peu avant de sortir du 31 pour entrer dans le 65, les deux cathédrales St Bertrand & Valcabrère |
arrivée à Mauléon-Barrousse 5 octobre |
Nous sommes mercredi 5 octobre, cinq jours déjà ! C'est toujours avec émotion que je passe la frontière qui nous sépare, nous qui résidons en Haute-Garonne, (31), de nos voisins des Hautes-Pyrénées, (65), parce que quand nous quittons notre département, illuminé par les deux cathédrales conjointes de Saint-Bertrand et Valcabrère, nous avons l'impression de rejoindre l'immensité des Pyrénées rurales, avec des noms sortis du passé : Thèbe ; Bramevaque ; Ourde (sans L) ; Ferrère, Loure-Barousse ; Mauléon-Barousse ... le pays des sources, irrigué par l'Ourse, que nous aimons tant.
au bout de la rue, l'église Saint-Laurent |
le cierge pascal allumé, son fils passera la lumière à Gus |
sur l'autel de la Vierge, Laurent à gauche, et Bertrand, le saint voisin, à droite |
Un bien triste et brutal rendez-vous à l'église de Mauléon-Barousse si émouvante, située en plein village, accessible uniquement par la rue piétonne, tellement que le corbillard Mercédès doit manoeuvrer pour se présenter marche-arrière devant le portail de l'église. Je me méfie, arrive une bonne heure avant, difficile pourtant de garer la voiture tant les places sont toutes prises, une foule parfois venue de loin marche lentement vers l'église et attend comme je le fais dans la nef. Les uniformes sont en rang. Je compte huit drapeaux ruban noir en tête, dont la Légion d'Honneur des Hautes-Pyrénées qui conduiront le cerceuil drapé du drapeau tricolore dans l'église. Des Personnalités à cheveux blancs, décorations pendantes, manifestent leur amitié au défunt. L'autel est vide, et le restera, les archéologues étudient à Valcabrère comment on enterrait les morts au temps des Romains, ils feraient mieux de s'interroger sur les pratiques actuelles : de même qu'il n'y a plus de docteurs, de soudeurs, ni de serveurs dans les restaurants, il n'y a plus de prêtres. Pourtant deux Dames que j'imagine Diacres conduiront le service funèbre avec une précision et une émotion palpable, nous unissant tous fils de Dieu, Dieu d'amour et de Paix. Cela tombe bien pour un Officier Parachutiste, Chevalier de la Légion d'Honneur, Médaille militaire, médailles sur un coussin à côté de son képi de Capitaine. Il est fils du pays, études sur place, puis engagement dans l'Armée, le must, les paras, la Légion....
Heureusement, je vous en ai parlé auparavant, tout en cachant son nom par discrétion. Son prénom : Gustave mais ici tout le monde l'appelait Gus. C'est à lui que je faisais allusion en présentant "le poudac exhumé" (1) récemment à Tibiran. Je le savais spéléologue, je le découvre Officier, parachutiste, parapentiste, c'est à Cier le 1er octobre qu'il a fait une chute fatale en parapente, mettant fin prématurément à ses jours, lui qui n'était retraité que depuis 2015, et qui n'avait que soixante sept ans. Je lui dois, lui qui ne me connaissait quasiment pas, de m'avoir emmené à Générest, puis, un fantasme de plusieurs dizaines d'années jamais satisfait, de m'avoir (à grandes enjambées difficiles à suivre), mené quasi par la main devant le tunnel de l'aqueduc romain de Tibiran, dans la montée de Saint-Martin. Je l'avais photographié heureux d'avoir réussi à faire expertiser le puits artésien romain alimentant Lugdunum par la DRAC semaine 36 : lui en treillis avait passé des heures à déboiser et ratisser le terrain du propriétaire, qui lui avait confié l'opération de sauvetage : il était comme cela : engagé, rigoureux, intrépide, tenant ses promesses, et toujours le premier à s'intéresser au Patrimoine, mais surtout aux autres, aux gens : un vrai soldat, amoureux de son Pays, et des autres.
