et les
incompétences répétées de son frère Charles, Madeleine se voit hériter de
l'empire financier. Anéantie par l'accident qui a rendu son fils handicapé, et
ignorante comme la plupart des femmes de son époque des rouages de l'économie,
elle ne se sent ni les compétences ni les appétits pour assurer la succession
Péricourt. Elle laisse donc Gustave Joubert, le fondé de pouvoir, le soin de
prendre les rênes de la banque…
Paul ne peut plus marcher et
Madeleine ne sait comment apaiser ses cauchemars, ni comment lui redonner le
sourire. Paul sort pourtant de sa léthargie et retrouve peu à peu le sourire
avec l'arrivée de Vladi, sa nouvelle nounou, une virevoltante polonaise ne
parlant pas un mot de français mais emplissant la maison de ses chants et de sa
joie de vivre. Paul retrouve aussi le goût de vivre avec la naissance d'une
nouvelle passion pour le répertoire lyrique, particulièrement quand il est
chanté par une chanteuse d'opéra virtuose et fantasque, qui le prend en amitié.
Pendant ce temps, les affaires tournent très mal et Madeleine se voit dans
l'obligation de vendre sa maison…
3 Parce
que "Couleurs de l'incendie" est le récit d'une émancipation féminine
Avec ce deuxième volet, Pierre
Lemaitre poursuit son exploration de l'histoire du XXe siècle en s'attaquant
aux années trente. Il met surtout au centre de son récit une femme, Madeleine,
qui, contrainte par les événements, va peu à peu sortir de sa condition
confortable et passive de fille de notable. Après son divorce, puis la mort de
son père, puis l'accident de son fils, Madeleine doit affronter la misogynie,
les intentions malveillantes, la férocité et la duplicité des hommes qui
l'entourent. Ils ont des ambitions qui la dépassent, jusqu'au jour où le
déclassement l'oblige à se défendre. Elle y mettra toute son énergie, et toute
son intelligence.
Une émancipation certes guidée
par la vengeance, mais une belle émancipation quand même. Madeleine apprend à
jouir de sa liberté, de son corps, et trouve la voie de son indépendance
financière (avec l'aide de son fils, dont la vivacité d'esprit n'a pas été
altérée par l'accident). Outre le personnage de Madeleine, "Couleurs de
l'incendie" fait une belle place aux femmes. On y croise d'autres
personnages féminins, secondaires mais flamboyants : Léonce, très jolie jeune
femme, arriviste et fourbe ("Mais avait-elle le choix" s'interroge
Madeleine), Vladi, la joyeuse polonaise, qui assume sans complexe ses désirs
sexuels débordants, ou encore Solange, la fantasque et courageuse cantatrice
dont s'entiche Paul.
4 Parce
que les romans de Pierre Lemaitre ne laissent personne de côté
On retrouve avec ce deuxième
volet le talent de Pierre Lemaitre pour nous plonger dans une lecture à la fois
haletante et divertissante. L'écrivain injecte une fois encore dans son récit
romanesque des pans de l'histoire de France, avec un point de vue toujours
fermement posté du côté de la crtique sociale. En même temps que la famille
Péricourt, sa richesse et sa fière assurance, périclitent, c'est toute la
vieille Europe qui s'effondre. On est ici plongés dans les années trente, avec
la montée des nationalismes, l'arrivée au pouvoir d'Hitler en Allemagne, et
l'alignement des événements qui vont conduire à la guerre qui va incendier pour
la seconde fois dans le siècle l'Europe et le monde.
Et si "Couleurs de
l'incendie" est un brin moins lyrique qu'"Au-revoir là-haut", on
retrouve quand même dans ce 2e opus les recettes du succès de Lemaitre : un
talent indéniable pour l'intrigue (on ne lâche pas), un sens aigu de la formule
et des dialogues aux petits oignons… Bref, "Couleurs de l'incendie"
contient tous les ingrédients d'un bon roman qui s'adresse à un large, à un
très large public, ce qui n'est pas la moindre de ses qualités.
"Couleurs de
l'incendie", Pierre Lemaitre
(Albin Michel – 530 pages – 22,90
euros - Sortie le 3 janvier 2018)
Extrait :
"Si, les obsèques de Marcel
Péricourt furent perturbées et s'achevèrent même de façon franchement
chaotique, du moins commencèrent-elles à l'heure. Dès le début de la matinée le
boulevard de Courcelles était fermé à la circulation. Rassemblée dans la cour,
la musique de la garde républicaine bruissait des essais feutrés des
instruments, tandis que les automobiles déversaient sur le trottoir
ambassadeurs, parlementaires, généraux, délégations étrangères qui se saluaient
gravement. Des académiciens passaient sous le grand dais noir à crépine
d'argent portant le chiffre du défunt qui couvrait le large perron et suivaient
les discrètes consignes du maître de cérémonie chargé d'ordonner toute cette
foule dans l'attente de la levée du corps. On reconnaissait beaucoup de
visages. Des funérailles de cette importance, c'était comme un mariage ducal ou
la présentation d'une collection de Lucien Lelong, le lieu où il fallait se
montrer quand on avait un certain rang".
"Couleurs de
l'incendie", Pierre Lemaitre (Albin Michel)