C’est très gentil ces histoires
de pin-up ! Un peu dérisoire ? Besoin de voir des mecs. De côtoyer des mecs. De
partager de vraies valeurs de mecs. De boire par exemple une vraie pression
entre mecs. De sentir une odeur de barbecue… de poudre ? Je ne mets
pas longtemps à me décider : je sais où aller.
Il existe ici une espèce de no man’s land au bord de la Garonne, au
Sud, une fois franchi le désormais « Portail
des Pyrénées » : on se rend au bord du fleuve. Il existe un
restaurant (presque étoilé) où se rendent les 4x4. Forcément, le patron l’a
dénommé : « l’étable ».
Déjà, voir des parkings où se pressent les 4x4 rassure : y doit y avoir
pas loin des mecs, possédant des 4x4. Forcément ils mangent quelque part des
entrecôtes grillées. Forcément des frites cuites dans leurs deux cuissons, un
peu grasses grillées et salées. Qu’on avale avec des bières pression, en ce moment une
bière de Noël serait bienvenue. Oui, ce restau spécialisé existe. Je brûle. Pas loin, une usine fait un bruit de
ferrailles : des jets d’étincelles. Des mecs qui soudent avec de petites
lunettes rondes sur les yeux : de vrais mecs. Un circuit de petites
voitures télécommandées : seuls des mecs adorant la radio-commande peuvent
avoir installé un chantier pareil ! Désert. Boueux. Il faut un 4x4.
Le meilleur est à côté : le
parking est bondé, se touchent les 4x4 Mercédès noir intérieur cuir, il faut un
tabouret pour monter à l’intérieur tellement le marchepied est haut. Pas de
souci pour franchir un gué inondé. Un coup de crabot, et le véhicule (intérieur cuir connolly) va franchir la
zone pleine de boue. On sent le propriétaire prêt à tout, prêt à sortir de l’ornière
fatale (pour les mecs normaux), lui a le gros véhicule (impeccable) prêt à le
sortir de tout mauvais pas (la Garonne qui sortirait de son lit en crue par
exemple). Je respire mieux, je me sens
en (bonne) compagnie, ils sont pas loin. Un autre 4x4, c’est un BMW. Je brûle. C’est plein de bagnoles-de-vrais-mecs.
On rentre. Je me suis fait
accompagner. Dans les cas difficiles, j’ai toujours adopté la méthode corse :
se faire parrainer. Mon « parrain » me précède. Porte en fer.
Claquement de la porte de fer. Petite salle, comptoir, des affiches partout.
Les mecs sont là, tous là, rassemblés, ils discutent. Nuques rasées. Comptoir. Tenues
de campagne (de combat). Tout le monde bavarde. Des affiches partout.
Défibrillateur (pour les séniors sans doute ?). Consignes de précaution. On
me présente au Président. Affable (je suis parrainé) il me salue. On lui cite
mon palmarès. Respect. Je suis pourtant tout nu. C’est la règle. J’entre ici
pour la première fois. On salue chacun d’une poignée de mains entre mecs. Coups
d’œil furtifs. C’est la première fois.
Passage dans la petite salle à
côté. Inspection des papiers. Mon « parrain » ressort avec un paquet
de cartouches. Un pistolet. Pas petit, un gros. Gros calibre. On n’est pas ici pour
rigoler, se marrer, ou frimer. Si je suis venu nu, c’est que j’ai laissé le
calibre à la maison. C’était la première fois.
On est là pour tirer
entre mecs
on va tirer des coups
c’est bon de tirer des coups
entre mecs
Les installations sont vraiment
professionnelles, j’ai fait mon service militaire, j’ai tiré avec des
pistolets-mitraillleurs, j’ai tiré avec des mitrailleuses, je sais de quoi je
parle. En entrant dans le pas de tir, des ustensiles me rassurent : des
grilles à griller. Une lessiveuse pour flamber. Tout le matériel pour des
barbecue géants, on sent le rassemblement dominical entre mecs, on ne doit pas
manger souvent végétarien ici, ça sent la viande rouge, les abats, tout ce qui
grille sur des feux de bois !
Le premier pas de tir mesure 100
mètres. Aspirateur à fumées. Caméras de surveillance. On est chez des pros, un
autre défibrillateur, au cas où. Il y en a partout. Craindrait-on l’infarctus ?
Les balles perdues, pas possible ! Consignes strictes. On ne tire qu’après
avoir respecté la règle. Comme la cible est éloignée, comment visualiser les
impacts ? Mon « Parrain » a emmené son matériel : un Canon
géant (c’est un appareil photo), avec zoom géant, réglé, on voit la cible tout
près, on peut même faire une photo des impacts. On se bouche les oreilles comme
si on décidait de dormir la nuit dans un boucan infernal (chaque coup fait un
boucan infernal). Le plaisir c’est de mettre le chargeur dans la cible, et pour
le savoir, le mieux c’est l’appareil photo qui zoome, personne n’avait pas
pensé à cette astuce : les mecs se passent le tuyau, et se groupent autour
du Canon (il porte bien son nom). Joli tir ! Commentaires flatteurs. On se
sent compris, soutenu, la chaleur humaine conforte chacun. On n’est enfin plus
seul.
On a mis le chargeur
dans la cible ? Super, on a tiré ses coups, on est content.
Pas difficile de contenter un mec
pas besoin de meufs, elles ne comprennent rien
Pour tirer un coup, mieux, des coups
mieux vaut un bon magnum (357)
9 millimètres
balancer le chargeur dans la cible
estime de soi :
on est un mec !
P.S : on comprendra que pour des raison de discrétion évidentes, mes photos restent le plus anonymes possibles.