poésie à la
médiathèque
Cela tombe bien : je vous
parlais des troubadours (ce qui signifie poète en occitan). J’ignorais qu’il
existât un féminin : Aurélia Lassaque est poétesse, en occitan : « troubaïrits ». Fille d’un
professeur de lettres du Lot, son père a décidé de tester (pendant ses vacances
de Lycée … ah, ces enfants de prof’s !) un nouvel enseignement de l’occitan.
Voilà comment elle a appris cette langue d’Oc. En réalité la même que le
Provençal de Mistral…. (N’oublions pas qu’il a été prix Nobel) ! Cette langue qui, disparue, resurgit sans qu’ils
s’en rendent compte chez les gens du midi, avé
l’assent qui est la dernière musique de la langue originelle.
–« C’est la langue des indiens, nous
raconte Aurélia, avant que les colons n’imposent
le Français, ce qu’a fait François 1er en imposant en 1539 «
le francilien » dans les actes administratifs, faisant du coup disparaître
l’occitan »
Le plus drôle, c’est qu’il s’agit
d’une langue-soeur du catalan, et cousine des autres langues latines. Ce qui
explique qu’Aurélia se fasse comprendre partout où la culture a conservé ses
attraits : dans les pays latins bien entendu. Mais aussi les anglo-saxons.
Et même Israël, où elle est traduite en hébreu.
Par contre, si vous voulez
évoquer Isabelle, qui est forcément belle, syllabe contenue dans le prénom,
mal barré de jouer avec pretty woman,
en langue anglaise : nos amis d’outre-Manche préfèrent évoquer Bella, comme quoi traduire la poésie
suppose beaucoup d’intelligence !
Bien que toute jeune (elle a
trente et un ans et demie précise-t-elle) elle est déjà traduite en plusieurs
langues (je parle de la traduction française), ce qui n’arrive d’habitude (pour
les hommes) qu’après cinquante ans ! S’agissant des poétesses, je me
demande si la fameuse parité ne fonctionne pas à l’envers de l’habitude !
Le charme d’Aurélia opère sur la planète entière, dirait-on !
Pour elle qui pratique plusieurs
langues (être fille de prof’ a ses avantages), il lui a été plus facile de
commencer à écrire sa poésie en occitan car il s’agissait d’une langue vierge.
Nous sommes dans la médiathèque.
Pierre Maubé rejoint notre poétesse, et un dialogue s’engage. Aurélia nous lit
des extraits. En Occitan. Traduction française. Elle n’interprète pas : je dis bien : elle lit…
…et le charme opère
D’habitude, on lit les poèmes
avec les yeux, sans rien entendre ni rien dire. Ici, on ferme les yeux, on entend
les mots, on entend les phrases. On entend l’accent tonique, la musique des
mots, on devine de loin quelques significations, une mémoire ancienne cachée
dans notre ADN est éveillée… mais il faut attendre le Français pour vraiment comprendre.
Une magie sonore ...… poétique !
... « l’homme aimait le corps de sa femme ». Que c’est
joliment dit ! On comprend qu’Eros reste prégnant, ouf, il passe avant Thanatos, la mort !
« les bouches de ceux qui savent ne s’ouvrent pas, le secret est
gardé ».
De retour, je rédige ce billet
et ferme les yeux
J’ai encore dans les oreilles
le chant des salamandres