Nicolas de
… et sa vérité ?
Le 21 septembre 1792, la
Convention nationale, constituée la veille à la suite des premières élections
législatives au suffrage universel, s’est réunie pour la première fois et a
déclaré l’abolition de la monarchie. Le lendemain la République est proclamée.
L’abbé Grégoire, chargé dans la foulée d’un rapport sur les sceaux de la
République, propose que la Liberté soit officiellement adoptée comme symbole de
la France, « afin que nos emblèmes
circulant sur le globe, présentassent à tous les peuples les images chéries de
la Liberté et de la fierté républicaines ». L’incarnation de la République
va dès lors progressivement se confondre avec la déesse de la Liberté qui avait
jusqu’alors dominé le répertoire symbolique révolutionnaire.
La triade républicaine occupe le
centre de la composition. La Vérité
se dévoile, mais le soleil qui traditionnellement l’accompagne est remplacé par
l’œil de la Vigilance, car cette Vérité est contemporaine de la Terreur plus
que des Lumières. Je vous dis : « œil
de la vigilance », mais d’autres instances plus initiées diraient
qu’il s’agit de l’œil du Grand Architecte de l’Univers. Bref !
A droite, l’Abondance
se reconnaît à la corne d’Amalthée qu’elle tient de la main gauche et d’où
s’épanchent fruits et épis de grains. La
République est désignée à gauche par le faisceau surmonté du bonnet rouge
et la feuille déroulée de la Déclaration des Droits de l’homme, qui étaient
encore récemment associés à la Liberté ; elle a chassé le Fanatisme et la
Royauté, les deux silhouettes frappées par la foudre qui s’enfuient vers
l’horizon embrasé à l’extrême gauche.
A droite de la composition est Diogène, philosophe de l’Antiquité dont
les révolutionnaires ont fait un héros du peuple. Il éteint la lanterne avec
laquelle il cherchait l’homme véritable, car l’apparition de la Vérité a mis
fin à sa quête.
Présentée au Salon de 1793, soit
un an après la proclamation de la République, l’allégorie de Courteille veut
être l’expression du nouveau régime : son articulation symbolique signifie que
politique (République) et économie (Abondance) doivent découler de la
philosophie (Vérité).
Cependant, la destinée du tableau révèle le caractère
transitoire de la symbolique révolutionnaire. Dans le livret du Salon de 1793
son titre désigne la figure de gauche comme étant la Liberté. Quelques mois
plus tard, lors de la présentation du tableau au concours de l’an II décrété
par la Comité de Salut public de la Convention (printemps 1794), la même figure
est identifiée à l’Égalité, dénomination surprenante si l’on considère
l’absence du symbole consacré à cette divinité par les iconologistes
révolutionnaires : le niveau du charpentier.
Sans doute l’évolution politique
a-t-elle pris de court l’artiste qui n’aura eu ni le temps ni les moyens de
composer un nouveau tableau pour le concours officiel. En la circonstance, la
feuille déroulée par la figure pouvait faire allusion à la Déclaration des
droits de l’homme de 1793, et de fait, passer pour le symbole par défaut de
l’Égalité, le premier des droits de l’homme proclamé dans cette nouvelle
version de la Déclaration. Mais l’approximation de cette tentative d’ajustement
sémantique trahit en définitive les faiblesses d’un langage visuel qui évolue
moins vite que les discours ; elle montre aussi les limites d’un art qui peine
à suivre les évènements.
Tant qu’à évoquer Diogène, voici
mon "copain" (si j’ose dire) Gérome, on a envie d’apostropher Diogène pour se
faire « engueuler » :
-« sors de mon soleil, tu me fais de l’ombre, casse-toi …
…pousseur de caddie »
PS1 : on ne peut
comprendre qu’en connaissant Pierre Rabhi : http://babone5go2.blogspot.fr/2013/10/avec-pierre-rabhi.html
PS3 : la vérité ?
elle est toute nue : http://babo-gazettedesarts.blogspot.fr/2011/09/verite.html
"la Paix" de Blondel, avec le dépôt des armes, amène aussi l'abondance |