Dans les églises rurales, Dieu figure au même titre que la Patrie sur les plaques en mémoire des morts de 1914, car l'éducation d'alors ne trouvait un sens à la vie que dans son observation des valeurs chrétiennes. Il se trouve que notre ami se nomme Arcangeli, et son meilleur ami, Christophe M. ruban rouge à la boutonnière, prend la parole à la fin de l'office pour un poème terminal, ne peut s'empêcher de jouer avec un nom qui évoque l'Archange Saint-Michel, le Patron des Hussards parachutistes. Le maire des Sables d'Olonne récemment voulait le déboulonner, afin d'éviter d'offenser les disciples de Mahomet, sans doute faute d'éducation ignore-t-il le rôle de l'Archange dans la lutte contre le mal ? Je donne ma carte à Christophe, qui m'envoie son poème quelques jours plus tard : in fine !
A la sortie de l'office, surprise militaire : les uniformes et Drapeaux entourent le cercueil. Premier commandement : "Aux Morts" : minute de silence, au garde-à-vous. Un premier chant s'élève a capella : les Hussards de Bercheny :
https://www.youtube.com/watch?v=El1j51_W1JY
sitôt fini, second chant : l'hymne des Légionnaires :
"Au Tonkin, la Légion immortelle
À Tuyen-Quang illustra notre drapeau
Vous les morts nous vous serons fidèles
Dormez en paix dans vos tombeaux
Tiens, voilà du boudin, voilà du boudin, voilà du boudin
(voilà du boudin)
Pour les Alsaciens, les Suisses et les Lorrains (les Suisses
et les Lorrains)
Pour les Belges, y en a plus
Pour les Belges, y en a plus
Ce sont des tireurs au cul
Pour les Belges, y en a plus
Pour les Belges, y en a plus
Ce sont des tireurs au cul
.../...
Au cours de nos campagnes lointaines
Affrontant la fièvre et le feu (et le feu)
Oublions avec nos peines (nos peines)
La mort qui nous oublie si peu
Tiens, voilà du boudin, voilà du boudin, voilà du boudin
(voilà du boudin)
.../...
Que ce soit aux heurts de Camerone
Maroc Syrie et Madagascar
La légion toujours se donne
Pour sauver l'honneur de l'Étendard
je ressors mes photos de 2020, jamais montrées :
24 juillet 2020 : il m'emmène à Saint-Martin |
il faut suivre derrière ! |
salut à la Vierge de Générest |
respect ému devant le Gouffre |
7 septembre 2022 à Tibiran : mission réussie ! |
lendemain, grosse journée de travail sur le chantier,
voici le poème de Christophe M.
Hommage à Gustave Arcangeli
Ton beau nom c’est l’Archange, une âme prédestinée,
Aux ailes du saint patron des aéroportés,
Qui ont donné du sens à ton cheminement,
Par la foi et l’honneur en tes engagements.
Gustave tu as servi tout au long de ta vie,
Avec cette amplitude, généreuse à l’envi,
Tu voulais dépasser les limites convenues,
Dans ton humanité où rien n’était perdu.
Ton cœur pur et trempé, comme ton corps vigoureux,
T’inclinaient à l’action et aux propos heureux,
Pour le seul bien d’autrui, l’intérêt général
Que tu portais sans bruit, de manière idéale.
Tu étais ce soldat, comme on en connaît guère,
Reconnu valeureux, humble tout à la fois fier,
Chez les hussards-paras, ensuite à la Légion,
Que tu as bien marqués sous divers horizons.
Simplement tu vibrais sous la coupole gonflée,
A travers les courants, au-delà des marées ;
Cette troisième dimension que tu aimais vraiment,
Tant elle te libérait des pesanteurs du temps.
Ouvert tu demeurais sur les choses du terrain,
La Barousse t’habitait jusqu’aux moindres recoins ;
Il fallait l’explorer, y compris dans ses plis,
Sinueux et profonds, que tu bravais ainsi.
Ciel et terre t’ont comblé, tu leur as tout donné,
Aujourd’hui ils t’accueillent dans leur éternité,
A la face de Dieu, par son amour inoui,
Qui vient de t’appeler sous les cieux infinis.
Ferrère, le 2 octobre 2022,
Christophe Maruffy
https://www.youtube.com/watch?v=_eLU5W1vc8Y
la musique met de l'ordre dans nos peines