Ces voitures d’avant-guerre
toutes neuves m’empêchent de dormir : où donc sont-elles garées la nuit,
pour rester aussi impeccables ? Ici, la campagne regorge de vieilles
fermes, de hangars, et n’importe où il est possible de tomber sur un artisan singulier ;
un vieux château ; une productrice de gelée royale ; un atelier
mécanique regorgeant de machines-outils, de vieux tours, cisailles et autres
plieuses… !
Encore faut-il être
parrainé, pour identifier le lieu magique, et pouvoir entrer !
La solution vient
d’Emmanuel : il connait bien Alain F, une célébrité de Mont Royal, à vrai
dire le trésorier de l’Automobile Club, qui lui a déjà fait visiter son garage
personnel, en réalité son Musée : il me prend rendez-vous, je programme « Paulette » (la GPS), et par de
petites routes dignes du siècle dernier, j’arrive dans le village signalé. Des
hangars effectivement, grande porte coulissante ouverte, je suis attendu.
Elle m’attendait en effet : la voiturette Donnet : toute neuve, avec ses deux couleurs bleu-France. Moteur deux temps. Roues fil, à tambours incorporés. Tout est d’origine, sauf les portières autrefois en bois, refaites en tôle. Pas de différentiel à l’arrière, la voiture a tendance à filer tout droit, attention dans les virages ! Alain est désolé : il faudrait un pare-brise de Caddy, il n’a pu que visser deux saute-vent genre anglais qui le désolent ! Et s’il les enlève, bonjour pour reboucher les trous ! Il va falloir trouver le pare-brise adapté ! Comment faire ?
Second garage, des Panhard. Une
Simca d’avant-guerre, tout est impeccable, on mangerait par terre. L’équipement
est professionnel, Alain a démonté et remonté chaque voiture. Il y en a une moteur ouvert sur le pont élévateur, et il dispose d’un
stock de pièces détachées impressionnant.
Le meilleur est pour la
fin : je retrouve la Traction avant Rosengart au garage, avec son look
américain plein de chromes. Alain est fan de B14, car c’est sur cette voiture
qu’il a appris à conduire ! Il possède la torpédo au radiateur laiton,
protégé par une grille pare-pierres, qui était un accessoire bling bling ajouté par le propriétaire
d’origine : pharmacien, il voulait se distinguer de ses patients, avec
cet avant voyant !
Une autre faux cabriolet, arbore en plein milieu du
pare-brise un phare articulé : « le phare de chasse » : en 1927 les environs étaient
giboyeux, et tout conducteur-chasseur se baladait la nuit, pour braquer le dit
phare dans les yeux des lapins et autres lièvres. Et les descendre d’un coup de
fusil !
Les collectionneurs sont tous
pareils : le meilleur pour la fin : deux ancêtres, une Peugeot 1909
toute neuve : elle résulte en réalité de la transformation d’une
camionnette, qui servait de pharmacie roulante pendant la guerre de 14, pour
ravitailler un hôpital militaire dans la Meuse. Ses phares à acétylène sont
équipés de trois lentilles, et éclairent à 1 Kilomètre ! A côté la Rochet
Schneider a des équipements moins prestigieux, mais elle est plus
volumineuse !
Les collectionneurs
sont passionnés
Alain est
passionnant. Il sait tellement de choses ! Il a rassemblé de telles
merveilles !
C’est l’heure : quand deux mecs discutent, et que l’épouse
arrive, c’est qu’il est temps de passer à autre chose ! Je la salue. Je
sais le rôle de l’épouse, qui accompagne le mari, l’encourage, mais pose le véto
ultime à la passion dévorante ! –« Des
voitures, Alain en a assez ! » affirme-t-elle ! Mon épouse à moi m’attend : il va être l’heure de dîner, des modèles réduits de B14, je sais que j’en ai
assez aussi ! !
Je pointe, sur la pointeuse Lambert, elle fonctionne, comme en 1900...
...je viens de passer deux heures
émerveillées !
P.S : la dernière fois : http://babone5go2.blogspot.fr/2014/07/equiliberte.html