Quand je vous ai fait découvrir la villa Mira-sol à Biarritz, orientée à l'Orient pour voir le soleil se coucher, je vous ai parlé de la Villa le Caruhel située en Bretagne, au-dessus de Saint-Brieuc, bien loin de là. Elle regarde l'Est, pour voir le soleil se lever, tellement que son propriétaire l'appelait la "Villa du soleil levant", plutôt qu'adopter le nom du lieu-dit, le Caruhel, "la maison d'en haut" en breton.
Située donc à Étables-sur-Mer, dans un magnifique écrin de verdure, la villa Caruhel domine le port de Saint-Quay-Portrieux. Inscrite à l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques depuis 1986, elle a été construite en 1910. Contrairement à l'idée reçue, encore une (rarissime) faille du tout puissant Googlemap, elle n'est pas identifiée mais la voici quand-même !
construite en béton, les énormes terrasses donnent sur la mer |
L'histoire du créateur est amusante, la voici, j'ai tenté avec "le soleil levant" de comprendre comment Fricotelle, à l'origine, fou du pays du soleil levant, le Japon, mais désespérant de s'y rendre, tenta de reconstituer chez lui ce pays fantasmé !
Cette demeure a été édifiée dans les années 1910. Elle est déjà d'avant-garde, cube de béton juché sur la falaise, sur les plans d'un élève de l'architecte autrichien Otto Wagner. Elle est ensuite agrandie dans les années 20 après son acquisition par Louis Fricotelle, riche importateur de papier à cigarettes, papier moins à la mode aujourd'hui, mais très répandu à l'époque avant que l'on s'aperçoive de la nocivité de la nicotine ! Il confie le chantier à l'architecte Jean de la Morinerie, qui renforce son côté italianisant : toit plat, grandes corniches, pergola... . Il crée une demeure à deux étages dans un style moderniste atténué par des réminiscences néo-classiques. La décoration, particulièrement soignée, est inspirée de la flore et la faune sous-marine, d'après des dessins de Mathurin Méheut. Les ferronneries d'art réalisées par Edgar Brandt et Raymond Subes, et les mosaïques d'Isidore Odorico recomposent ainsi un monde sous-marin d'un grand réalisme. Le jardin japonais, vraisemblablement conçu dès 1913, s'orne d'une cascade elle aussi décorée de mosaïques.
elle domine la falaise avec son toit plat |
Il faut dire que ne pouvant se rendre au Japon pour cause de problèmes de santé suite à la Première guerre mondiale, notre Louis Fricotelle demande à différents artistes d'amener le Japon à lui. Notamment Mathurin Méheut dont je vous parle de temps à autre, qui part au Japon en 1914, et revient de toute urgence en France suite à la déclaration de guerre avec l'Allemagne. De ce voyage il ramène de splendides dessins, et croquis de ce pays fascinant. L'inspiration des ferronneries vient de là, ainsi que quelques éléments de l'architecture intérieure. Le mosaïste Isidore Odorico, l'auteur de la piscine de Rennes que j'ai longtemps fréquentée, s'inspire aussi de ces dessins pour réaliser des mosaïques de toute beauté. Quand on visite le musée de Montmaurin, on trouve le livre d'Odorico qui poursuit le travail des mosaïstes romains !
Nommé peintre de la Marine en
1921, Méheut, connu pour la précision de ses relevés animaliers ou végétaux
comme pour ses croquis de la vie quotidienne des travailleurs de la mer ou de
la terre, s'amuse : dans le spacieux vestibule Art déco, le sol en mosaïque
apparaît comme un fond sablonneux parsemé d'hippocampes, d'anémones de mer ou
de méduses. Les portes vitrées qui y donnent sont ornées d'algues en
ferronnerie. -"C'est comme si le sol était le fond de la mer avec les
algues qui remontent vers la surface", commente de son côté Marie de
Kerdrel, également en charge des lieux, et qui a grandi dans cette maison
familiale.
Odorico, issu d'une famille d'artisans italiens installés en Bretagne (les italiens sont restés les as du carrelage !) réalise toutes les mosaïques et il y en a partout : les sols sont ornés de pieuvres et autres mollusques, encore plus abondants que ceux d'une villa romaine !
Le Japon demeure très présent au sein du jardin. La propriétaire actuelle a fait refaire dans un esprit japonais le jardin dessiné à l'origine par Meheut autour du bassin en mosaïque. C'est très joli, et certainement plus encore au printemps avec les azalées en fleurs ; et en automne avec les momijis (érables) rouges flamboyants... Pour l'anecdote ce jardin a été refait par un japonais... . Le bassin est une merveille unique ! Un bijou sublime.
les tesselles à la feuille d'or dans la mosaïque scintillent à la lumière et mettent en valeur les feuilles de cannabis : Gaudi est (presque) dépassé ! |
il faut regarder le lustre en pâte de verre, et la paire de lampes de Müller sur les guéridons ! ((sur la photo ci-dessus, une ampoule est cramée, ah si j'étais là...!)) |
je n'ai trouvé que cette aquarelle, qui donne une bonne idée des peintures de Reboussin |
alors une question : je ne vois pas de vitrail, pourtant, il en existe des fenêtres !
et le vitrail démonté d'hier, nous l'avons bien vu, il est magnifique !
était-il prévu pour la "maison du soleil levant" ?
dimensions : 236x243
QUI PEUT M'AIDER ?
je cherche (sans trouver) si Meheut a dessiné des vitraux...
et puis je me retrouve à Lille !
...il a dessiné les thèmes marins de l'Huitrière à Lille...avec des homards ! |
ne me dites pas que ce sont des Lilloises et Lillois : c'est du Mathurin pur jus ! |
l'Huitrière un de ces jours !
je savais que j'en trouverais un ! |